Il a plaidé pour une justice qui fonctionne loin des pressions et des influences quelles que soient leur nature ou leur origine. Le président de la République M.Abdelaziz Bouteflika a présidé hier au siège de la Cour suprême à Alger à l'ouverture officielle de l'année judiciaire 2003/2004. Une cérémonie suivie de très près par les observateurs au vu des évènements qui ont secoué ce secteur tout au long de cette année. Le vaste mouvement effectué dans le corps des magistrats, la plainte contre le FLN, «le putsh» contre le président du syndicat des magistrats Ras El Aïn, ainsi que le refus par le Conseil constitutionnel du texte de loi relatif au statut de la magistrature sont autant de faits ayant marqué cette institution, laissant les observateurs perplexes sur le fonctionnement même de la machine judiciaire en Algérie. Le président n'est pas revenu en détail sur ces questions, mais son discours apporte bien des réponses à ses détracteurs, précisément ceux qui lui reprochent de «trop s'immiscer» dans les affaires de la justice. Hier, Bouteflika a fait une sorte de bilan sur les actions entreprises dans ce secteur. Le dernier, notons-le, avant la course pour un deuxième mandat à la présidentielle. Il a, dans ce sens, bien défendu dans son discours la réforme de la justice. «Une démarche ambitieuse, précise-t-il, que j'ai engagée personnellement il y a quatre ans de cela, juste après l'adoption de la loi sur la concorde civile». Cette démarche, témoigne de «tout l'intérêt que je porte à la justice». Abordant les retards enregistrés dans la mise en oeuvre de cette réforme sur le terrain, Bouteflika, a renvoyé la balle aux responsables de ce secteur. Quatre ans après le lancement de ce chantier, «ô combien important» bien des résultats ont été réalisés, selon le chef de l'Etat. «Nous avons fait un pas important dans la révision et l'analyse de certains textes de loi», par ailleurs, souligne-t-il «il est vrai que si l'on continue sur ce rythme, je doute fort que ce processus connaisse d'énormes difficultés». A cette cérémonie d'ouverture qui s'est déroulée en présence du président du Conseil de la nation, et de celui de l'APN, de M.Ahmed Ouyahia, chef du gouvernement, de membres du gouvernement, des parlementaires et des magistrats ainsi que des représentants du corps diplomatique accrédité à Alger, Bouteflika a plaidé pour une «justice efficace et neutre». Pour une justice «qui fonctionne loin des pressions et des influences quelles que soient leur nature, ou leur origine». Pour sa part, il a déclaré qu'il n'a ménagé aucun effort, depuis son élection à la tête du pays pour que «l'Algérie soit dotée d'une justice indépendante et forte à même d'instaurer un climat de quiétude et de sérénité au sein du peuple». Un engagement qui ne fait pas l'unanimité parmi les analystes qui n'hésitent pas à faire le lien entre cet énième engagement du président et la crise qui agite le FLN. Il est clair que le verdict tant attendu du tribunal d'Alger explicitera, on ne peut mieux, la nature et les volets de cette indépendance prônée par le premier magistrat du pays. Notons que des magistrats, à l'image de Ras El Aïn n'ont pas manqué de dénoncer la manière dont avait été mené le procès contre le FLN de Benflis et la décision prise de nuit pour l'invalidation du congrès extraordinaire du FLN qui a vu la désignation de Benflis comme le candidat du parti à la présidentielle de 2004. La justice algérienne est atteinte de deux maux, estime le président, la non-application des décisions judiciaires et la non-crédibilité de certains verdicts prononcés dans les cours. Le rôle des magistrats justement, comme «garants de la transparence et de l'immatérialité de la justice» a été le point nodal de l'intervention du président. A ce sujet il insiste sur le fait que les dépassements et les lacunes signalés dans cette institution «sont l'oeuvre d'une minorité». Il serait dans ce cas-là, injuste d'incriminer tout le corps et de lui coller l'accusation de corruption. Dans la logique du président, même si ce phénomène, existe bel et bien au sein de cette corporation, l'Etat ne ménage aucun effort pour «vous protéger», dit-il s'adressant aux magistrats. Il cite à ce sujet l'élaboration d'une loi organique relative au statut de la magistrature qui «protégera ce corps de toute forme de pression ou d'influence». Notons que, paradoxalement, un premier texte a été déclaré «non conforme à la Constitution» par le Conseil constitutionnel l'année dernière, et ce après sa saisine par le chef de l'Etat. A l'époque, l'institution de Bedjaoui avait soulevé entre autres «l'insertion de matières relevant de deux lois organiques distinctes dans un même texte», un alibi qui n'a pas convaincu les observateurs ayant vu dans ce geste une volonté du président de dominer ce pouvoir. Le président ne finira pas toutefois son intervention sans aborder le projet de la concorde nationale qui rentre dit-il, dans «le processus de l'édification de l'Etat de droit».