Cette plaidoirie pour l'indépendance de la justice intervient au moment où celle-ci est décriée de toute part pour son “parti pris” dans l'affaire du FLN. La modernisation du système judiciaire et l'indépendance de la justice ont constitué les thèmes majeurs abordés par le président de la république dans un discours prononcé, hier, à la Cour suprême, lors de la cérémonie d'ouverture de l'année judiciaire 2003/2004. Le président a reconnu que “l'indépendance de la justice est une des conditions pour asseoir l'Etat de droit”. Mais cela ne veut nullement dire que “le magistrat peut se comporter comme il veut”. Aussi, il a considéré que cette indépendance s'acquiert quotidiennement et que sur le plan pratique “elle dépend du magistrat en premier lieu, puisque la loi fondamentale du pays la consacre”. Pour le président, la justice dépend en premier lieu de la conscience des magistrats, de la disparition des pressions exercées sur lui et de ses limites. Aussi, il a estimé que la qualification de la justice et sa mise à l'abri des influences et des pressions sont tributaires de la qualité de la formation des magistrats, de l'amélioration de leurs conditions matérielles, pour leur éviter “toutes sortes de dérapages”. À ce titre, le chef de l'Etat a rappelé que les deux avant-projets de loi sur le statut du magistrat et du Conseil supérieur de la magistrature sont de nature à “assurer l'indépendance du magistrat pour le prémunir de toutes formes de pressions et qui lui dicteront l'obligation de n'obéir qu'à la loi et à sa conscience”. La justice algérienne, selon le Président, est entachée de “deux tares dangereuses qui ont énormément coûté au pays : le jugement arbitraire et la non-exécution des décisions de justice”. “La non-exécution des jugements et des décisions de justice (…) porte atteinte à la crédibilité de l'institution judiciaire et amoindrit l'autorité de l'Etat. Ceci est inadmissible. Aussi j'appelle les magistrats, les fonctionnaires de la justice et les services de sécurité à faire en sorte que les décisions de justice soient appliquées avec rigueur et sans retard”, a-t-il encore affirmé. La réforme et le cas FLN Cette plaidoirie pour l'indépendance de la justice et la nécessité pour le magistrat de n'obéir qu'à la loi interviennent au moment où la justice est décriée de toute part pour son “parti pris” dans l'affaire du FLN. N'est-ce pas là, une manière pour le président de dégager toute responsabilité, quant à l'affaire de l'invalidation du VIIIe congrès du FLN qui connaîtra probablement son issue cette semaine ? Possible. Ceci dit, le président Bouteflika a indiqué accorder une importance capitale au dossier de la justice. De son point de vue, cette dernière doit nécessairement s'adapter aux évolutions et aux mutations connues par le pays. Toutefois, il reconnaît que le processus de sa réforme est “ambitieux, ardu et long”. Il dit noter des pas positifs dans la révision de certains textes de loi et “une amélioration relative dans les procédures judiciaires et dans le traitement des dossiers accumulés”, ainsi qu'une certaine “amélioration dans les conditions carcérales”. Toutefois, le rythme imprimé à la réforme de ce secteur ne l'agrée pas, car il est possible “de faire mieux”. Tout en plaidant pour la modernisation et la rationalisation du système juridique, Abdelaziz Bouteflika a exhorté les magistrats à “rationaliser l'action juridique, simplifier ses procédures judiciaires, alléger les formes de traitement des justiciables”. Tout comme il a appelé au respect des droits de l'Homme, de la présomption d'innocence. Par ailleurs, le président ne s'est pas empêché de ne relever que “des pratiques négatives et isolées”, comme la corruption et le népotisme qui ont été constatés chez une minorité de magistrats. Aussi, il estime qu'il faut sévir contre eux. Sur l'instauration d'un mécanisme ad hoc pour prendre en charge la question des disparus, Bouteflika a indiqué qu'il y compte pour installer un climat propice à la réalisation de “la concorde civile, la concorde nationale et la réconciliation nationale”. Il n'a pas aussi manqué de relever l'importance du système juridique pour attirer les investisseurs étrangers. “La stabilité politique ne suffit pas à elle seule, quoique c'est un élément très important, pour encourager la venue en Algérie de capitaux étrangers. Ceux-ci prennent toujours en considération le système judiciaire du pays où ils comptent investir.” Pour lui, l'économie de marché ne peut donner des résultats dans notre pays qu'en luttant, avec la force de la loi, contre la triche, le contournement et la corruption. A. C. Révision des textes relatifs au pourvoi en cassation Le président de la Cour suprême, M. Mohamed Zeghloul Boutarène, a annoncé, hier, lors de la cérémonie d'ouverture de l'année judiciaire 2003/2004, que la révision des textes relatifs aux procédures pénales en vigueur facilitant le pourvoi en cassation est à l'ordre du jour. Vu l'augmentation du nombre d'affaires soulevées à la criminelle, M. Boutarène a proposé de diminuer le recours au pourvoi en cassation et d'interdire le recours en cassation pour les infractions et simples amendes ou délits. En exposant le bilan des activités de son institution pour l'année 2002/2003, M. Boutarène a indiqué qu'elle a reçu 26 658 recours dont 16 591 ont été traités. A. C. /APS