La place Tahrir au Caire renoue avec les vastes rassemblements de la Révolution de février 2011 Dans la matinée d'hier, des heurts ont à nouveau opposé des groupes de jeunes à la police près de la place Tahrir au Caire, où des militants se préparaient pour un grand rassemblement prévu en soirée. Les opposants au président Mohamed Morsi étaient appelés à manifester hier à travers l'Egypte contre le décret donnant de vastes pouvoirs supplémentaires au chef de l'Etat, qui les a maintenus lundi soir malgré les critiques de la justice et plusieurs jours de troubles. Dans la matinée d'hier, des heurts ont à nouveau opposé des groupes de jeunes à la police près de la place Tahrir au Caire, où des militants se préparaient pour un grand rassemblement prévu dans l'après-midi et en soirée. Ces accrochages sporadiques, qui ont débuté la semaine dernière autour de la place, ont repris aux abords de l'ambassade américaine, avec des jets de pierres et des tirs de grenades lacrymogènes. Des militants anti-Morsi ont appelé à l'arrêt des heurts, de crainte qu'ils ne débordent sur le site de la manifestation. Sur la place Tahrir, un village de tentes est installé depuis vendredi pour protester contre le décret par lequel le président islamiste a en particulier mis ses décisions au-dessus de tout recours en justice, ce que l'opposition a dénoncé comme une dérive dictatoriale. Cette crise est la plus grave depuis l'élection en juin de M.Morsi, issu des Frères musulmans, à la tête du pays le plus peuplé du monde arabe avec 83 millions d'habitants. Les troubles qu'elle a provoqués dans le pays ces derniers jours ont fait deux morts et près de 450 blessés, selon des chiffres officiels. «Le président pousse le peuple à la désobéissance civile», «Les Frères musulmans volent la révolution», proclamaient des banderoles sur la place Tahrir. «Nous resterons à Tahrir tant que Morsi n'aura pas annulé sa déclaration», a déclaré Ahmed Fahmy, un chômeur de 34 ans qui campe sur cette place emblématique de la révolte ayant provoqué la chute du président Hosni Moubarak en février 2011. Les Frères musulmans, qui avaient dans un premier temps appelé à manifester dans un autre quartier du Caire pour soutenir le président, ont annulé ce rassemblement, expliquant vouloir éviter des affrontements. Après une rencontre avec la hiérarchie judiciaire lundi, M. Morsi a décidé de maintenir le décret controversé. Unique inflexion apparente, seuls ses «pouvoirs souverains» sont exclus de toute possibilité de recours en justice, a indiqué son porte-parole Yasser Ali, laissant entendre que les décision de routine pourraient toujours être soumises au juge sans pour autant définir précisément ces «pouvoirs souverains». Le décret annoncé le 22 novembre permet au président de prendre toute décision qu'il jugerait nécessaire pour «protéger la révolution», et empêche la justice d'examiner les recours contre le processus de rédaction de la Constitution, que ses adversaires estiment dominé par les islamiste. Les partisans de M.Morsi soulignent que ces pouvoirs exceptionnels donneront au président les moyens d'engager des réformes indispensables et assurent qu'ils cesseront avec l'adoption prévue dans quelques mois de la nouvelle Constitution. Dans son décret, le président a aussi demandé «de nouvelles enquêtes et jugements» dans les affaires de meurtres de manifestants lors de la révolte de 2011, faisant planer une menace sur certains hauts responsables militaires ou de la police, voire un nouveau procès pour Hosni Moubarak. Ce dernier point répond à une demande pressante de l'opposition et d'une grande partie de l'opinion, qui estiment que les procès qui se sont tenus jusqu'à présent ont été complaisants pour les inculpés.