Une importante étape vient d'être franchie par les Palestiniens, qui met la «communauté» dite internationale - en fait l'Occident - au pied du mur et face à ses responsabilités. Il n'y a plus, désormais, d'échappatoire: soit on veut une paix effective - et, dès lors, prendre toutes les décisions y afférentes - soit on continue à faire la politique de l'autruche, consistant à ne pas voir qui fait obstacle à une issue véritable à un conflit vieux de 65 ans. Il aurait fallu pour cela que chacun assume correctement ses responsabilités. La communauté des nations - y compris les Etats-Unis - a, à maintes reprises, réaffirmé par le biais du Conseil de sécurité de l'ONU - notamment la résolution 3236 (XXIX) - les droits inaliénables du peuple palestinien à l'autodétermination, à l'indépendance et à la souveraineté nationale, de même que son droit de retourner dans ses foyers et vers ses biens. De fait, l'ONU ne reconnaît pas l'annexion de Jérusalem-Est par Israël comme elle déclare, sans valeur légale, les colonies en Cisjordanie. Il y a donc une contradiction flagrante entre les résolutions votées et adoptées par cette communauté des nations et son immobilisme, pour ne point dire sa démission face aux exactions d'Israël dans les territoires palestiniens et contre les Palestiniens. Or, les assassinats ciblés (qu'Israël assume totalement et s'en glorifie même) - considérés comme des crimes de guerre que le droit international et la Charte de l'ONU condamnent - des dirigeants palestiniens, n'ont jamais été condamnés par la communauté internationale. A l'opposé des résolutions de l'ONU, Israël poursuit les implantations de colonies de peuplement en Cisjordanie et à Jérusalem-Est occupées sans que ce fait ne soit blâmé comme il se devait, l'ONU comme les puissances «agissantes» se limitant à «déplorer». Plusieurs agressions ont ciblé la bande de Ghaza ces dernières années occasionnant des centaines de victimes avec les mêmes réactions timorées lesquelles consistent à ne point mettre l'Etat hébreu en porte-à-faux ou en posture d'accusé. Et pour cause! En face de lui il n'y avait que des «Palestiniens». Des Palestiniens sans Etat qui n'avaient pas le pouvoir de porter ces crimes devant les juridictions internationales. Aussi, l'accession de la Palestine à l'ONU n'est pas seulement symbolique, elle est décisive. Désormais, l'Etat de Palestine a voix au chapitre et peut directement saisir les juridictions compétentes pour traiter les crimes qu'Israël commet à l'encontre des Palestiniens. Et Israël réfléchira désormais à trois fois avant de rééditer ses expéditions punitives contre les Palestiniens. En effet, ce que les Palestiniens ne pouvaient accomplir ès qualité, ils peuvent maintenant l'accomplir en tant qu'Etat. Israël ne s'y est pas trompé qui a tout mis en oeuvre - appuyé par les Etats-Unis - pour faire avorter l'admission de la Palestine à l'ONU - même en tant qu'observateur non membre -. La donne politique et diplomatique du contentieux israélo-palestinien a ainsi changé. C'est tellement vrai que les Etats-Unis auraient exigé des Palestiniens - contre un appui à cette accession à l'ONU - de ne pas recourir à la CPI (Cour pénale internationale) contre Israël. On voit bien, au final, que l'accession de la Palestine à l'ONU n'est pas aussi symbolique que l'on veut bien nous le faire croire. Entre une Palestine qui peut demain ester Israël en justice - s'il s'avère que le président Yasser Arafat a été empoisonné au polonium, la Palestine pourra porter l'affaire devant la CPI - et des Palestiniens qui, impuissants, et face à la pleutrerie internationale, ne peuvent rien faire pour se défendre, il y a un progrès immense. Désormais, les Palestiniens peuvent se défendre par eux-mêmes devant les juridictions internationales. Ce qui, tout considéré, est un incontestable mieux. Outre la victoire diplomatique remportée contre Israël et les Etats-Unis, les Palestiniens, jusqu'ici désarmés diplomatiquement et politiquement, ont désormais du répondant. On comprend que Washington estime «contre-productive» l'entrée de la Palestine à l'ONU. Les Etats-Unis ajoutent que cette accession de la Palestine va «compliquer» la donne du processus de paix. En fait, les choses se compliquent surtout pour Israël qui agissait à sa guise et menait le monde là où il le voulait. Les choses vont changer dorénavant. L'autorisation donnée vendredi par Benjamin Netanyahu à la construction de 3000 logements à Jérusalem-Est et en Cisjordanie occupées est surtout une fuite en avant, un défi et une bravade, lancés à cette ONU qui prend, enfin, au sérieux ses prérogatives.