Surpris et heureux par cette distinction, Barzakh nous invitait à discuter de la légitimité de ce prix. C'est autour de café et de gâteaux que l'écrivain Habib Ayyoub, lauréat du premier prix littéraire Mohamed-Dib, décerné par le président de la République lors de l'ouverture du colloque «Dib et l'Algérie» à Tlemcen, nous a accueillis lors d'une conférence de presse plutôt amicale et chaleureuse animée mardi en présence de ses deux «complices», Selma Hellal et Sofiane Hadjadj au siège de leur maison d'édition. Surpris et heureux par cette distinction qui couronne quelque part les efforts et la qualité de travail incontestables des éditeurs, Barzakh nous invitait à discuter de la légitimité d'un tel prix, de sa médiatisation, des répercussions éventuelles et du sens de l'oeuvre de Habib Ayyoub qu'ils accompagnent depuis maintenant trois ans. Evoquant d'abord le choix des deux écrivains proposés à ce concours littéraire par les éditeurs, à savoir Habib Ayyoub et Ali Malek, Selma Hellal dira que «ce sont les deux auteurs qui incarnent l'esprit de notre maison d'édition, qu'on a été chercher, qu'on a extirpé de l'anonymat, sur qui on a parié et qui s'inscrivent dans une démarche d'écrivain dans l'avenir et qui ont du souffle...». Très content à l'annonce de cette nouvelle heureuse, Sofiane Hadjadj se posera tout de même des questions quant aux «instances de légitimation» d'un tel prix en Algérie, a fortiori un pays qui a perdu cette tradition de lecture comparé à la France, par exemple. «Pourquoi n'a-t-il pas eu l'écho escompté?», se demande-t-il. Puis, dira-t-il, «il est suspecté à cause du cérémonial qui l'a entouré à savoir la remise du prix par le Président. Ceci a pu le desservir d'où le regard sceptique des gens sur ce prix». Quoi qu'il en soit, ce genre de prix est toujours important, et pour l'écrivain et pour le lectorat. Pour l'un, parce que cela va stimuler sa fibre émulatoire, et l'autre, parce que cela va le pousser à acquérir «le livre» croit-on, par excellence. Enfin, donnant la parole au premier concerné, lauréat avec un recueil de nouvelles C'était la guerre, Habib Ayyoub après les remerciements d'usage à ses éditeurs, évoquera dans une verve qui lui est propre, son amour pour l'écriture et ses envies comme adapter le roman le Gardien au cinéma, par exemple. Mais cela coûte énormément cher. Même la somme attribuée à notre auteur (100 millions de centimes) ne suffirait pas pour concrétiser tout le rêve que procure le livre. Et puis, que reste-t-il comme salles en Algérie? Une dizaine, tout au plus. «C'est une espèce d'antropie», résume Habib Ayyoub. Natif et résidant à Dellys, Ayyoub (56 ans) a fait des études de cinéma, télévision et radio à l'Insas de Bruxelles. Rentré en Algérie, il est assistant-réalisateur sur des longs métrages de fiction à l'Office national algérien du cinéma avant d'être licencié. Il se tournera vers l'écriture journalistique et littéraire. Cependant, «j'ai toujours écrit», confie-t-il et de préciser «j'écris de manière visuelle». L'impact de l'image, l'on comprend, reste omniprésente. «J'écris mes bêtises depuis longtemps, mais je n'ai pas l'urgence de me faire publier. En écrivant, je me fais plaisir ainsi qu'aux autres. Mon objectif est d'être un conteur d'histoire». Et puis l'artiste de lâcher : «Il ne faut pas se prendre au sérieux». Habib Ayyoub publie également chez Barzakh le Gardien, récit (2001) et le Palestinien, roman (2003). Au théâtre : le Diable m'en est témoin, mise en scène Olivier Py, Limoges, Orléans 2003 et une pièce radiophonique pour France-Culture, mai 2003.