Sidi Bouzid, ville du centre-ouest de la Tunisie (...) a vu le 17 décembre 2010 un jeune vendeur ambulant, Mohamed Bouazizi, s'immoler par le feu dans un geste de désespoir qui a déclenché la révolte tunisienne. Transition politique grippée par les divisions et la violence, économie en berne et menaces extrémistes: le désenchantement a remplacé l'euphorie en Tunisie, en Egypte et en Libye deux ans après le début du Printemps arabe. A Sidi Bouzid, ville du centre-ouest de la Tunisie qui a vu le 17 décembre 2010 un jeune vendeur ambulant, Mohamed Bouazizi, s'immoler par le feu dans un geste de désespoir qui a déclenché la révolte tunisienne, la célébration de sa mémoire se prépare dans les dissensions et la polémique. Une partie du comité des célébrations a démissionné pour dénoncer une «mainmise» des islamistes d'Ennahda, au pouvoir, sur cette manifestation et l'opposition va en profiter pour manifester contre le gouvernement, incapable à ses yeux d'amorcer un relèvement du pays. Les habitants de cette ville frondeuse jugent presque unanimement que rien n'a bougé depuis 2010, en particulier le chômage qui continue de faire ses ravages. «De quelle révolution parlez-vous? Rien n'a changé ici», s'insurge Ezzedine Nasri, qui comme Mohamed Bouazizi, exerce le métier de marchand ambulant, et dont la femme, diplômée d'université, ne trouve pas de travail depuis 2002. La Tunisie vient d'éviter de justesse une grève générale à l'appel du syndicat majoritaire, l'Union général tunisienne du travail (Ugtt) qui voulait protester contre une attaque par des miliciens proches d'Ennahda. Un compromis de dernière minute avec le gouvernement a permis d'annuler la grève sans dissiper le sentiment qui prévaut dans le camp laïque sur des intentions d'Ennahda de vouloir islamiser, de force s'il le faut, le pays. L'attaque contre l'Ugtt fait partie «du plan de revanche de Rached Ghannouchi (le chef d'Ennahda) et de ses partisans salafistes contre toute institution tunisienne qui a contribué à la construction de la Tunisie moderniste et rationnelle», écrit un militant du camp laïque, Omar S'habou dans le quotidien Le Maghreb. En un an, le gouvernement, vainqueur des élections d'octobre 2011 n'arrive pas à redresser l'économie et est en outre accusé de laisser faire les salafistes qui multiplient les coups d'éclat, attaquant violemment l'ambassade américaine le 14 septembre. L'Assemblée constituante n'a pas beaucoup avancé dans l'élaboration d'une nouvelle constitution et ses travaux sont marqués par les nombreuses polémiques entre islamistes et laïques. Les élections prévues en 2013 risquent de ce fait d'être reportées, ce qui ajoute aux incertitudes. Mercredi, l'agence d'évaluation financière Fitch a abaissé d'un cran la note de la dette à long terme de la Tunisie, de «BBB» à «BB+», la faisant ainsi tomber dans la catégorie des emprunts spéculatifs en raison de «la transition économique et politique du pays qui s'avère plus longue et plus difficile que prévu». En Egypte, le pays n'a jamais été aussi divisé que depuis la tentative du président islamiste Mohamed Morsi de s'octroyer tous les pouvoirs. Sous la pression, il a renoncé à ces pouvoirs mais a maintenu un référendum sur une constitution rédigée par des islamistes et que l'opposition appelle à rejeter. Le sang a coulé à nouveau en Egypte lors des violentes manifestations contre la décision du président, aggravant les tensions dans le pays. Du coup, la demande d'aide de 4,8 milliards de dollars que l'Egypte a formulée auprès du FMI est gelée sur décision du Caire en raison des troubles politiques dans le pays. En Libye, les autorités ont réussi à organiser des élections générales en juillet et à rétablir la production pétrolière mais l'insécurité et les menaces extrémistes n'ont pas disparu. Les huit mois du conflit armé qui a emporté le régime de Mouamar El Gueddafi a laissé des traces: la prolifération de milices armées, le trafic d'armes et l'émergence de menaces terroristes illustrées par l'attaque du 11 septembre qui a coûté la vie à quatre Américains dont l'ambassadeur Christopher Stevens.