Le président français a prononcé les propos tant attendus Avec des termes mesurés, François Hollande a fait sauter un verrou psychologique dans ce dossier de la mémoire. Quand du haut de sa tribune, devant les parlementaires des deux chambres réunies, les membres du gouvernement et les ambassadeurs de pays accrédités à Alger, le président François Hollande a prononcé les propos tant attendus, les acclamations fusent dans la salle du Palais des Nations d'Alger. La scène s'est répétée durant les trois quarts d'heure, qu'a duré le discours historique qui a dessiné les contours d'une réconciliation des relations entre les deux pays. «Pendant 132 ans, l'Algérie a été soumise à un système profondément injuste et brutal. Ce système a un nom: c'est la colonisation, et je reconnais ici les souffrances que le système colonial français a infligées au peuple algérien», a-t-il lâché sous une salve d'applaudissements. «Parmi ces souffrances», le président français François Hollande a cité «les massacres de Sétif, de Guelma, de Kherrata, qui, a-t-il, dit, demeurent ancrés dans la conscience des Algériens, mais aussi des Français». Parce qu'à Sétif, le 8 mai 1945, le jour même où le monde triomphait de la barbarie, «la France manquait à ses valeurs universelles». Auparavant, le président Hollande s'est interrogé dans son discours, si la France et l'Algérie sont capables d'écrire ensemble une nouvelle page de leur Histoire. «Je le crois. Je le souhaite. Je le veux», a-t-il répondu à son questionnement car on peut s'appuyer sur les liens humains et du fait de l'amitié qui existe entre les deux pays. Mais pour que vive cette amitié, M.Hollande a posé un préalable: «Elle doit s'appuyer sur un socle, ce socle, c'est la vérité». La vérité, «elle doit être dite aussi sur les conditions dans lesquelles l'Algérie s'est délivrée du système colonial, sur cette guerre qui, longtemps, n'a pas dit son nom en France, la Guerre d'Algérie», a soutenu le président Hollande affirmant que rien ne se construit dans la dissimulation, dans l'oubli et encore moins dans le déni car «la vérité, elle, n'abîme pas, elle répare, la vérité, elle, ne divise pas, elle rassemble». La paix des mémoires Avec des termes mesurés, François Hollande a fait sauter un verrou psychologique dans ce dossier de la mémoire. Son discours a été perçu comme un pas en avant dans la reconnaissance de la vérité sur la France coloniale même si du chemin reste encore à faire. «Nous avons ce devoir de vérité sur la violence, sur les injustices, sur les massacres, sur la torture. Connaître, établir la vérité, c'est une obligation, et elle lie les Algériens et les Français. Et c'est pourquoi il est nécessaire que les historiens aient accès aux archives, et qu'une coopération dans ce domaine puisse être engagée, poursuivie, et que progressivement, cette vérité puisse être connue de tous», a-t-il reconnu. Dans cette histoire partagée, il y a aussi, les grandes consciences françaises, qui ont su s'élever contre l'injustice de l'ordre colonial. M. Hollande cite Georges Clémenceau, André Mandouze, Germaine Tillion, l'écrivain François Mauriac, qui sut rappeler dans les moments difficiles la véritable grandeur d'un peuple qui ne repose pas sur sa force brutale, mais sur la puissance de son message universel. «Et puis, notre Histoire, l'Histoire de la France, c'est aussi Alger, qui fut la capitale dans les moments les plus sombres de la France libre, parce que c'est ici que s'était réfugié l'honneur de la France, à Alger, avec le général de Gaulle à sa tête». L'autre défi que les deux pays ont à relever est celui de la jeunesse, de la formation et de l'éducation. Parce que nous avons tous conscience que la jeunesse n'est pas simplement un atout, une vitalité, c'est aussi une ressource que nous devons accompagner, encadrer, valoriser. «Dans tous les accords que nous avons passés entre l'Algérie et la France au cours de cette visite, ce sont des accords de formation et j'en ferai la démonstration à travers ce que nous allons faire pour des réseaux d'institut d'enseignement supérieur de technologie», a affirmé le président français qui a également promis un accueil meilleur aux demandeurs de visas pour la France et de faire en sorte que le traitement des dossiers se fasse de manière plus rapide. «Il est nécessaire de maîtriser les flux migratoires, mais la demande de visa ne doit pas se transformer en un parcours d'obstacles ou, pire encore, une humiliation», a-t-il souligné par ailleurs.