Photo : M. Hacène Par Amirouche Yazid Attendu porteur d'excuses ou de repentance, le président français, François Hollande, s'est suffi de reconnaitre les souffrances que le colonialisme a infligées au peuple algérien. Résultat final de la visite-événement de François Hollande : la France reconnait ses crimes commis en Algérie. Elle ne s'en excuse pas cependant. «L'Algérie a été soumise pendant 132 ans à un système profondément injuste, brutal et destructeur. C'est l'ensemble du passé colonial que je veux regarder aujourd'hui avec lucidité, tel qu'il a été, tel qu'il a duré, tel qu'il a enduré», a déclaré le président français devant les parlementaires des deux chambres. «Rien ne peut justifier les agressions commises contre la population algérienne, la négation de son identité et de son aspiration à vivre libre», a-t-il encore souligné. Pour appuyer son propos, M. Hollande cite les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata. Il dira que ces «massacres sont profondément ancrés dans la mémoire et dans la conscience des Algériens. A Sétif, le 8 mai 1945, le jour même où dans le monde triomphait la liberté et la justice, la France manquait à ces valeurs universelles, celles qu'elle a contribué à faire éclore, celles de la République». Sur sa lancée de «reconnaisseur», M. Hollande reprocha à la France le retard qu'elle avait mis pour admettre la Guerre d'Algérie. Il a soutenu, à ce propos, que «la vérité doit être dite de la même façon sur les circonstances dans lesquelles l'Algérie s'est délivrée de ce système. La vérité doit être dite sur la Guerre d'Algérie que la France a mis tellement de temps à appeler par ce nom». Mais avant de passer à cette reconnaissance, qui visiblement ne contente pas assez parmi les Algériens, M. Hollande n'a pas hésité, dans ce qui pourrait être l'introduction de son discours, à avouer «l'importance de l'événement», mais surtout la complexité des «enjeux», ayant entourée la visite d'Etat qu'il effectuait en Algérie le 19 et 20 décembre. «Je mesure l'importance de l'événement, mais aussi les enjeux : ouvrir un nouvel âge dans les relations entre l'Algérie et la France», avait annoncé le président français. Usant de méthodologie discursive, M. Hollande lança l'interrogation aux parlementaires, et à travers eux, au peuple algérien : «sommes-nous capables d'écrire ensemble une nouvelle page d'histoire?». Le chef d'Etat français répond par un «oui, je le crois, je le souhaite, je le veux. Nous en avons besoin». Il y a néanmoins un préalable à régler pour y arriver, selon M. Hollande : la vérité. Dans ce sens, il dira que «l'amitié doit s'appuyer sur un socle, qui est la vérité. Rien ne se construit dans la dissimulation, l'oubli et surtout le déni. La vérité n'abîme pas, elle répare. Elle ne divise pas, elle rassemble. L'histoire, même quand elle est tragique, doit être dite». Et posant le doigt sur la cruciale question de la vérité, l'orateur, décidément rompu à un tel exercice, évoquera la non moins importante question des archives, élément essentiel pour tout travail visant l'établissement de la vérité. «C'est nécessaire que les historiens puissent accéder aux archives […], la paix des mémoires repose sur la connaissance et la vérité», a indiqué Hollande en se référant, faut-il le souligner, à une déclaration de Abdelaziz Bouteflika, qui préconisait une «lecture objective de l'Histoire». C'était au printemps dernier à Sétif, à l'occasion de la célébration des massacres du 8-Mai 1945. Pour l'avenir, François Hollande n'a pas caché son souhait de voir l'Algérie et la France réussir des projets communs. Il a ainsi parlé de «l'unité méditerranéenne de demain qui peut être bâtie par l'Algérie et la France». Dans le registre économique, M. Hollande a appuyé «un partenariat stratégique d'égal à égal», qui donnera «une vitesses supérieure pour les projets communs». En matière de défis que les deux pays doivent relever ensemble, M. Hollande a évoqué trois éléments. Le premier a trait à l'économie. «Je veux que l'économie soit au cœur de notre partenariat», a-t-il annoncé. Il disposait, pour la circonstance, d'un atout de taille, qui est «la concrétisation du projet de l'usine Renault», dont l'accord vient enfin d'être signé. Le deuxième défi commun évoque la jeunesse des deux côtés, notamment les étudiants algériens inscrits en France. Le troisième défi est lié à la circulation des personnes. Admettant la nécessité de «maîtriser le flux migratoire», M. Hollande annonce que l'accord de 1968 ne sera pas revu pour le moment, mais que «des mesures seront prises quand elles s'imposent». A ce propos, M. Hollande s'est félicité que 200 000 Algériens reçoivent chaque année un visa au niveau des consulats français. Hollande déclare que «la France attend aussi que l'Algérie ouvre ses portes aux jeunes français».