«La censure est mon ennemie littéraire, la censure est mon ennemie politique. La censure est de droit improbe, malhonnête et déloyale. J'accuse la censure.» Victor Hugo, Correspondance, 1830 Alors qu'on critique souvent l'Entv pour sa censure et pour sa vision très limitée du débat politique contradictoire, les télévisions privées algériennes ne sont pas en reste puisque la censure existe aussi en dehors du plateau du 21 boulevard des Martyrs. C'est ainsi que l'ex-chef de gouvernement et ancien ministre des Finances, Ahmed Benbitour, a été censuré par la chaîne montante Djazaïria TV. Plus de quatre mois après avoir fait une longue interview télévisée avec Zahra Harkat, Ahmed Benbitour a vu l'émission qui lui était consacrée censurée par la direction de la jeune télévision privée. Prévue au début du mois de novembre, comme l'avait montré la bande annonce diffusée sur la page Facebook, l'émission a été purement et simplement mise au placard par le patron de la chaîne, Riad Rechdal. Curieusement, le soir de sa diffusion (le premier portrait d'un homme politique de l'opposition), la chaîne a bugué et a cessé de transmettre ces émissions durant environ trois minutes. Un incident technique qui en dit long sur les interventions pour arrêter la diffusion de cette émission. Et les raisons de cette censure sont sans doute les propos tenus dans l'émission par l'ex-chef de gouvernement en 2000. Ahmed Benbitour n'a pas failli en effet à ses positions politiques connues et reconnues, en critiquant la gestion du pays et certains hauts responsables du pays. Mais le scoop de l'émission, c'est surtout les intentions affichées de Benbitour de se porter candidat à l'élection présidentielle 2014. Une déclaration qui a sans doute pesé sur la censure de cette émission. Visiblement irrité, le patron de Djazaïria n'a pas voulu prendre des risques en diffusant cette émission qui aurait des conséquences très fâcheuses sur l'avenir de la chaîne. «Maâ Zahra» est une version algérienne de l'émission de M6 «Fréquence star». L'émission est produite par l'agence Al Pub, dirigée par Allel, le mari de l'animatrice principale Zahra, qui a voulu sortir de la feuille de route de l'émission qui était jadis consacrée aux stars de la chanson, de la culture et du cinéma et a choisi pour une fois de donner la parole à un homme politique très connu. Une virée artistique intéressante, mais Zahra Harkat, qui se rapproche du concept de la plus célèbre intervieweuse américaine Oprah Winfrey a très vite déchanté, quand elle a découvert la censure des patrons de Djazaïria TV. La chaîne des golden boys de la télévisions algérienne qui avait osé mettre en dérision, intelligemment, les hommes politiques algériens durant le mois sacré dans «Djornane Gosto», avait vite mis un terme à l'émission après le Ramadhan, mettant dans l'embarras les comédiens dont certains sont allés vers d'autres cieux plus probants. Selon certaines sources, les responsables se sont pliés aux pressions extérieures dans l'espoir d'obtenir une ouverture officielle et surtout bénéficier de la publicité publique. Il n'en est rien puisque la chaîne est asphyxiée financièrement. Comme quoi, même en diffusant de l'étranger, la censure est toujours là. [email protected]