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Fin d'acte, début de partie
LA DEMISSION DE JEBALI
Publié dans L'Expression le 21 - 02 - 2013

«Ma proposition de former un gouvernement apolitique n'a pas bénéficié de l'appui nécessaire suffisant», c'est ainsi que le Premier ministre tunisien a reconnu, sans détour, l'échec de sa tentative de sortir son pays de la crise profonde qui le mine. Allant jusqu'au bout de sa logique et, conformément à sa promesse de partir en cas d'impossibilité de formation d'un gouvernement sans appartenance politique, suite à cet échec, Hamadi Jebali a remis sa démission au président de la République. Cependant, cette démission est suivie d'une déclaration qu'il donna au soir de mardi dernier, suite à sa rencontre avec Moncef Merzouki.
Dans cette déclaration, le Premier ministre, et en plus d'avoir reproché à la classe politique tunisienne son incapacité à s'entendre pour tirer le pays de sa crise, laisse entendre la possibilité d'un retour, le sien, tout en insistant sur certaines conditions. Jebali part donc en prenant bien le soin de ne pas refermer la porte derrière lui. Histoire peut-être de marquer la fin d'un acte mais pas celle d'une partie comme aurait dit Samuel Becket.
Bien des débats ont suivi cette démission sur les plateaux de télévision tunisienne et l'une des conclusions qu'il nous semble nécessaire de tirer est que, effectivement, la classe politique en Tunisie n'est pas sur la même longueur d'onde. Chaque parti, en essayant de tirer la couverture sur soi, tourne le dos à l'intérêt général et fait preuve dune monstrueuse irresponsabilité à l'égard du pays. Ce comportement n'est pas loin de rappeler celui de nos partis lors de l'ouverture politique, dans les années 1990, lorsque pouvant débattre librement après le silence imposé par le parti unique depuis 1962, les gens se mettaient à dire n'importe quoi, à faire n'importe quoi, à dire et à faire tout, sauf l'essentiel. La liberté d'expression était devenue une liberté de calomnie et d'injures et la liberté de débattre était devenue une autorisation pour le mépris des autres. Une sorte de vengeance sur une période passée mais qui n'avait pas trouvé sur qui s'abattre, sauf le voisin ou le parti d' à côté. L'apprentissage de la démocratie est sans doute un exercice compliqué lorsqu'on sort d'une longue période d'oppression des idées et des hommes.
Que s'est-il passé finalement?
L'annonce de sa décision de former un gouvernement de technocrates a été faite le lendemain de l'assassinat de l'opposant Chokri Belaïd. Ce qui a fait que l'ensemble de la presse et des observateurs ont vite fait de lier les deux événements. Or, rien ne permet en réalité de l'affirmer ou, au contraire, de l'infirmer.
Toutefois, que cette décision soit liée ou pas à la mort de Chokri Belaïd, elle ressemble fortement à une nouvelle phase dans une lutte, tenue jusque-là secrète, entre deux ailes du parti Ennahda. Une évolution dans une divergence entre ceux qui prônent la rigueur et la fermeture comme méthode de gouvernement et ceux qui défendent une méthode plutôt douce, basée sur l'ouverture et la tolérance.
S'agit-il finalement d'une lutte de leadership au sein d'Ennahda dans laquelle les numéros un et deux du parti se disputent l'influence et les territoires? Il n'est pas impossible en effet que les différences entre les deux hommes soient tellement importantes que le problème de leadership se pose. En annonçant son souhait de mettre en place un gouvernement sans personnalités politiques, Hamdi Jebaili osait plusieurs entreprises à la fois.
D'abord, il portait le débat interne de son parti, et donc le conflit qui en est la cause, à la connaissance publique. Or, en général, on n'aime pas que ce type de conflits, qui finissent toujours par fissurer les murs et user les hommes, enjambent le pas du siège du parti. Mais si Jebali l'a porté dehors c'est parce qu'il sait qu'avec cela il marquera des points en se démarquant des positions de son chef. Effectivement, la décision de neutraliser les ministères de souveraineté (Intérieur, Affaires étrangères et Justice) par la formation d'un gouvernement de technocrates a été bien appréciée par la rue tunisienne.
Mais, paradoxalement, dans son opposition à Ghannouchi, Jebali qui a trouvé quelques appuis importants dans son parti, comme le cheikh Mourou par exemple, n'a pas été suivi par l'opposition. A commencer par le parti du président, le CPR, qui a préféré traiter avec Ghannouchi. Comme quoi, pour le président et son parti, mieux vaut avoir à faire au chef qu'à ses intermédiaires! Calculs politiques restreints? Intérêts immédiats? Difficile à dire pour l'instant, toujours est-il que Marzouki a bien lâché Jebali dans son entreprise qui, dans la forme du moins, avait beaucoup à donner au pays. N'ayant pas réuni suffisamment de soutiens, et reconnaissant l'échec de son initiative, le Premier ministre a préféré remettre sa démission.
La question qui se pose, après avoir entendu toutes les précautions prises par Jebali lors de sa déclaration, est de savoir s'il va, oui ou non, revenir à la tête du prochain gouvernement.
Reviendra? reviendra pas?
Il faudrait d'abord comprendre que ce retour dépend du bon vouloir de Ghannouchi car c'est au parti Ennahda de proposer le Premier ministre. Jebali le sait mieux que quiconque et l'on avait bien l'impression que la déclaration faite après avoir déposé sa démission était adressée à Ghannouchi et non au peuple tunisien. Dans cette déclaration Jebali,qui était en train de dire ses conditions pour le retour, insistait sur deux points: la possibilité pour lui de revenir mais pas comme avant, c'est-à-dire avec un agenda clair et précis dont il donnait comme exemple la tenue des élections. En réalité, là aussi les propos de Jebali étaient lourds de sens et il fallait aller entre les mots chercher autre chose, bien plus importante. A notre avis, Jebali veut avoir les mains libres pour travailler et il reprochait là clairement à Ghannouchi et Ennahda de s'être mêlés de son travail de gouvernement. Les ministres relevant de son parti devaient recevoir des instructions différentes des siennes, voire contraires, depuis Montplaisir, le quartier d'affaires où se situe le siège d'Ennahda. Il n'est pas impossible que, en tant que chef de gouvernement, Jebali n'avait pas d'autorité réelle sur l'intérieur, la justice et les affaires étrangères qui devaient alors relever directement de Ghannouchi. En faisant cette lecture, on comprend autrement le comportement et les propos du Premier ministre qui voulut neutraliser ces ministères par le recours à un gouvernement de technocrates et qui, voyant son initiative repoussée, propose à Ghannouchi de lever la main de ces ministères et de ne plus interférer dans son travail de gouvernement.
Mais celui qui est le chef du parti Ennahda ne voudrait certainement pas laisser partir celui qui en est le secrétaire général. Plusieurs raisons peuvent être avancées à cela.
Tout d'abord, ne serait-ce que pour confirmer qu'il est actuellement le chef réel dans une Tunisie qui ne retrouve plus ses marques, Ghannouchi va devoir faire reconduire Jebali par le président Marzouki en le lui proposant à nouveau au poste de Premier ministre. De cette manière, il fera d'une pierre quatre coups. D'un côté, Il fera croire qu'il n'existe pas de conflit profond au sein de sa formation. Cette divergence entre lui et Jebali n'aura été qu'un malentendu à propos de la manière de gouverner, pas plus. D'un autre côté il tiendra parole car, n'oublions pas que lors de sa dernière allocution, il avait dit que Jebali restera Premier minsitre, cette affirmation était sans doute adressée à ceux qui soutiennent ce dernier et ils sont nombreux. Or, tenir parole, pour un leader est une priorité dont il ne faut jamais se détourner car elle ajoute au charisme et au leadership. Troisième raison, en reconduisant Jabali, il aura agi dans le sens d'empêcher la scission qui risque de frapper le parti à tout moment car, dans le cas où Jebali n'est pas reconduit, il y a lieu de craindre une division du parti Ennahda et la formation d'un nouveau parti autour de l'ex-chef du gouvernement.
Par ailleurs, sachant la confiance dont bénéficie Jebali chez les autres partenaires sur la scène politique, Ghannouchi ne voudrait pas courir le risque de briser cette vitrine acceptable de son parti en ramenant quelqu'un qui pourrait ne pas bénéficier du même capital sympathie. Au contraire, il souhaite que son parti tire profit et capitalise cette confiance.
Tout plaide donc pour que ce soit Jebali qui revienne à la tête du gouvernement. Quant à exaucer ses conditions, et pour parler franchement, rien n'est moins sûr. Dans la forme peut-être, mais dans le fond, il ne faut pas croire aux miracles. les scénarios donc de l'après-démission de jebali ne sont pas nombreux. C'est Jebali qui devrait succéder à lui-même.
Ghannouchi l'a affirmé et Marzouki l'a laissé entendre ce mercredi (hier) alors qu'il devait recevoir la secrétaire générale du Parti républicain au siège de la présidence, Maya Jribi, «qui a indiqué ces derniers jours qu'elle soutiendrait un gouvernement restreint mêlant politiques et technocrates» mais qui, en plus, insistait sur le fait que ce gouvernement devait être dirigé par Jebali.
Et si tout cela n'était que simple manipulation?
Telle est donc la lecture que l'on peut faire des événements de Tunisie en liaison avec le départ du Premier ministre. Toutefois, il subsiste une autre lecture des choses. Celle qui part de l'hypothèse que tout ce qui se passe chez nos voisins ne serait qu'une simple manipulation de l'opinion publique tunisienne, d'abord et mondiale, ensuite. A cette hypothèse, il y aurait selon notre analyse, trois raisons valables. La première c'est que, surpris par l'assassinat de Chokri Belaïd et voulant à tout prix éviter que cela soit utilisé contre leur parti, les gens d'Ennahda devaient trouver le moyen de détourner l'attention de la population. La méthode aura dans ce cas été celle de provoquer un incident. Dans la pédagogie moderne on parle de la «gestion par l'incident». Cet incident devait être suffisamment fort cependant pour «défocaliser» l'attention des Tunisiens sur l'assassinat de Chokri Belaïd, et déplacer le centre d'intérêt vers autre chose.
Ceci expliquerait pourquoi l'annonce de Jebali devait coïncider avec l'assassinat de l'opposant Belaid. L'événement était effectivement de taille: le numéro 2 du parti au pouvoir qui veut desserrer les doigts de son parti sur le gouvernement et qui ose s'opposer ouvertement à son chef Ghannouchi. Il y avait dans cela de quoi attirer l'attention des Tunisiens et les occuper jusqu'à ce que la colère provoquée par l'assassinat de Belaïd passe. Et il faut avouer que si cela était le cas, ce pari aura été réussi. La colère des Tunisiens contre ceux qui gouvernent leur pays est clairement montée ces derniers jours et l'assassinat de Belaïd leur a rappelé d'un coup que l'Assemblée nationale constituante a échoué dans l'élaboration de la Constitution pour laquelle elle a été élue. Il fallait à tout prix absorber cette colère. Voilà donc la deuxième raison que nous trouvons à l'hypothèse de la manipulation que nous avancions plus haut. Or, qu'y a-t-il de mieux pour absorber une colère qu'un événement de taille. Comme justement l'annonce d'un conflit ouvert au sein du parti qui gouverne est, à notre avis un sujet d'une haute importance à un moment où les Tunisiens éprouvèrent, par la violence malheureusement, la fragilité de leur gouvernement. Malgré leurs divergences d'avis et de perception, tous les Tunisiens s'entendent sur une chose et une seule en ce moment: Ennahda a échoué dans le gouvernement de la Tunisie. Cet échec est multiple selon eux et pour preuve, en plus de la non-élaboration de la Constitution, ils citent la situation précaire du citoyen, le chômage qui grimpe, l'insécurité, la sécurité parallèle, les tergiversations du ministère de l'Intérieur, l'extradition de l'ex-Premier ministre libyen qui fut considérée comme une atteinte aux droits de l'homme...
L'assassinat de Belaïd était venu soudain leur rappeler ce quotidien difficile et cette impossible avancée dont ils font porter la responsabilité au parti qui gouverne. Pour atténuer ce reproche et pour faire oublier cet échec, quoi de mieux que de le transformer en échec d'une initiative. Aujourd'hui, en Tunisie on parle moins de l'échec de Ennahda au gouvernement que de l'échec de l'initiative de Jebali. L'échec étant donc admis, on peut reprendre à zéro. Ce serait la troisième raison qui viendrait donc étayer cette hypothèse de manipulation. Que ce soit un déroulement réel des choses ou qu'il s'agisse d'une simple manipulation, la situation d'impasse en haut de la pyramide tunisienne, avec la démission de Jebali, voit prendre fin un acte sans pour autant que ce soit la partie qui se termine. Car la partie ne fait, elle, que débuter!


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