Des soucis pour l'ex-ministre de l'Energie «Je ne peux pas passer sous silence les scandales récemment relevés par la presse et qui touchent à la gestion de Sonatrach», a déclaré le chef de l'Etat. Au moment où le «feuilleton» Sonatrach va d'un rebondissement à l'autre, le président de la République sort de son mutisme. Il s'est exprimé hier sur le scandale qui ébranle le groupe. Dans un message adressé au secrétaire général de l'Ugta, Abdelmadjid Sidi Saïd, et aux travailleurs algériens à l'occasion de la célébration du double anniversaire de la création de la Centrale syndicale (24 février 1956) et la nationalisation des hydrocarbures (24 février 1971), Abdelaziz Bouteflika dit qu'il refuse de passer sous silence les scandales de la gestion de l'entreprise nationale des hydrocarbures. «Je ne peux pas passer sous silence les scandales récemment relevés par la presse et qui touchent à la gestion de Sonatrach», a déclaré le chef de l'Etat. Cette déclaration, la première du genre émanant du palais d'El Mouradia sur ce scandale qui défraie la chronique nationale depuis deux semaines, véhicule un message fort et clair. Le chef de l'Etat promet de faire la lumière sur cette affaire. Pour lui, il n'est plus question de fermer les yeux sur ce dossier. Des pots-de-vin estimés à des centaines de millions d'euros, pour ne pas dire milliards, ont été encaissés dans plusieurs contrats par Farid Bedjaoui, neveu de l'ex-ministre des Affaires étrangères et par l'ex-ministre de l'Energie, Chakib Khelil. Un scandale qui a provoqué le courroux au plus haut sommet de l'Etat. Le président de la République n'a pas caché sa colère en affirmant: «Ces informations soulèvent notre révolte et notre réprobation, mais je fais confiance à la justice de notre pays pour tirer au clair l'écheveau de ces informations, pour situer les responsabilités et appliquer avec rigueur et fermeté les sanctions prévues par notre législation.» Autrement dit, le président de la République donne le feu vert à la justice pour aller jusqu'au terme de cette affaire et prendre toutes les décisions qui s'imposent. Peu importe le poste, les personnes impliquées dans ce scandale n'échapperont pas à la justice. La déclaration du chef de l'Etat vient de conforter le parquet d'Alger, qui ne manquera pas de suivre ses investigations jusqu'au bout. Au lendemain de son éclatement, le procureur général près la cour d'Alger, Belkacem Zeghmati, avait déclaré, qu'une information judiciaire dans le cadre de l'affaire «Sonatrach 2» avait déjà été ouverte. Une première dans les annales de la justice algérienne dans des affaires aussi graves. Les faits révélés par certains médias nationaux et étrangers sont «en relation avec l'information judiciaire déjà ouverte auprès du pôle pénal spécialisé de Sidi M'hamed (Alger) dans le cadre de l'affaire dite Sonatrach 2», avait précisé un communiqué signé par le procureur général. La justice a-t-elle les moyens de sa politique? L'affaire suit son cours. En tout cas, l'ouverture d'une enquête démontre qu'il y a une volonté politique pour combattre ce phénomène et de s'attaquer au fond des choses. Certes, plusieurs affaires de corruption n'ont pas connu de suite, il n'en demeure pas moins que l'ouverture d'une enquête par le parquet d'Alger est un bon pas vers l'avant. Sur un autre chapitre, l'affaire Sonatrach n'a pas encore livré tous ses secrets. Après l'Italie, le scandale s'étend au Canada où la société SNC-Lavalin (qui est présente en Algérie) est également impliquée. La justice algérienne, qui s'est autosaisi du dossier apportera certainement des révélations sur le détournement des fonds publics par des personnalités publiques. L'affaire est devenue un secret de polichinelle. Le parquet d'Alger a la responsabilité de rendre compte des faits à l'opinion publique. D'autant plus que depuis l'éclatement de l'affaire, nous ignorons encore, si les autorités algériennes ont lancé la procédure pour le rapatriement des responsables cités dans ce «volumineux» dossier. Va-t-on par exemple émettre un mandat d'amener international? Interrogé sur ce scandale, le ministre de l'Energie et des Mines, M.Youcef Yousfi, avait indiqué mercredi que des mesures nécessaires concernant cette affaire seront prises une fois le travail de la justice terminé et que cette affaire soit confirmée. Il avait affirmé que des instructions «très fermes» ont été données par les autorités aux entreprises pour «défendre leurs intérêts et pour poursuivre toute personne susceptible d'avoir agi contrairement aux intérêts de nos entreprises». «La justice est en train d'enquêter. (...) Nous prendrons les mesures nécessaires lorsque la justice aura terminé son travail et que ces affaires soient confirmées et avérées», avait-il précisé. «Nous combattrons la corruption avec la plus grande détermination. Nous serons inflexibles dans ce domaine-là», avait souligné le ministre. Le dossier Sonatrach semble donc être pris au sérieux par les hautes autorités du pays, qui comptent donner un coup de pied dans la fourmilière. A une simple condition: que les paroles soient suivies d'actes.