Le congrès, annoncé à grands fracas médiatiques par Boudjemaâ Haïchour, n'aura finalement pas lieu. Hier, la presse a eu droit au grand déballage concernant la manière «hussarde» avec laquelle ont été menés les préparatifs du fameux congrès de redressement. Annoncé pour ce jeudi à l'hôtel El Aurassi par Boudjemaâ Haïchour à partir d'Oum El-Bouaghi, il a fini par être reporté à une date ultérieure, probablement pour après l'élection présidentielle. Il faut dire que pas moins de 22 wilayas, avec à leur tête les mouhafedhs mis en place par Belkhadem et ses hommes, se sont élevés contre cette démarche dans un document dont nous avons obtenu copie hier. Il s'agit de Batna, Khenchela, Oum El-Bouaghi, Constantine, El-Tarf, Adrar, Oran, Aïn Témouchent, Blida, M'sila, Médéa, Bouira, Alger, Tipaza, Boumerdès, Djelfa, Aïn Defla, Chlef, Mostaganem, Guelma, Souk Ahras et Béjaïa. La rencontre de ces mouhafedhs redresseurs et cadres avait eu lieu ce dimanche du côté de Télemly. Un document relatif aux 7 mouhafadhas d'Alger abondant dans le même sens a également été transmis à Belkhadem sans que ce dernier, semble-t-il, ait rien pu y faire. Désigné publiquement du doigt, Saïd Barkat, responsable de l'organique, est accusé dans une conférence de presse animée hier par des cadres et des militants mécontents de ce mouvement, de «mettre en avant ses amis et ses alliés politiques en vue de gérer sa propre carrière dans le but manifeste de devenir secrétaire général du FLN, mais aussi de devenir le prochain chef du gouvernement pour service rendu au président». Barkat, au passage, est accusé de ne même pas faire partie des rangs du FLN. Les conférenciers, sans oser aller loin dans les révélations, avouent à demi-mot, sous le feu nourri des questions que «ces délégués sont composés en grande partie par des éléments d'un autre parti (le RND présumons-nous), mais aussi par des militants du mouvement associatif et des activistes des comités de soutien du président Bouteflika». Résumé : «Nous nous trouvons en face des mêmes pratiques que nous avions dénoncées lors de la tenue du 8e congrès par Ali Benflis.» A voir la tournure ubuesque que prennent les événements, rien n'interdit donc de penser que nous nous acheminons, sans ironie aucune, vers un mouvement de redressement au sein de ce mouvement de redressement dont les «dérives» sont imputées à la mollesse politique de Belkhadem. «Un homme bien, venu du terrain, disposant d'une base, mais dont l'éducation empêche de mettre un terme aux agissements répréhensibles de certains de ses collaborateurs, à l'instar des ministres de l'Agriculture et du Tourisme». Sur le plan pratique, il est devenu évident, aux yeux de tous, que «le congrès n'aura pas lieu à la date prévue», cela, même si Haïchour et Barkat, en déplacement avec le président, avaient insisté hier sur le maintien de cette date, précisant que «les quatre congrès régionaux peuvent fort bien se tenir en un seul jour, c'est-à-dire demain mercredi». Une demande en ce sens, apprend-on de sources crédibles, a même été déposée auprès du ministère de l'Intérieur. L'on ignore, pour le moment, quelle a été la réponse des services concernés de Yazid Zerhouni. Les conférenciers rejettent en bloc «cet argumentaire irresponsable», ajoutant qu'une pareille démarche «menace aussi bien le devenir du FLN que celui de l'Etat algérien». Ils ajoutent, appuyant leurs dires par un placard publicitaire de Belkhadem, que «les assemblées générales régionales auxquelles sont conviés des gens triés sur le volet se tiennent entre lundi et mardi. Sur le plan pratique, il devient impossible aux délégués sortants de se procurer les pièces administratives nécessaires, notamment le casier judiciaire et le certificat de nationalité, sans lesquelles la validation des mandats devient tout simplement caduque». Kara Mohamed-Seghir, porte-parole des redresseurs, joint hier par téléphone, a avoué que «le congrès dans l'état actuel des choses est plus qu'hypothétique». Selon lui, la tendance lourde aurait rejoint les idées prônées par Abdelkader Hadjar, demandant la tenue d'une conférence de la réconciliation nationale à laquelle seront conviés les sages des deux camps. Abdelkader Hadjar, que nous avions joint dimanche par téléphone, avait insisté sur sa démarche, indiquant que sa participation ou non à ce congrès décidé à la va-vite, sans la moindre préparation, n'était pas encore à l'ordre du jour de ses préoccupations. Les cadres et militants en colère ne sont pas loin de penser la même chose. D'autant que sur le plan légal, personne ne détient le pouvoir, ni les moyens de convoquer ce congrès. Une réunion devant trancher cette question était prévue hier, tard dans la soirée, à l'hôtel Monkada. Nul doute, estiment des sources proches de Belkhadem sous le sceau de l'anonymat, que «le report du congrès sera prononcé». Une manière «élégante» de reporter en quelque sorte l'échec de ce mouvement de redressement qui, même s'il a bénéficié des soutiens de l'administration et de la justice, semble avoir manqué cruellement de l'essentiel: d'hommes aptes au combat politique et d'un minimum de légitimité politique et populaire. S'il est devenu évident aux yeux de tous que ce mouvement est victime de ses propres «ambitions» démesurées, rien ne dit que certains de ses dirigeants ne seront pas tentés par des actes désespérés dont les conséquences pèseront lourd sur l'avenir du pays pendant des années encore.