«C'est une affaire de spoliation par une entreprise publique de biens privés au nom de l'Etat.» Le contentieux administratif opposant la Sarl Epsr au ministère des Travaux publics, de l'Intérieur et des Finances n'en finit pas de connaître des rebondissements. Les derniers écrits dans la presse où ses détracteurs l'accusent d'avoir bénéficié des moyens de l'Etat par son statut d'ancien maquisard ont fait réagir le gérant de l'Epsr. «Je me sens touché dans mon honneur et mon amour-propre», a-t-il confié avant d'ajouter: «J'ai fait mon devoir de maquisard au même titre que mes camarades, peut-être un peu moins, mais je ne l'ai jamais crié sur tous les toits et j'ai trimé seul pour construire mon entreprise.» Devant un parterre de journalistes de la presse écrite, des membres du comité historique des 22, des membres de l'OS, d'anciens maquisards responsables de l'ALN, de hauts cadres de l'Etat et de juristes, le gérant de la Sarl Epsr a crié à l'injustice dont il s'est dit être victime. «Je suis colonisé dans ma maison et mes biens et ma maison au nom de l'Etat par la mafia politico-financière». Il a relevé «les anomalies et les aberrations juridiques» dans ce dossier qui traîne depuis 25 ans. Pourtant, dans son verdict rendu le 16 février 1997, le Conseil d'Etat avait ordonné la restitution des biens de M.Ould El Hocine propriétaire de la Sarl Epsr. «Cette décision de la Cour suprême ordonnant la restitution des biens à M.Ould El Hocine est opposable à tout le monde, c'est-à-dire qu'elle a acquis l'autorité juridique de la chose jugée», a déclaré un juriste présent à la conférence de presse. Visiblement très affecté, Ould El Hocine Mohamed Chérif n'a pas pris de gants lors de la conférence de presse qu'il a animée, hier au siège de son entreprise à Cheraga. Il a nommément accusé tour à tour le président du Conseil d'Etat, Mme Aberkane, et son prédécesseur Ahmed Bellil et Ahmed Benfriha, ancien ministre des Travaux publics d'être derrière l'injustice qu'il subit. Après la création de son entreprise en 1975 avec toutes les autorisations qu'il faut, le gérant a été incarcéré «pour atteinte à la sûreté de l'Etat». Cinq ans plus tard il a été libéré avec un non-lieu et rétabli dans tous ses droits civiques par jugement et par le même tribunal. «C'est durant cette période d'injuste incarcération que la mafia politico-financière a agi et s'est occupée de mes biens.» Le 21 octobre 1987, un arrêté interministériel, jamais publié dans le Journal officiel, transfère tous les biens de l'Epsr vers la Sntp, sous le règne de Benfriha alors ministre des Travaux publics. «Le commissaire du gouvernement a accordé mes biens aux membres de sa famille qui y sont à ce jour.» C'est le début de l'aventure pour Ould El Hocine jusqu'à 1997 où une décision définitive de la Cour suprême a ordonné la restitution des biens à qui de droit. Seulement, en mai 2000, le président du Conseil d'Etat, Ahmed Bellil «a falsifié les documents et annule l'arrêt du conseil d'Etat». L'arrivée de Mme Aberkane à la tête du Conseil d'Etat «a suscité un espoir en se sens qu'elle était au courant du dossier, mais cette dernière a reproduit les mêmes procédés que son prédécesseur tout en annonçant publiquement qu'il y a eu erreur matérielle dans le dossier». Aux derniers rebondissements de l'affaire, Ould El Hocine affirme qu'il a eu gain de cause, mais l'exécution du verdict du Conseil d'Etat tarde à être appliquée. Pourquoi? Là est tout le mystère de la justice algérienne en pleine réforme.