Les chrétiens catholiques sont contents. Ils ont un nouveau pape. Ils ne sont pas les seuls à être satisfaits. Les musulmans aussi. L'Organisation de la coopération islamique (OCI) par la voix de son secrétaire général, a «exprimé le vif espoir de voir les relations entre l'Islam et le christianisme redevenir cordiales et marquées par l'amitié sincère» dans un message de félicitations au pape François (c'est ainsi que s'appelle désormais l'ancien archevêque de Buenos Aires, Jorge Mario Bergoglio). Les juifs aussi sont contents. Le grand rabbinat d'Israël s'est dit «certain que le pape François, dont les bonnes relations avec les juifs sont bien connues, continuera dans cet esprit et renforcera et nourrira le lien avec l'Etat d'Israël et le peuple juif». Le président israélien, Shimon Pérès, s'est d'ailleurs empressé d'inviter en «terre sainte» le pape François qu'il considère «susceptible de renforcer les tentatives d'apporter la paix dans une région orageuse». Voilà les trois religions du Livre en parfait accord sur, au moins, ce point. Dans les faits, l'élection de l'archevêque argentin suscite bien des remous relayés abondamment par les médias dominants. D'abord, par des précisions empreintes d'arrière-pensées. C'est un jésuite (ordre religieux composé de grands intellectuels très rigoureux), disent-ils comme pour marquer une fracture. C'est un Argentin enchaînent, sournoisement, ces mêmes médias. Pour dire que Rome s'est fait voler la papauté par les Latino-Américains. Traditionnellement, en effet, le Vatican a toujours été, jusque-là, dirigé par un Européen. Dans l'histoire catholique, le titre de pape désignait l'évêque de Rome. On oublie volontiers de préciser que ses parents étaient italiens. Cela ne s'arrête pas là. On fouine dans sa vie et on lui découvre une ex-petite amie. Ce qui en fait un titre idéal. Dans le corps du texte, on se rend compte que c'était une de ses camarades de l'école maternelle ou presque. Ils avaient 12 ans. On sort de l'anecdote perfide pour entrer dans l'accusation directe. Les fins limiers des mêmes médias lui trouvent une attitude complice avec la dictature militaire argentine dans les années 1970. Le Vatican dément formellement. Alors les mêmes limiers changent les termes de l'attaque et relèvent «son absence d'engagement contre» la dictature. C'est toujours accusateur. Mais pourquoi toutes ces attaques? Tout donne à croire que le nouveau pape fait peur à certaines officines. Son élection les a surpris. Il n'était pas sur leur tablette des favoris. Il se dit même que le pape François avait refusé le poste avant l'élection de Benoît XVI. Ils ne comprennent pas pourquoi, cette fois, il a accepté. Le personnage échappe à leurs analyses. Il a la réputation de refuser toute interview. Il est bardé de diplômes. Il a co-écrit un ouvrage avec un rabbin. D'une intelligence supérieure. D'un grand charisme et d'une autorité réelle. Il est contre la mondialisation. C'est le prêtre des pauvres. Comme eux, il a toujours vécu simplement en refusant toute forme de confort superflu. Vraiment insaisissable! Chez nous, on aurait dit «Houta Matlaya Bessâboun». Doublement difficile à attraper. Même quand il avance, il donne l'impression de reculer. Les officines n'aiment pas ce type de personnalités. Un Benoît XVI était, pour eux, plus facile à «gérer». Il suffisait de «l'attraper» par son passé dans les Jeunesses hitlériennes. C'est pourquoi, d'ailleurs, il a fini par jeter l'éponge. Avec le pape François ce sera différent. Quelles seront ses relations avec les deux autres religions du Livre? On sait qu'il va travailler au «progrès des relations entre juifs et catholiques». C'est ce qu'il a écrit dans sa lettre, jeudi dernier, au chef de la communauté hébraïque de Rome. Sa réponse aux musulmans viendra, à n'en pas douter, après!