Une scène du film Le film de Mohamed Hamidi a réussi son entrée dans la cour des grands en parlant avec émotion et sincérité d'une Algérie qu'il porte au coeur. Malgré l'absence d'un film algérien en compétition au festival, l'Algérie comme histoire et à travers un cinéaste jusque-là inconnu, ont foulé avec brio et éclat le tapis rouge de la Croisette, à Cannes. Ainsi le film Né quelque part, sélectionné à la dernière minute par le comité de sélection du Festival a été projeté avant-hier à 11h à la salle Buñuel, devant une assistance curieuse et composée essentiellement de journalistes et de professionnels. Il faut dire que malgré l'absence de mention sur le programme et sur le catalogue, le bouche à oreille a très bien marché pour ce film hors compétition projeté en séance spéciale dans l'après-midi, au grand bonheur des lycéens de la région Paca. Le film Né quelque part de Mohamed Hamidi a réussi son entrée dans la cour des grands en parlant avec émotion et sincérité d'une Algérie qu'il porte au coeur. Comme tout film qui évoque l'immigration, les premières images démarrent de la banlieue et atterrissent quelques minutes après sur le sol poussiéreux d'un village en Algérie. Une situation qui nous rappelle: Il était une fois dans l'Oued de Bensalah ou plus loin encore Prend Dix mille balles et casse toi de Zemmouri. Quel que soit l'angle de prise de vue, Hamidi, comme tous les cinéastes issus de l'immigration, revendique son identité algérienne et un droit de parler de l'Algérie. Car l'histoire de ce cinéaste originaire de Nedroma, est avant tout une histoire personnelle. Né quelque part est avant tout l'histoire de Farid, un étudiant en droit de 26 ans, (joué par un comédien qui a du talent et de l'avenir, Tewfik Jallab), qui suite au malaise de son père, doit se rendre en Algérie pour sauver la maison paternelle. Avant de débarquer malgré lui dans un pays qui n'a jamais visité (même pas en vacances), il est soumis à un test linguistique rigoureux pour parler arabe. Une scène qui démontre l'absence de revendication identitaire et une intégration presque totale dans la société française. Sa liaison avec Audrey, cachée à sa mère, le confirme encore. C'est un Algérien bien intégré en France qui va débarquer en Algérie et qui ne maîtrise ni la langue ni les coutumes. Une Algérie presque inconnue pour lui et qu'il va apprendre à découvrir en atterrissant dans son village où il va être accueilli comme...un espoir!!!!. Un village autour duquel gravite une galerie de personnages aussi attachants et rigolos: Il y a bien sûr le cousin roublard, joué par le comédien et producteur Jamel Debbouze et qui interprète là son premier rôle de méchant sympathique. Abdelkader Secteur qui joue son premier rôle et qui met même en scène le café, véritable laboratoire de fabrication de blagues. Mais dans ce film sobre et modeste, il y a des personnages secrets et attachants, comme Mohamed Majd, un grand acteur marocain, qui joue le père de Farid dans le film et qui a été le héros de plusieurs longs métrages et même courts métrages en France. Une grosse perte pour le cinéma marocain et le cinéma de l'immigration, puisque l'acteur est mort, il y a quelque mois. Hamidi a composé ses comédiens avec justesse, chacun à un rôle bien précis et même si le film a été tourné au Maroc avec des comédiens pour la majorité d'origine marocaine, il a insisté pour que le langage algérien domine le film. Le cinéaste a même repeint pour les besoins du film, les maisons en jaune et blanc, car les maisons marocaines sont rouges. Et malgré la durée courte du film, le cinéaste algérien qui est à sa première oeuvre, a tenu à parler de tous les sujets d'actualité: trafic de papier, les harraga, le trafic d'essence à la frontière marocaine, expropriation des terres pour des projets gaziers, l'héritage historique avec la France entre autres le problème épineux de visa. Surtout quand on mixe visa et repentance avec cette réplique comique très politisée: «La France, n'a qu'un regret à nous envoyer, c'est le «regret» sur les lettres de refus de visa». D'ailleurs, Farid qui pensait être un Français intégré, découvre (quand il se fait voler par son cousin son passeport), sa véritable place d'Arabe au consulat français. Dans le dernier quart d'heure le film de Hamidi passe d'un drame personnel d'un Algérien qui veut récupérer la maison de son père en se rebellant contre l'administration à un fait divers sur le système de l'immigration clandestine organisée. Le réalisateur a voulu dénoncer, à travers la scène de Nordine, l'informaticien et confident de Farid, qui a refusé de quitter le pays clandestinement, le danger de Né quelque part, a réussi à éclaircir les points de vues et à ôter les préjugés sur un pays à la fois aimé et refusé. Et ce film qui parle de l'Algérie au coeur, est financé par la France et a été tourné au Maroc. Né quelque part, a été filmé ailleurs, mais sa véritable place devrait être à Alger, devant son public. C'est tout ce que souhaite Mohamed Hamidi et Djamel Debbouze, qui ont imposé ce sujet algérien à Cannes et qui ont ramené le soleil sur la Croisette après un début de festival très pluvieux.