L'ex-rédacteur en chef de l'agence Gamma enquêtait sur les GIA et l'assassinat des moines de Tibehirine. Le décès du journaliste indépendant, Didier Contant (43 ans) a remis à la surface l'épineux dossier de l'assassinat des moines trappistes de Tibehirine en mars 1996. Ancien rédacteur en chef de la grande agence Gamma, il a été retrouvé mort dans la nuit du dimanche à lundi dans la cour d'un immeuble parisien d'une de ses amies. Selon le journal France Soir, citant une source proche de l'enquête, la police privilégie l'hypothèse du suicide. Mais les sujets auxquels le reporter s'est intéressé ces dernières années laissent planer des doutes. Cette mort intervient, par ailleurs, quelques jours seulement après l'ouverture, par le parquet de Paris, le 10 février, d'une information pour «enlèvements, séquestrations et assassinats en relation avec une entreprise terroriste.» En 2002, Didier Contant avait choisi de quitter son agence pour devenir journaliste indépendant. Curieux de tout, il s'est particulièrement intéressé à l'Algérie. Il a consacré plusieurs reportages aux GIA et à l'enlèvement des moines de Tibehirine. Il a effectué tout récemment un voyage en Algérie où il aurait rencontré un homme enlevé en même temps que les sept moines. Celui-ci aurait réussi à semer ses ravisseurs en compagnie de deux autres personnes qui n'ont pas eu sa chance. Rattrapées, elles ont été abattues. Selon le témoignage de l'un de ses anciens collègues, rapporté par France Soir, Didier Contant est convaincu de «l'innocence» des services algériens, accusés d'être derrière cette affaire, notamment par d'anciens éléments du DRS (Département de renseignement et de sécurité) Abdelkader Tighra, actuellement détenu aux Pays-Bas, le capitaine Abderrahmane Chouchène et, plus récemment, le colonel Mohamed Samraoui dans son livre Chronique des années de sang. Ainsi, selon le témoin rescapé, le rapt des moines est bien l'oeuvre des islamistes. L'accusation selon laquelle le chef terroriste Djamel Zitouni roulait pour les militaires s'effondrerait alors. Le journaliste se serait-il suicidé ou l'a-t-on éliminé? Didier Contant avait confié à des amis qu'il avait «l'impression d'avoir mis les pieds dans une histoire (qu'il) ne maîtrisait pas.» Ce qui suffit pour jeter le trouble. Patrick Baudoin, l'avocat de la Fidh (Fédération internationale des droits de l'homme) qu'il avait un temps présidée, et qui s'était illustrée pour sa virulence contre le système algérien, reste prudent. «C'est difficile de savoir ce qui s'est réellement passé», avoue-t-il. Les deux hommes se sont rencontrés deux fois, mais ne sont pas «intimes». «Il faisait partie de ces personnes réservées sur l'implication des services algériens dans l'affaire des moines. Il était conforté dans son idée par les récents contacts qu'il avait eus en Algérie», déclare Patrick Baudoin à qui le journaliste avait fait état de ses interrogations avant la parution de son enquête dans le supplément Figaro magazine, en décembre 2003. L'avocat de la Fidh laisse transparaître cependant quelques doutes. «Je ne vous cache pas qu'on peut s'interroger. Le décès de Contant m'a interpellé. La police fera certainement une enquête.» L'affaire de l'assassinat des sept moines n'est pas près d'être close. De notre Bureau à Paris