Un projet du même genre a été annoncé il y a une dizaine d'années, mais il n'a jamais vu le jour. Les fetwas (décret religieux) anarchiques ont envahi l'Algérie. Du Moyen-Orient, du Maghreb ou même de l'intérieur du pays, n'importe quel prêcheur lance ce genre de fetwas «informelles», qui sont un véritable danger pour la communauté. Les réseaux sociaux et les chaînes satellitaires ont accru ce genre de décret religieux sans fondement. Tout le monde devient un mufti, chacun écrit ce qu'il veut. Les citoyens ne savent plus où donner de la tête. Chacun suit son «prédicateur», et on se retrouve au final avec une anarchie religieuse! L'Etat a enfin décidé de réagir à ce danger rampant. Il va créer une institution de la fetwa. C'est l'annonce faite jeudi à Alger par le ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, Bouabdallah Ghlamallah, qui a indiqué que son département ministériel avait proposé officiellement la création d'une institution de la fetwa. «Le projet qui attend sa concrétisation», a précisé M.Ghlamallah qui répondait à une question d'un membre du Conseil de la nation relative à la problématique «des fetwas parallèles en l'absence d'un institution officielle de la fetwa», lors d'une séance plénière, présidée par Abdelkader Bensalah, président du Conseil de la nation. Lors de son intervention, le ministre des Affaires religieuses a expliqué le système de fetwa actuelle du pays. «Il est basé sur l'institution de la mosquée, soutenue actuellement par les directeurs des affaires religieuses et des wakfs de chaque wilaya», a-t-il indiqué. Les conseils de wilaya composés d'une élite d'imams, d'universitaires et d'érudits sont représentés au niveau du ministère de tutelle. Ce qui permet l'émission régulière de fetwas à travers les permanences de la commission au niveau des institutions des mosquées de chaque wilaya et sur le site électronique du ministère afin de répondre aux questions des personnes physiques et morales. Ces conseils sont présents au niveau de toutes les stations locales et centrales de radio et dans la grille des programmes télévisuels. «Les responsables religieux en charge de la fetwa tiennent des réunions périodiques nationales au profit des conseils scientifiques de wilaya. Celles-ci sont élargies aux imams, aux universitaires, aux érudits et aux personnes intervenant dans les médias, afin d'examiner les questions d'intérêt national et de s'accorder sur les fetwas locales difficiles à traiter», a-t-il rappelé. Néanmoins, le ministre a reconnu les dangers de ces fetwas au «noir» en soulignant les «effets destructeurs de l'activité parallèle qui gangrène la société et détruit les fondements de l'Etat». «Ceux qui prononcent des fetwas controversées sont des personnes indépendantes des institutions officielles de la fetwa et leurs acolytes appartiennent à des institutions parallèles», a-t-il ajouté avec lucidité. Mais si le ministre est conscient des dangers de ce phénomène de société, pourquoi l'Etat a laissé le terrain vierge tous ce temps, surtout dans un pays où le radicalisme religieux a mené vers une guerre civile? Les «radicaux» n'aiment pas le vide, et ils le remplissent avec leurs Fetwas anarchiques. Où est le projet du grand mufti d'Algérie, annoncé en 2003? Annoncé en grande pompe par le Conseil du gouvernement d'alors et créé en vertu d'un décret présidentiel, ce projet appelé Dar el-ifta' - Maison des fetwas, devait être «la référence officielle en matière de fetwas». Mais il n'a jamais vu le jour. Dix ans après, Ghlamallah dépoussière ce projet. Espérerons qu'il n'aura pas besoin d'une fetwa, pour enfin le concrétiser...