Pas de confusion. La destitution du président Morsi ne signifie pas un recul de l'Islam et encore moins son échec en Egypte. C'est le candidat des Frères musulmans qui après une année à la tête de l'Etat, a échoué. C'est le programme politique appliqué par Morsi qui est en cause. En effet, beaucoup ont tendance à confondre l'Islam et l'islamisme politique. C'est cette confusion qui a fait perdre les Frères musulmans en Egypte. S'ils revendiquent la légitimité tirée des urnes, ils oublient cependant qu'une telle légitimité est le fondement même de toute démocratie. Laquelle démocratie se décline par le respect des libertés. individuelles et collectives. Dans le cas de l'Egypte, Morsi n'a pas tenu compte des 38 millions d'Egyptiens qui n'ont pas voté pour lui. Ceux qui avaient voté pour Ahmed Chafik et ceux, deux fois plus nombreux, qui s'étaient abstenus. Il a commis l'erreur de croire qu'un vote démocratique pouvait lui permettre de gouverner seulement par et pour les 13 millions d'Egyptiens, seulement, qui avaient porté leur choix sur sa candidature au deuxième tour. En réalité, les voix des Frères musulmans ont été moins de 6 millions au premier tour. Au second tour, Morsi a bénéficié d'un report de 7 millions de voix. Une force plus importante que les 6 millions du premier tour. C'est l'erreur qu'ont tendance à commettre tous les partis islamiques de par le monde. Accepter les règles de la démocratie pour accéder au pouvoir et mieux «l'enterrer» par la suite. C'est ce qu'a essayé de faire Morsi en imposant son islamisme accepté par 6 millions d'électeurs en ignorant totalement les aspirations de 44 millions d'Egyptiens. Cette énorme erreur d'appréciation de la part de Morsi ne peut être due qu'au fait qu'il n'était pas bien préparé aux hautes charges de l'Etat. Le véritable candidat des Frères musulmans avait été Khairat al-Chater. Cependant, et pour d'anciennes condamnations à la prison, sa candidature a été invalidée. C'est ainsi que les Frères musulmans ont dû le remplacer par Morsi. En tout état de cause, si l'Islam est compatible avec la démocratie, comme l'a si bien rappelé le président français à Tunis, l'islamisme politique en revanche ne l'est pas. La différence est de taille. Dans un Etat démocratique, toutes les sensibilités, quelles soient religieuses ou politiques, ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. Dans le respect et la tolérance. Un pays, même avec une majorité musulmane, pour être démocratique doit défendre les droits des minorités. C'est le cas en Occident à forte majorité chrétienne. Par contre, un Etat islamique signifie aujourd'hui la marginalisation de toutes les pratiques religieuses. De plus, la liberté individuelle y est exclue. En ne se remettant pas en cause pour s'adapter aux réalités du troisième millénaire, les islamistes «nagent» à contre-courant. Ils ne contribuent pas à la renaissance de la civilisation musulmane, au contraire. Le cas de l'Egypte devrait faire réfléchir. Celui de la Turquie aussi. Le totalitarisme n'a plus sa place dans le monde. Qu'il soit religieux ou, comme en Europe de l'Est avant 1989, idéologique. La révolution industrielle d'abord et celle du numérique et des technologies nouvelles que nous vivons, ont modifié les notions de temps et de l'espace. L'information traverse la planète de bout en bout à la vitesse de la lumière. Les frontières n'offrent plus qu'une protection toute relative. A notre époque, le pragmatisme est la seule forme de gouvernance durable. Si les islamistes ne le comprennent pas, ils ne feront que servir les intérêts des ennemis de l'Islam. La démocratie, bien comprise, est le meilleur système politique qui permettra la renaissance de la civilisation musulmane. Pas seulement le temps d'accéder au pouvoir. Mais pour une bonne et durable gouvernance!