Le secrétaire d'Etat adjoint américain, William Burns, est venu en éclaireur s'enquérir sur l'état des lieux en Egypte L'Egypte est depuis des décennies un allié-clé au Proche-Orient pour les Etats-Unis qui apportent à l'armée égyptienne une aide annuelle de 1,3 milliard de dollars sur 1,5 milliard d'assistance au total. Un haut responsable américain devait avoir hier des entretiens avec les nouvelles autorités au Caire, où les Frères musulmans partisans du président déchu Mohamed Morsi et leurs adversaires ont appelé une nouvelle fois leurs troupes à descendre dans la rue. La visite du secrétaire d'Etat adjoint Bill Burns est la première de la part d'un officiel américain de ce rang depuis le renversement de M.Morsi, le 3 juillet par l'armée, après des manifestations monstres réclamant son départ. Elle survient dans un climat délicat entre les deux pays. L'Egypte est depuis des décennies un allié-clé au Proche-Orient pour les Etats-Unis, qui apportent à l'armée égyptienne une aide annuelle de 1,3 milliard de dollars, sur 1,5 milliard d'assistance au total. Washington s'est jusqu'à présent abstenu de parler de «coup d'Etat» après la déposition de M.Morsi, ce qui entraînerait une suspension automatique de cette aide. Deux influents sénateurs républicains, John McCain et Lindsey Graham, ont toutefois pressé l'administration de Barack Obama de couper l'assistance américaine. Washington a par ailleurs demandé que M.Morsi, actuellement détenu par l'armée, soit remis en liberté, une demande qui n'a pas trouvé d'écho au Caire, où une grande partie des manifestants et de la presse hostiles à l'ancien président accuse les Etats-Unis d'avoir fait preuve de bienveillance envers le président déchu quant il était en place. Le nouveau pouvoir a assuré que l'ex-chef de l'Etat se trouvait «en lieu sûr» et était «traité dignement», mais il n'est pas apparu en public depuis son arrestation. M.Burns «rencontrera des responsables du gouvernement par intérim ainsi que des responsables de la société civile et des entreprises», a indiqué le département d'Etat dans un communiqué. «Dans toutes ces rencontres, il soulignera le soutien des Etats-Unis aux Egyptiens, pour la fin des violences et pour une transition qui conduise à un gouvernement civil ouvert et démocratiquement élu», précise le texte. Les partisans de M.Morsi, qui dénoncent un «coup d'Etat militaire» contre le premier président démocratiquement élu, ont appelé dans la journée à de nouveaux grands rassemblements, notamment aux abords de la mosquée Rabaa al-Adawiya, dans le faubourg de Nasr City, où ils campent depuis maintenant deux semaines. Une marche est annoncée vers le siège de la Garde républicaine, situé à proximité, devant lequel 53 personnes, principalement des manifestants pro-Morsi, ont été tuées il y a une semaine. Les islamistes veulent continuer de manifester «pacifiquement», a assuré un porte-parole des Frères, Ahmed Aref. «Nous avons une cause juste pour laquelle nous sommes prêts à nous sacrifier», a-t-il dit. Les anti-Morsi, qui lui reprochent d'avoir gouverné au seul profit des Frères musulmans dont il est issu et de laisser le pays dans une situation économique catastrophique, comptent eux rassembler leurs troupes place Tahrir, dans le centre ville. En raison du jeûne du Ramadhan jusqu'au coucher du soleil et des températures estivales, le plus gros des rassemblements est attendu en fin de journée. Par ailleurs, au moins trois personnes ont été tuées et 17 blessées hier matin dans l'attaque par des hommes armés, d'un bus transportant des ouvriers d'une cimenterie à El-Arich, dans le nord de la péninsule du Sinaï, où les troubles récurrents se sont intensifiés depuis deux semaines. L'ex-chef de l'Etat, ainsi que d'autres membres des Frères musulmans, ont été interrogés dimanche sur les circonstances de leur évasion de la prison de Wadi Natroun (au nord-ouest du Caire) durant la révolte contre Hosni Moubarak début 2011. Le procureur général a en outre ordonné le gel des avoirs de 14 hauts responsables islamistes, parmi lesquels le Guide suprême Mohamed Badie et huit autres dirigeants des Frères musulmans. «Les tenants d'une ligne dure qui ont dirigé les Frères musulmans ces dernières années ont intérêt à une confrontation radicale, de même que les faucons des services de sécurité», estime Ezzedine Choukry-Fishere, de l'Université américaine du Caire. «Mais si le régime s'ouvre et leur tend la perche, il est probable que des islamistes modérés comprendront l'intérêt d'une participation au processus politique», ajoute-t-il. Dans ce contexte, le Premier ministre Hazem Beblawi, qui n'a pas exclu d'intégrer des Frères musulmans dans son cabinet, poursuit ses tractations pour constituer un gouvernement. Le prix Nobel de la Paix Mohamed El Baradei a prêté serment dimanche comme vice-président chargé des relations internationales, et l'ancien ambassadeur à Washington, Nabil Fahmy, a dit avoir accepté le poste de ministre des Affaires étrangères. Ahmed Galal, un ancien de la Banque mondiale (BM), va devenir ministre des Finances. La composition du gouvernement pourrait être connue aujourd'hui ou mercredi.