Les appels à la formation d'un nouveau gouvernement en Tunisie se sont multipliés mardi après la mort de huit militaires dans une attaque imputée à des «terroristes» qui a aggravé la crise provoquée par l'assassinat d'un député d'opposition. Le puissant syndicat Ugtt, l'organisation patronale Utica, le parti laïque de centre-gauche Ettakatol allié aux islamistes au pouvoir, le ministre de l'Intérieur Lotfi Ben Jeddou et la Ligue tunisienne des droits de l'Homme ont tous appelé à la démission du gouvernement dirigé par Ali Larayedh au lendemain d'un discours dans lequel il rejetait cette éventualité. Aucune de ces organisations et personnalités n'a cependant fixé d'ultimatum et elles ne semblaient pas d'accord sur la nature du cabinet devant être formé, certains réclamant un gouvernement «de compétence restreinte» et d'autres voulant une équipe «d'union nationale» intégrant les partis politiques. M.Ben Jeddou, un indépendant en place depuis mars, a aussi dit avoir «envisagé de démissionner» et appelé tous les partis à «dépasser leurs égoïsmes pour relever les défis et combattre le terrorisme». Ces positions s'ajoutent à celles d'une soixantaine de députés de divers partis d'opposition et d'un front d'extrême gauche appelant à la démission du gouvernement mais aussi à la dissolution de l'Assemblée nationale constituante (ANC) qui depuis son élection en octobre 2011 n'est pas parvenue à achever la rédaction de la Constitution. Le Premier ministre n'avait pas réagi à ces appels en début d'après-midi d'hier, alors que la veille il avait exclu de démissionner mais promis, pour sortir de la crise provoquée par l'assassinat jeudi du député d'opposition Mohamed Brahmi, des élections le 17 décembre prochain. Son discours était cependant intervenu tout juste avant que huit militaires tunisiens soient sauvagement tués au mont Chaâmbi, zone montagneuse dans l'ouest du pays, à la frontière algérienne, où un groupe armé lié à Al Qaîda est pourchassé sans succès depuis décembre. La Tunisie observe depuis mardi un deuil national de trois jours après l'assassinat de 10 militaires par les terroristes. Il s'agit de l'attaque la plus meurtrière attribuée à la nébuleuse jihadiste depuis la révolution de janvier 2011. Elle est intervenue en pleine crise politique provoquée par l'assassinat d'un député d'opposition la semaine dernière, un crime commis par la mouvance salafiste. Le président Moncef Marzouki a rendu hommage en fin de matinée aux militaires dont les dépouilles étaient enveloppées dans le drapeau tunisien lors d'une cérémonie à Kasserine, ville voisine du mont Chaâmbi. L'embuscade a déclenché lundi soir des manifestations de colère à Kasserine où un local du parti islamiste au pouvoir Ennahda a été saccagé. Un nouvel appel à manifester a été lancé pour 21h00 hier, (20h00 GMT) après la rupture du jeûne du Ramadhan.