Les choses sérieuses commencent Les mandats d'arrêt lancés à l'encontre des neuf accusés ont pris effet depuis deux semaines, a précisé le procureur qui a tenu à souligner que les mis en cause sont accusés de corruption, blanchiment d'argent, trafic d'influence... C'est officiel. La justice algérienne emboîte le pas à la justice italienne, quelques jours seulement après le lancement par le parquet de Milan d'un mandat d'arrêt international contre Farid Bedjaoui, neveu de l'ancien ministre des Affaires étrangères Mohamed Bedjaoui. En effet, le juge d'instruction en charge de l'affaire Sonatrach 2 a lancé des mandats d'arrêt internationaux à l'encontre de neuf personnes parmi les 22 impliquées dans l'affaire Sonatrach 2, dont l'ancien ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, sa femme, ses deux fils et Farid Bedjaoui. Quatre autres intermédiaires du secteur privé sont également concernés par la mesure annoncée par le parquet. C'est ce qu'a annoncé, hier, lors d'un point de presse tenu au siège de la cour d'Alger, le procureur général de cette instance judiciaire, Belkacem Zeghmati. Les mandats d'arrêt lancés à l'encontre des neuf accusés ont pris effet depuis deux semaines, a précisé le procureur, qui a tenu à souligner que les mis en cause sont accusés de corruption, blanchiment d'argent, trafic d'influence...Côté procédure, le conférencier a indiqué que Chakib Khelil a été destinataire, il y a deux mois, d'une convocation en son domicile conformément à la loi en vigueur. Ce dernier a répondu par une lettre manuscrite au procureur, afin de l'informer qu'il est malade, tout en joignant une copie d'un certificat médical. Passé le délai de deux mois, le juge d'instruction décide de lancer un mandat d'arrêt international contre Khelil et sa famille. Au sujet de la double nationalité de l'ex-ministre de l'Energie, le procureur général a souligné que ce dernier est Algérien et que rien n'empêche son arrestation dans tous les pays du monde, même s'il a une nationalité américaine. A noter qu'en Italie, le parquet de Milan a lancé, il y a moins d'une semaine, un mandat d'arrêt international à l'encontre de Farid Bedjaoui, poursuivi dans la même affaire, qui concerne dans la péninsule italienne le groupe Saipem, accusé d'avoir versé des pots-de-vin entre 2007 et 2009 pour «l'obtention de sept contrats en Algérie d'une valeur globale de 8 milliards d'euros», selon la presse italienne. Les montants des pots-de-vin sont estimés, selon la procédure judiciaire italienne, à 197 millions de dollars, et versés en commissions à la Pearl Partners Limited, domiciliée à Hong Kong et propriété de Farid Bedjaoui, selon les comptes-rendus de la presse italienne. Sur un autre chapitre, Belkacem Zeghmati a souligné que «le dossier de Sonatrach 2, n'est autre que le prolongement du dossier Sonatrach 1, d'où la complexité de l'affaire qui a nécessité beaucoup de temps avant d'arriver aux premiers éléments de l'enquête qui a été enclenchée depuis». Le procureur a, par ailleurs, révélé qu'une somme globale de 20 millions de dollars et 175 millions d'euros a été transférée illégalement à l'étranger. «Les biens et les avoirs de l'ensemble des mis en cause ont été saisis et gelés, aussi bien en Algérie, qu'à l'étranger», souligne Zeghmati. S'agissant du préjudice financier causé à Sonatrach, le conférencier a affirmé que l'enquête suit son cours, tout en affirmant que le montant des biens et avoirs des mis en cause s'élève à des milliards de dollars et d'euros, placés à l'étranger, notamment en Europe. Les pots-de-vin sont versés aux membres de leurs familles et proches qui sont impliqués dans ces dossiers, indique le procureur qui a tenu à insister sur la complexité des procédures bancaires qui ont été mises en place par le réseau. Les mis en cause activent, selon le procureur, dans le cadre d'un réseau de corruption international qui s'étend à plusieurs pays dont les USA, Singapour, les pays du Golfe... Dans ce contexte, le conférencier a souligné que les Cours d'assises de la Suisse, de France et d'Italie, se sont montrées très coopératives à toutes les demandes de l'Algérie, en termes de rapatriement des fonds et des biens du groupe se trouvant à l'étranger. La cour d'Alger a démenti catégoriquement les informations qui font allégation à son enquête judiciaire qui vient chaque fois, après les informations qui parviennent de l'Italie. «La justice algérienne fait son travail doucement, mais sûrement et sans faire trop de bruit en raison de la complexité de l'affaire», a affirmé le procureur général. Une chose est sûre, l'émission de mandats d'arrêt internationaux contre Chakib Khelil, sa famille et Farid Bedjaoui, répond à une volonté politique de faire de la lutte contre la corruption une des priorités de l'Etat algérien. Dans son message à l'occasion de la célébration du double anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures et de la Fête des travailleurs, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, avait affirmé qu'il n'allait pas «passer sous silence» les scandales récemment relevés par la presse et qui touchent la gestion de Sonatrach. «Ces informations soulèvent notre révolte et réprobation, mais je fais confiance à la justice de notre pays pour tirer au clair l'écheveau de ces informations pour situer les responsabilités et appliquer avec rigueur et fermeté les sanctions prévues par notre législation», a-t-il affirmé.