La presse tunisienne se montrait dubitative hier à la veille du lancement d'un «dialogue national» entre la coalition au pouvoir dirigée par les islamistes d'Ennahda et l'opposition pour sortir de la crise déclenchée après l'assassinat d'un opposant en juillet. Le lancement solennel de ce dialogue est prévu aujourd'hui au Palais des Congrès de Tunis en présence du président Moncef Marzouki, du Premier ministre Ali Larayedh et du président de l'Assemblée nationale constituante (ANC) Mustapha Ben Jaafar. A cette occasion et conformément à la feuille de route rédigée par les médiateurs de la crise, le gouvernement dirigé par Ennahda doit s'engager à démissionner une fois un consensus trouvé sur la composition d'un cabinet d'indépendants, a indiqué l'un de ces médiateurs, le syndicat Ugtt. Les pourparlers reprendront ensuite lundi matin. M.Larayedh devait recevoir par ailleurs hier après-midi les quatre médiateurs - l'Ugtt, le patronat Utica, la Ligue tunisienne des droits de l'Homme et l'Ordre des avocats - puis présider un conseil des ministres «extraordinaire» consacré au dialogue national. «Les Tunisiens sont aujourd'hui suspendus aux lèvres des acteurs politiques, protagonistes du dialogue national (...) ce dialogue aboutira-t-il à une solution salvatrice?», s'interroge le journal francophone Le Quotidien. «On a bien l'impression d'assister à un feuilleton mexicain mais sans l'eau de rose», moque le journal après deux mois de péripéties politiques et de bras de fer entre pouvoir et opposition sur une éventuelle démission du gouvernement. Le dialogue national «représente le dernier espoir pour sortir de cette impasse», écrit de son côté le quotidien arabophone Le Maghreb qui appelle les politiques «à travailler en laissant de côté leurs intérêts partisans étroits pour hisser haut le drapeau de la nation». «Enfin, ils se sont mis d'accord pour être d'accord» sur la tenue de négociations, titre ironiquement en Une le quotidien arabophone Achourouk. L'opposition comme les islamistes disent avoir accepté une feuille de route préparée par l'Ugtt, le patronat Utica, la Ligue tunisienne des droits de l'Homme et l'Ordre des avocats pour sortir de la crise politique provoquée par l'assassinat le 25 juillet du député Mohamed Brahmi. Selon ce document, la formation du nouveau gouvernement doit être négociée en trois semaines. Parallèlement, les acteurs politiques devront se mettre d'accord pour que l'ANC approuve dans un délai d'un mois une loi et une commission électorale, fixe le calendrier des scrutins à venir et adopte la Constitution dont l'élaboration est en panne. L'ensemble de ces questions font l'objet de profondes dissensions entre partisans et détracteurs des islamistes, empêchant la mise en place d'institutions stables plus de deux ans et demi après la révolution de 2011 et près de deux ans après l'élection de l'ANC.