Il a été interpellé mercredi soir dans un «état semi-conscient» après une prise de médicaments qui ressemble à une tentative de suicide. L'auteur présumé de coups de fusil à pompe à Paris dans le hall du quotidien Libération, blessant grièvement un assistant photographe, Abdelhakim Dekhar, a été arrêté dans la nuit de mercredi à jeudi derniers. Il a été interpellé mercredi soir dans un «état semi-conscient» après une prise de médicaments qui ressemble à une tentative de suicide, comme l'a pensé le ministre français de l'Intérieur, Manuel Valls. Son arrestation, à Bois-Colombes, au nord-ouest de Paris, met fin à une traque qui a mobilisé toutes les forces de police de Paris et ses environs. Né dans l'est de la France dans une famille algérienne de 13 enfants, et possédant la double nationalité, Dekhar avait été impliqué dans une affaire retentissante des 30 dernières années. Surnommé Toumi à l'époque, il avait été condamné à quatre ans de prison pour avoir acheté le fusil à pompe ayant servi à l'équipée sanglante du couple Florence Rey-Audry Maupin, qui avait fait cinq morts, dont trois policiers, le 4 octobre 1994 à Paris. Son empreinte ADN correspondait à celle du tireur qui a semé lundi la terreur, avant d'ouvrir le feu dans un quartier d'affaires et de brièvement prendre un automobiliste en otage. Il s'était, quelques jours plus tôt, introduit armé au siège de la chaîne d'informations télévisées en continu BFM TV. Dekhar a été placé en garde à vue pour tentative d'assassinat, enlèvement et séquestration, a annoncé le procureur de Paris, François Molins. Sa garde à vue qui ne peut durer en tout que 48 heures a été prolongée jeudi d'un jour. Condamné en 1998 à quatre ans de prison, Dekhar est bien l' «auteur unique» de l'équipée sanglante à Paris et en banlieue parisienne selon le magistrat. Il a été dénoncé par un homme qui l'hébergeait depuis juillet. Le procureur de Paris a précisé que les deux hommes s'étaient rencontrés à Londres il y a 13 ans où Dekhar vivait régulièrement. Cheveux courts et lunettes à la Malcolm X, il était, au début des années 1990, un habitué des squats fréquentés par les groupuscules anarchistes et d'extrême gauche, souvent sous étroite surveillance policière. Au procès, il avait vainement tenté de persuader la cour qu'il était «un agent de la Sûreté militaire algérienne, chargé d'infiltrer les milieux autonomes pour en débusquer d'éventuels intégristes.» Condamné exactement à la durée de sa détention provisoire, il avait été libéré dans la foulée. Selon une source proche de l'enquête, Dekhar, regrettant sans doute son acte, aurait confié à la personne qui l'hébergeait, rentrée de voyage le jour de l'attaque à Libération: «J'ai fait une connerie.» Dans des lettres retrouvées par la police, le suspect a évoqué un «complot fasciste» et dénoncé les méfaits du «capitalisme» et la «manipulation des masses par les médias», a annoncé le procureur de Paris, sans toutefois conclure qu'il s'agissait là des mobiles de ses actes. Dans une de ces lettres, il évoque les conflits du Monde arabe, selon une source proche du dossier, tandis qu'une autre source mentionne des écrits «confus». Le jeune assistant photographe qu'il a blessé au thorax et à l'abdomen à Libération «va bien», selon le directeur du journal, Nicolas Demorand.