Toutes les initiatives tendant à unifier la mouvance démocratique ont échoué. Le raz-de-marée opéré par Abdelaziz Bouteflika, dès le premier tour de l'élection présidentielle de jeudi dernier, appelle à une série d'enseignements. Tout d'abord, la réduction à néant de l'opposition politique, toutes tendances confondues, et dont le score ne dépasse pas les 17%, est révélateur du malaise qui ronge ces appareils politiques. D'ailleurs, toutes les initiatives tendant à unifier la mouvance démocratique ont échoué en raison des tentatives des uns et des autres à réclamer la paternité de l'initiative. Du MPR (Mouvement pour la République) aux états généraux des démocrates, les tentatives de fédérer les partis démocrates ont été un cuisant échec, ces derniers n'arrivant même pas à s'entendre sur l'essentiel, à savoir, les principes fondateurs de la République. Réagissant au gré des conjonctures, par communiqués interposés, conférences de presse et autres déclarations publiques, ces partis n'arrivent désormais, pas à s'imposer sur la scène politique. Scindés tantôt en «éradicateurs» et «réconciliateurs», et tantôt en «conservateurs» et «réformateurs» les démocrates sont à court de repères, et pire encore, en déphasage avec les préoccupations majeures des citoyens. Idem pour les formations islamistes qui n'arrivent pas à s'unir autour de leur projet «historique» d'Etat islamique qui semble être renvoyé aux calendes grecques sur l'autel d'une stratégie participationniste au pouvoir. C'est cet atout (l'atomisation de l'opposition politique, Ndlr) et surtout sa passivité et son manque de réalisme qui ont favorisé la fulgurante ascension de Bouteflika. Ce dernier a su, non seulement tirer profit des faiblesses de ces partis politiques, mais surtout a fait siennes certaines de leurs principales revendications, leur coupant ainsi l'herbe sous le pied. Par ailleurs, l'action de proximité, menée par le président candidat dans l'Algérie profonde lui a valu un capital sympathie auprès des populations, dont la plupart n'ont pas reçu la visite d'un responsable depuis des années. Les dizaines de milliards distribuées à tour de bras au cours de ses tournées entrent en réalité dans le cadre des programmes de développement complémentaires initiés à l'époque où le chef de gouvernement n'était autre que M.Ali Benflis. Par ailleurs l'incohérence dans les déclarations de certains partis politiques, leur langage, parfois injurieux, à l'égard des autorités ne semblent pas faire recette auprès de la population car, pour cette dernière, l'urgence réside dans la prise en charge de ses préoccupations prioritaires, notamment, le logement, l'emploi, la santé..., des domaines sur lesquels les cinq adversaires de Bouteflika ne s'étaient pas assez penchés lors de la campagne électorale. Ce, à l'inverse de Bouteflika qui avait des arguments concrets, en étalant les chiffres de son mandat et en annonçant de nouveaux projets à réaliser s'il venait à être réinvesti à la magistrature suprême. Des données palpables précédées par une cascade d'inaugurations annoncées en grande pompe par les médias publics. Aussi le président de la République qui a fait l'objet d'attaques acerbes au cours de son premier mandat, aura suscité une certaine compassion auprès du peuple, qui par nature n'aime pas «la hogra». Il est donc clair que l'émergence d'une classe politique véritable, répondant aux aspirations des citoyens et développant un discours sain, loin de toute invective est à même de créer une dynamique susceptible d'instaurer de nouvelles moeurs politiques. Le score obtenu par Bouteflika en Kabylie, une région réputée pour son hostilité au pouvoir central atteste de l'échec des partis politiques traditionnellement ancrés dans la région. Ce sont tous ces facteurs qui ont fait que la majorité des Algériens ont opté pour un vote refuge plus rassurant. La mise à niveau de la scène politique reste donc la condition sine qua non pour l'émergence d'une nouvelle opposition démocratique crédible, respectueuse de l'éthique et une force de changement jouissant d'un large soutien populaire.