Demain, les chefs des diplomaties russe et américaine, Sergueï Lavrov et John Kerry, vont (à nouveau) discuter de la participation de l'Iran à la conférence internationale sur la Syrie dite «Genève 2». Discuter? Une invitation de l'Iran, puissance régionale incontournable, devait-elle faire l'objet d'un «feuilleton» aussi méchant qu'absurde? Or, la présence de ce pays est en fait la plus avérée de tous ceux invités à assister à des travaux supposés aider à trouver une issue à la guerre qui meurtrit le peuple syrien depuis 2011. Dans la perspective de la tenue de la conférence sur la Syrie qui s'ouvre à Montreux (Suisse) le 22 janvier prochain, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a envoyé des invitations à une trentaine de pays pour assister à cette réunion. L'Iran ne figure pas sur cette liste. Les Nations unies n'ont pas précisé les critères qui ont participé au choix des pays conviés, mais l'on sait déjà qu'outre la Russie et les Etats-Unis - parrains de ladite «Genève 2» - seront présents l'Arabie Saoudite, la Turquie et le Qatar notamment. Ces trois pays ont clamé haut et fort leur soutien à la rébellion et ont d'une manière ou d'une autre apporté aides, conseils, finances, voire formation, aux rebelles, mercenaires et jihadistes (ils sont plus de 100.000) qui se battent en Syrie. Sur la trentaine de pays ainsi appelés en Suisse nombreux n'ont aucun lien ni de près, ni de loin avec la guerre que subit la Syrie depuis près de trois ans. Ainsi, curieusement, le Danemark et les pays scandinaves seront à Genève, ou plus singulièrement la présence de l'Indonésie, de l'Inde, du Koweït, ou de l'Italie. Il paraît que c'est là une «récompense?» à des pays amis, quand l'Iran, directement concerné par les événements qui frappent la Syrie, serait absent et n'est pas le bienvenu. C'est ce qu'a décidé le gendarme international que sont les Etats-Unis selon lesquels l'Iran n'avait pas sa place à Montreux, sous le prétexte fallacieux que l'Iran...aide le régime de Damas. Les Américains cherchent-ils à instaurer la paix en Syrie, travaillent-ils effectivement pour l'obtenir ou veulent-ils, tout simplement, imposer un leadership adossé à la raison du plus fort? Cela après avoir échoué à imposer à la Syrie leurs «poulains», incapables de gagner la guerre sur le terrain? Ont-ils seulement tiré une leçon de l'Irak, revenue à la case zéro? Mais le problème ne semble pas uniquement là, mais bien dans la manière avec laquelle l'ONU s'est dessaisie de ses prérogatives de veiller à la paix dans le monde en usant de tous les moyens dont elle dispose pour ce faire, en particulier dans le cas de la Syrie, en essayant de trouver une issue au drame qui frappe ce pays depuis trois ans. En effet, à quoi peut servir une ONU incapable, ou mise dans l'incapacité, d'accomplir les missions qui justifient son existence? Comment peut-on comprendre la déclaration du secrétaire général de l'ONU qui «souhaite» inviter l'Iran quand il lui appartenait en tant que premier responsable de l'institution internationale et compte tenu de l'importance de ce pays sur l'échiquier régional, d'exiger sa présence à Genève? En fait, Ban «attend» le feu vert de Kerry et de Lavrov, qui se rencontrent demain à Genève. Ceux-ci «se rencontreront le 13 janvier et nous espérons fortement qu'ils se mettront d'accord sur la participation de l'Iran», indiquait lundi le porte-parole du secrétaire général de l'ONU. Comment des «décideurs» internationaux qui disent vouloir trouver une issue à la guerre en Syrie peuvent-ils se passer de la présence de l'un des acteurs de ce drame? Peut-il y avoir de résultat en l'absence de l'Iran ou du président syrien? Maintenant, que les Américains le veuillent ou non, l'Iran fait partie du problème syrien, donc de sa solution. Aussi, aucune conclusion ne peut être envisagée ou élaborée sans la participation de ce pays à la conférence de Genève. Washington avait aussi tenté à un moment de s'opposer à la participation du président syrien Bachar al-Assad. De fait, le président iranien, Hassan Rohani, a affirmé jeudi que la conférence de paix à venir sur la Syrie serait un échec si l'Iran n'y participait pas, selon des médias iraniens. Cela d'autant plus, qu'en dernier ressort, ce sont les parties syriennes, et elles seules, comme le relevait l'émissaire de l'ONU pour la Syrie, Lakhdar Brahimi, «(...) qui vont fixer la phase transitoire et la suite». Aussi, l'aide de tous, y compris celle de l'Iran, est plus qu'opportune, si effectivement on veut la paix pour le peuple syrien.