Depuis le 1er Novembre 1954, la France coloniale s'évertuait à présenter les moudjahidine comme de vulgaires brigands sans aucun lien avec la population...La grève des 8 jours a brisé cette propagande. Le meilleur témoignage de ce que fut ce moment de notre histoire nous est donné par Zohra Drif... Cette semaine nous commémorons le 57ème anniversaire de la grève des 8 jours. Le 28 janvier 1957, fut en effet le premier jour de cette grève qui «devait démontrer le soutien total du peuple à l'ONU où la «question algérienne» devait être débattue pour imposer pacifiquement le FLN comme notre unique et légitime représentant» témoigne Zohra Drif dans son livre «Mémoires d'une combattante de l'ALN-Zone Autonome d'Alger» paru il y a peu aux éditions Chihab. Durant huit jours les Algériens qui n'avaient droit qu'aux travaux pénibles (dockers, éboueurs, portefaix, etc) ou quelquefois petits commerçants, ont suivi le mot d'ordre de grève du FLN. De fait, leurs enfants non plus s'abstinrent de se rendre à l'école. Alger ville morte en ce début d'année, 26 mois exactement après le déclenchement du 1er Novembre 1954. Nous préférons nous effacer devant cette héroïne de la guerre de Libération nationale qui décrit, mieux que personne, ce que fut cet événement de notre histoire. Elle avait 23 ans à l'époque. Elle était universitaire parmi les rares étudiants algériens qui avaient été admis à la Faculté d'Alger, la seule de tout le pays en cette année-là. Pourtant, elle stoppa net le cours de sa vie et s'engagea dans la lutte armée. «Malgré le déchaînement de haine et la débauche de répression, malgré les articles triomphalistes de la presse colonialiste et les déclarations des spécialistes de l'action psychologique au service de Massu (général français qui régentait toute la capitale) et de son pouvoir, notre grève fut un succès total» écrit-elle. «La grève des 8 jours donna à notre guerre de Libération nationale l'écho international qui lui manquait; elle imposa notre organisation, le FLN, comme l'interlocuteur incontournable et unique, aussi bien pour l'ennemi que pour les autres nations et les organisations internationales comme l'ONU...La grève des 8 jours permit au monde entier de savoir. Savoir et ouvrir des yeux terrifiés sur la face hideuse de la France et de son armée. Quel que fut le prix que nous avons payé et que nous allions, hélas, encore payer, -et il fut très lourd- la grève des 8 jours constitua un tournant décisif et déterminant dans le cours de notre guerre de Libération nationale.» Poursuit-elle. La haine, la répression, la face hideuse de la colonisation, Zohra Drif les a vécues «aux premières loges» pourrait-on dire. Intellectuelle, elle n'ignorait rien des atrocités commises par l'armée coloniale, dès 1830, sur les populations civiles sans défense. C'est même cette prise de conscience qui l'a poussée à se sacrifier pour libérer le pays et son peuple. Mais plus que ce que les livres aient pu lui enseigner, elle allait vivre «en direct» l'horreur de la torture à grande échelle pratiquée par les soldats «civilisés» de Massu. Le récit qu'elle fait de la «terrible nuit du 2 au 3 février 1957 au domicile des Bouhired» est insoutenable. Cette nuit-là, les paras qui avaient installé leurs «équipements» de torture dans une maison n'ont épargné ni les adultes ni les enfants. Les paras voulaient des renseignements, ils n'en eurent pas. Pourtant, dans cette maison étaient cachés tous les responsables de la Zone autonome, y compris l'héroïne Hassiba Ben Bouali. On ne va pas vous rapporter les scènes d'atrocités qui eurent lieu cette nuit-là faute d'espace. Les militaires français étaient devenus fous à l'idée de voir tout un peuple suivre le mot d'ordre du FLN et paralyser la capitale sous les yeux de tous les correspondants de presse du monde entier. Il faut rappeler qu'avant la grève et depuis le 1er Novembre 1954, la France coloniale s'évertuait à présenter, au monde, les moudjahidine comme de vulgaires brigands qui n'avaient aucun soutien parmi la population. C'est précisément cette propagande que la grève des 8 jours est venue démentir. Qui en a eu l'idée? «La grève des 8 jours fut conçue, planifiée, expliquée et organisée de main de maître par deux de nos meilleurs combattants et dirigeants, deux génies visionnaires, hélas morts trop tôt, Larbi Ben M'hidi et Abane Ramdane» confirme, dans son livre, Mme Zohra Drif. Il nous est impossible d'être complet ici, l'espace ne suffirait pas. Aussi, nous conseillons à tous les Algériens et même aux étrangers, de lire le livre de la grande moudjahida, Zohra Drif, cette «volontaire de la mort». Non seulement l'écrit est de très haute facture, ce qui est normal vu le niveau d'études de l'auteure, mais il s'en dégage une force tirée du tréfonds de l'humain qui captive au point de ne plus lâcher le livre jusqu'à la fin. Citons, entre autres, le moment où Zohra pose sa bombe au «Milk Bar» qui explose alors qu'elle venait juste de tourner la rue. Le courage hors du commun de Djamila Bouhired, cette autre héroïne, qui tient sa bombe contre sa poitrine alors qu'elle devait, selon le réglage, exploser. L'amour et le courage extraordinaire de «Mama Zhor» la mère de Samia Lakhdari, qui ne lâcha pas d'une semelle sa fille jusqu'à la «Cafétéria» où elle déposa sa bombe. La rencontre de Zohra Drif avec Ben M'hidi. Leurs discussions. Zohra Drif a écrit un livre somptueux qu'il est impossible de résumer. A lire absolument! [email protected]