De terribles histoires au quotidien dont les principaux auteurs de ces scènes d'atrocités sont des enfants de moins de 18 ans. Nul ne naît enclin à la défiance des règles qui régissent la vie en société, et un primo-délinquant peut se mettre définitivement en marge de la société et devenir un grand criminel. Il semble que les «enfants» ont dépassé l'étape d'être victimes, ils sont passés à une autre étape plus dangereuse. Quelques-uns ont dépassé la ligne rouge. Compte tenu de la recrudescence et de la gravité de certains délits commis par des enfants de moins de 18 ans, la délinquance des mineurs compte aujourd'hui parmi les problèmes socio-psychologiques qui affectent le plus notre société et mettent en difficulté la symbiose et le bien-être de la cellule familiale. Les enfants sont devenus agresseurs, voleurs, tueurs et même chef d'association de malfaiteurs. Le pire est à craindre. De terribles histoires au quotidien dont les principaux auteurs de ces scènes d'atrocités sont des enfants de moins de 18 ans. Ce phénomène ravageur est bien là, il touche de plus en plus les adolescents jeunes et moins jeunes, principalement dans les grandes villes du pays. En 2013, quelques milliers d'enfants ont commis des crimes. Pire, une dizaine d'entre eux ont été impliqués directement dans des affaires de meurtre. A 10 ans, l'enfant commence par de simples disputes verbales avec ses camarades de classe, ensuite par des coups et blessures volontaires, plus tard, il finit par quitter les rangs de l'école pour joindre un autre monde qui n'est sûrement pas le sien. A ce moment-la, le cauchemar des parents commence. Témoignages de parents... «Mon enfant a été agressé et poignardé par son camarade de classe», témoigne Nadia, d'Alger, femme au foyer. Elle poursuit qu'elle n'arrive toujours pas à croire qu'un enfant de 12 ans puisse commettre un crime. Elle ajoute que ce dernier avait déjà d'autres difficultés avec les autres enfants, mais elle n'a jamais pensé qu'il pouvait arriver à ce point-la. Un autre père de famille de Béjaïa a été hospitalisé. Il était choqué par la condamnation de son enfant mineur impliqué dans une affaire de meurtre dont la victime est une vieille femme. Omar, un chauffeur de taxi raconte avec amertume le jour où les services de sécurité l'ont interpellé à cause de son enfant âgé de 14 ans, auteur d'une agression et vol qualifié. «Je suis un homme de principe, à cause de mon propre enfant tout le monde me montrait du doigt, j'ai traîné dans les tribunaux la tête baissée», révèle-t-il, il développe l'idée que rien ne justifie ce que son enfant a commis, notamment lorsqu'il ne manque de rien chez lui. «Je me demande juste pourquoi? Parfois même je me m'accuse de ne pas être un bon parent.» Les inégalités sociales, l'inflation, la pauvreté et la disparité dans la distribution des richesses renforcent sans doute la violence sous toutes ses formes. Contacté par nos soins, un officier supérieur de la police judiciaire nous explique que le phénomène de la délinquance juvénile dans notre pays, ne cesse de prendre de l'ampleur. «Ce phénomène constitue de nos jours un problème prioritaire majeur que les services spécialisés de l'Etat doivent prendre à bras-le-corps pour en atténuer les effets, la prévention de la délinquance juvénile étant indissociable de la lutte contre la criminalité», il ajoute, en outre qu'il faut garder à l'esprit que nul ne naît enclin à la défiance des règles qui régissent la vie en société, et qu'un primo-délinquant peut se mettre définitivement en marge de la société et devenir un grand criminel. L'officier supérieur indique que «ceci met en évidence l'impérieuse nécessité de la mise au point d'un plan national réfléchi, consacré à la mise en action de mécanismes de prise en charge et de soutien des primo-délinquants pour leur faire prendre conscience des conséquences de leurs actes, éviter la récidive, et favoriser leur réinsertion». La vulnérabilité des enfants Les enfants livrés à eux-mêmes dans les rues, nus et sans défense, et que rien n'aide à subsister, se retrouvent face à leurs faiblesses et leur vulnérabilité qu'ils doivent dépasser par n'importe quel moyen pour survivre, dans un monde où ils sont stigmatisés et mal vus. «Ces enfants seuls et sans repères, l'apprentissage de la rue aidant, deviennent des experts de la survie et développent des ressentiments à l'endroit de la société qui les a rejetés et pour laquelle ils n'ont aucun sentiment d'appartenance», explique Khalida Zaghdan psychologue dans une école primaire à El Achour Alger. Elle poursuit que ces enfants faibles et inoffensifs, deviennent petit à petit des candidats à la délinquance, ensuite des primo-délinquants si leurs besoins matériels notamment, ne sont pas satisfaits. «Face au dénuement, ils s'adonnant à des vols et autres actes de violence, en versant dans la prostitution et l'usage de substances stupéfiantes et psychotropes», précise-t-elle encore. Sous le couvert de l'anonymat, un juge d'instruction nous a apporté un éclairage sur l'ampleur de ce phénomène. «Au fur et à mesure qu'ils avancent en âge, ils deviennent plus violents et passent allégrement de la petite délinquance à la grande criminalité», indique le magistrat en mettant l'accent, notamment sur la prise en charge de ces enfants vulnérables. «L'absence de prise en charge et de protection compromet alors gravement leur intégration sociale et ils risquent de devenir des délinquants chroniques, stigmatisés par la société qui les a abandonnés, et se retrouvent face à la justice en l'absence d'échappatoire», indique-il. L'abandon de cet espace vital qu'est la rue aux délinquants de tous bords, permet à des groupes de malfaiteurs d'en faire des territoires contrôlés où ils provoquent l'affrontement et sèment la terreur parmi de paisibles passants. «La gravité de la situation est illustrée par le phénomène des bandes rivales, composées de jeunes, essentiellement des mineurs, armées de toutes sortes d'armes blanches, couteaux, sabres, barres de fer et autres haches, qui a tendance à se banaliser», explique un autre officier supérieur. Il ajoute que malheureusement ce fléau prend des proportions très inquiétantes en s'étendant à plusieurs quartiers de la capitale et même à d'autres villes du pays. Ici l'action policière réfléchie et rapide prend toute sa signification. «La célérité que requiert la réponse des services concernés à de telles situations doit être à la hauteur des attentes citoyennes», explique un observateur averti. Il ajoute entre autres, que les services de sécurité doivent déployer sur le terrain toute leur rigueur pour que force reste à la loi. «Nettoyer en permanence les endroits malfamés, rendre aux citoyens une rue apaisée et sans risque, et par là même, donner au travail de proximité policière la signification qui lui sied», révèle encore la même source. Cependant, d'autres problèmes sont apparus chez eux ou sont devenus plus importants. Faute d'un Code de l'enfance, d'une instance nationale chargée du suivi des enfants et d'une identification claire des objectifs à atteindre en matière d'une politique nationale de promotion de l'enfance, les efforts publics, malgré leur importance ne pourront pas cerner les maux dont souffrent les enfants de notre pays ou les endiguer. Faillite du système répressif La faillite du système répressif est patente en ce que la police n'accorde pas à la délinquance juvénile la part d'intérêt qui lui sied. «Les brigades de protection de l'enfance relevant de la police judiciaire se contentent généralement de traiter les cas de mineurs interpellés sur la voie publique, à des heures indues de la nuit ou dans des endroits malfamés, qui n'ont commis aucune infraction à la loi pénale», déclare sous le couvert de l'anonymat un président d'une association de protection de l'enfance en ajoutant qu'aucune forme de procédure n'est menée par les services de sécurité. «Aucune recherche sérieuse sur le pourquoi de ces fugues n'est entreprise par les services concernés, dont les éléments n'ont reçu aucune formation spécialisée, notamment sur la psychologie de l'enfant et la prise en charge des mineures victimes de crimes ou délits, notamment ceux ayant souffert d'agressions sexuelles», regrette la même source.