La situation s'est aggravée en Crimée où les pro-Russes se sont emparés des institutions stratégiques de la République autonome Entre menaces d'isolement et main tendue, l'Occident cherchait hier une solution diplomatique avec la Russie alors que des commandos armés pro-Russes ont pris de fait le contrôle de la Crimée. La Russie avançait par ailleurs ses pions dans d'autres régions ukrainiennes. Quelque 300 manifestants pro-russes ont pris d'assaut dans l'après-midi d'hier l'administration régionale de Donetsk (est de l'Ukraine), fief du président déchu Viktor Ianoukovitch. Face à l'un des plus graves conflits entre l'Occident et la Russie depuis la chute du mur de Berlin en 1989, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a appelé hier à garantir «l'indépendance, l'unité et l'intégrité territoriale de l'Ukraine», exhortant la Russie à «s'abstenir de tout acte qui pourrait mener à une nouvelle escalade». Les autorités ukrainiennes ont accusé la Russie de continuer à faire arriver massivement des militaires en Crimée, avec l'atterrissage en 24 heures de dix hélicoptères de combat et huit avions de transport, sans que l'Ukraine ne soit prévenue, contrairement aux accords entre les deux pays qui prévoient que Kiev soit informé 72 heures à l'avance de tels mouvements de troupe. La Russie a déjà augmenté de 6 000 soldats sa présence en Crimée, péninsule du sud de l'Ukraine, qui abrite la flotte russe de la mer Noire, d'après le ministère ukrainien de la Défense. Moscou a désormais un «contrôle opérationnel complet» sur la Crimée, a estimé dimanche à Washington un responsable américain, sous couvert de l'anonymat. Hier, toutes les bases militaires ukrainiennes étaient encerclées par des soldats non-identifiés agissant pour le compte des autorités pro-russes, selon le ministère ukrainien de la Défense. En déplacement à Kiev, le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, a mis en garde la Russie sur le «prix à payer» pour son action en Ukraine, après avoir rencontré les nouvelles autorités au pouvoir après la destitution le 22 février du président Viktor Ianoukovitch. Déjà, les marchés financiers russes étaient inquiets des conséquences sur l'économie déjà chancelante de la Russie des possibles sanctions qui pourraient être imposées à Moscou, évoquées par le secrétaire d'Etat américain John Kerry dimanche. Dimanche, les dirigeants des pays les plus industrialisés ont annoncé la suspension de leurs préparatifs en vue du sommet du G8 à Sotchi (Russie) en juin. Des observateurs de l'OSCE (Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe)devaient se rendre hier soir en Ukraine, pour «établir des faits neutres et une évaluation concrète de la situation sur le terrain», a annoncé la secrétaire d'Etat adjointe américaine pour l'Europe, Victoria Nuland. L'envoi d'une mission de l'organisation internationale, réclamée par les Etats-Unis, doit toutefois encore être décidée. Jouant la carte de l'apaisement, le porte-parole de la chancelière allemande Angela Merkel a indiqué que cette dernière estimait qu'il n'était «pas trop tard» pour trouver une solution politique à la crise en Ukraine, et qu'il n'y avait «pas d'option militaire». La veille, Mme Merkel s'est entretenue par téléphone avec M. Poutine qui lui a assuré que la réponse de la Russie à «la menace constante d'actes violents de la part des forces ultranationalistes (...) était totalement adaptée». Il avait néanmoins accepté la création d'un «groupe de contact» pour entamer «un dialogue politique» sur l'Ukraine. L'Otan a, elle, appelé dimanche Moscou et Kiev à rechercher une «solution pacifique» à la crise à travers le «dialogue» et le «déploiement d'observateurs internationaux», selon son secrétaire général, Anders Fogh Rasmussen. «La Russie ne veut pas la guerre avec l'Ukraine», a répondu dimanche soir le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Grigori Karassine.