D'un plateau de télévision à un autre Nommé directeur de cabinet à la Présidence, le 12 mars dernier, M.Ouyahia revient sur le devant de la scène après 14 mois de silence. Après la chaîne Ennahar TV, puis Dzair TV, l'ancien Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a été l'invité de Berbère TV. Sans concession, il a été interrogé, deux heures durant, par l'animateur Kamel Tarwihth sur l'officialisation de tamazight, les graves incidents de Ghardaïa, son départ de la tête du RND et du gouvernement, la santé et la candidature de Bouteflika et la controverse sur le DRS. Ferme, flegmatique et le ton posé, M.Ouyahia a rappelé que «l'histoire retiendra que c'est sous Bouteflika que tamazight a été consacrée langue nationale». Et son officialisation? L'ancien Premier ministre a noté que «chaque chose interviendra en son temps» et que «les militants de tamazight ne doivent pas désespérer pour que cette langue devienne officielle», avant de concéder que même si tamazight est enseignée à l'école, il reste beaucoup à faire pour améliorer son enseignement. «Des efforts doivent être faits pour l'enseignement de tamazight à l'école», a-t-il attesté avant d'ajouter que les militants de tamazight ne doivent pas désespérer pour qu'elle soit un jour langue officielle. Le journaliste revient à la charge, repose la question, relance et insiste, mais il ne parviendra pas à arracher une réponse à son interlocuteur pour savoir s'il est pour ou contre l'officialisation de tamazight. «Je ne vous répondrai pas», a tranché l'invité de Berbère TV, affirmant que l'Etat algérien est pour le moment pressé par d'autres questions autrement plus graves dont l'événementiel de Ghardaïa. A ce sujet, le journaliste interroge et s'interroge: pourquoi les dirigeants algériens ont-ils cette manie d'attendre qu'il y ait effusion de sang, c'est-à-dire le pourrissement de la situation pour intervenir? Cela a été le cas en Kabylie et malheureusement à Ghardaïa aussi. M.Ouyahia admet que ce qui a été fait par l'Etat est insuffisant du moment que la crise n'a pas été réglée, mais réfute l'idée «que l'Etat n'a rien fait ou les responsables laissent le pourrissement s'installer». «Si vous me dites que l'Etat est absent, je vous dis: excusez-moi, mais ce n'est pas vrai. Vous dire qu'il a tout fait, ce n'est pas vrai, l'Etat n'a pas tout fait». Il a expliqué que lorsque des affrontements ont eu lieu en 2008 entre malékites et ibadites, les responsables se sont déplacés et une charte d'honneur a même été signée entre les différentes parties. «Même en 2013, des responsables, comme le ministre de l'Intérieur et le Premier ministre, se sont déplacés dans la région pour essayer de régler le conflit», a-t-il ajouté, non sans souligner que les affrontements sont liés aux «questions socio-économiques» et au «banditisme». Abordant la candidature de Bouteflika pour un 4e mandat, Ahmed Ouyahia évite judicieusement toute polémique avec les adversaires du 4e mandat et ceux qui appellent au boycott du scrutin. Parlant de l'état de santé du président, candidat qu'il a rencontré à deux reprises les jours précédents: «Je l'ai rencontré fin février, début mars, pendant 90 minutes, et je dois vous dire qu'il a la lucidité et la pertinence du raisonnement qu'il faut pour gouverner. S'il n'avait pas toutes ces qualités, les officiels étrangers venus d'Afrique et d'Europe, l'auraient certainement dit.» Sur le rôle de l'Armée dans la gestion du pays et de désigner les présidents, il a affirmé qu'il faut qu'«on ôte définitivement de nos têtes que c' est l'Armée qui nomme les présidents». Sur le plan économique, M.Ouyahia s'est dit favorable à l'exploitation des gaz de schiste en Algérie. «Vous pouvez être contre cette alternative, mais le jour où vous n'aurez que 5 ou 10 milliards de dollars de rentrée de devises, ce jour-là beaucoups de choses vont changer dans nos têtes. Le gaz de schiste, nous devons l'exploiter.» Au sujet de la réforme de l'Etat, il a rappelé que «l'Etat algérien est bâti sur le principe de la décentralisation. Reste la régionalisation, autonomie des régions, ou tout autre appellation, il faut savoir que la gestion de l'Algérie est en perpétuelle amélioration. De 15 wilayas durant les années 1970, on est passé à 31 wilayas pour arriver à 48 depuis 1984. Il y a des wilayas qui viennent à peine de finaliser leur exécutif. On doit évoluer selon nos moyens pour mieux administrer un territoire-continent.» Nommé directeur de cabinet à la Présidence, le 12 mars dernier, Ahmed Ouyahia, 61 ans, revient sur le devant de la scène, après 14 mois de silence. En l'espace de quelques jours, il s'est exprimé sur trois chaînes de télévision. Ennahar TV, Dzair TV et enfin Berbère TV.