Le monde nouveau - à ne pas confondre avec l'éculé Nouveau Monde - fonctionne à la trique et à la baguette avec, du bon côté du manche, les détenteurs de la puissance. Cela n'a jamais été aussi vrai que depuis l'avènement du XXIe siècle avec le retour des bons ingrédients impérialistes du début du XXe siècle. Ce que les affaires, récentes, illustrent parfaitement à l'instar de la crise en Ukraine, la guerre en Syrie, le dossier du nucléaire iranien ou encore le diktat d'Israël dans le contentieux palestinien. Au-delà des faits, les maîtres du jeu géostratégique mondial, parlent haut et fort avec comme leitmotiv les mots «sanctionner» «châtier» «frapper». En fait, le président américain, Barack H. Obama, n'a, depuis quelque temps, que ces mots à la bouche, comme s'il leur trouve une saveur oubliée, surtout lorsque celui qu'il prétend vouloir sanctionner reste un pays qui n'est pas le premier venu, qui n'est autre que la Russie qui tint tête, en des temps tout aussi critiques, à de prédécesseurs US autrement plus puissants que l'actuel hôte de la Maison-Blanche. Les dérives que l'on observe aujourd'hui dans la politique mondiale ne sont en fait que le retour au premier plan et l'illustration de la doctrine du «Big Stick» (gros bâton) initiée par le président Théodore Roosevelt (1901-1909) qui formalisa la diplomatie de l'interventionnisme pour la «défense des intérêts» des Etats-Unis «où qu'ils se trouvent» faisant assumer au Nouveau Monde - tout compte fait, pas si éculé que l'on veut le croire - le rôle de «police internationale». Roosevelt n'a fait que donner un contenu pratique à la doctrine Monroe (1823) qui déjà assurait que les Etats-Unis «ne souffriront pas que l'on s'oppose directement à leurs intérêts». C'est un bref rappel des prémices de l'impérialisme avec des améliorations apportées aux doctrines Monroe (1817-1825) et Roosevelt qui combinent, selon l'époque et les évènements, la menace militaire (Roosevelt) à la sanction économique (Monroe). Par ces procédés, les Etats-Unis, qui n'ont pas de colonies, se constituèrent en revanche un solide «pré carré». Une colonisation des richesses convoitées (mainmise des USA sur les hydrocarbures mondiaux, arabes en particulier), sans s'encombrer des territoires. Si lors de la Guerre froide - au regard de l'équilibre de la terreur et de la destruction mutuelle assurés par les missiles nucléaires pointés sur les deux blocs - la discrétion était de mise, et les superpuissances ne se sont jamais menacées directement, il n'en a plus été de même après l'effondrement de l'Union soviétique. Les interventions directes ou indirectes américaines à l'étranger - dont la plus emblématique reste l'invasion de l'Irak par les armées US - ne se comptent plus. En fait, personne ne s'en offusque. Bien au contraire, d'aucuns attendent, demandent même, aux Etats-Unis une ingérence dans les affaires de leur Etat. (cf: l'opposition syrienne et l'Arabie Saoudite, exigeant une frappe US contre la Syrie). Dans le cas de la crise ukrainienne, Barack H. Obama, hausse le ton, estimant intimider ainsi l'ours russe, dès lors qu'il juge qu'il est dans son bon droit étant du bon côté de la puissance (sous toutes ses formes). Aussi, la justice, la légitimité n'ont ni place ni priorité. Le droit et son pendant, ledit «droit international», ce sont les puissants qui les décrètent et les déterminent. Le reste, c'est de la littérature pour débiles. C'est du moins ainsi que les Etats-Unis et leurs dirigeants voient les choses, concept parfaitement illustré naguère par George W. Bush qui, sans état d'âme, détruisit l'Irak, berceau de la première civilisation humaine. Mais faut-il s'en étonner, quand le mentor de l'usage de la force, comme premier et ultime acte de puissance, Théodore Roosevelt, justifiait dans un discours prononcé le 6 décembre 1904 que «l'injustice chronique ou l'impuissance qui résulte d'un relâchement général des règles de la société civilisée peut exiger, en fin de compte, en Amérique ou ailleurs, l'intervention d'une nation civilisée et, dans l'hémisphère occidental, l'adhésion des Etats-Unis à la doctrine de Monroe peut forcer les Etats-Unis, même à contrecoeur, dans des cas flagrants d'injustice et d'impuissance, à exercer un pouvoir de police internationale» (cf: Theodore Roosevelt, Roosevelt Corollary). L'Ukraine illustre absolument ce concept: appuyer un pouvoir même illégitime dès lors qu'il se réclame de la même idéologie. C'est comme ça que cela doit se faire...Pas autrement! C'est selon cette appréciation des rapports de force, que la Russie a été exclue sans autre forme de procès du G8. Ni l'Union européenne, ni les Etats-Unis n'ont été sages pour savoir raison garder, qui ont voulu faire de la crise ukrainienne, une ultime épreuve de force, un bras de fer avec Moscou pour imposer leur diktat. Mais, attention, méfiez-vous de la bête blessée.