Des contingents de soldats ont déserté en masse l'armée ukrainienne L'opération lancée le 13 avril avait des objectifs précis: désarmer les groupes séparatistes, libérer les bâtiments occupés (mairies, sièges de l'administration régionale, locaux de police et des services secrets) et rétablir l'autorité de Kiev. L'opération «antiterroriste» lancée par Kiev pour reprendre le contrôle de l'est de l'Ukraine tenu par des séparatistes russophones apparaît comme un échec un mois après son lancement, signe de l'impuissance des autorités face aux séparatistes, selon des experts. «L'opération s'est révélée inefficace car les forces ukrainiennes n'y étaient pas préparées», tranche l'expert militaire Mykola Soungourovski. Iaroslav Gontchar, commandant adjoint du bataillon Azov, une unité de volontaires intégrée à la Garde nationale ukrainienne, voit lui plusieurs explications à cet échec: «Au niveau local, la trahison de la police et l'opposition de la population, ainsi que l'incompétence de ceux qui planifient les opérations». L'opération lancée le 13 avril avait des objectifs précis: désarmer les groupes séparatistes, libérer les bâtiments occupés (mairies, sièges de l'administration régionale, locaux de police et des services secrets) et rétablir l'autorité de Kiev dans les régions de Donetsk et Lougansk, où vivent quelque 7 millions d'habitants. «Nous ne permettrons pas à la Russie de répéter le scénario de la Crimée dans l'est de l'Ukraine», avait prévenu le président par intérim Olexandre Tourtchinov. En Crimée, des groupes russophones -apparemment soutenus par des forces spéciales de l'armée russe - avaient pris le contrôle de la région puis organisé un référendum ayant abouti en mars au rattachement à la Russie de cette province du sud-est de l'Ukraine, considéré comme une annexion par Kiev et les Occidentaux. Aujourd'hui, les régions de Donetsk et Lougansk (qui forment le Donbass) échappent encore plus au contrôle de Kiev qu'il y a un mois: les Russophones ont pris le pouvoir dans la plupart des villes et contrôlent en bonne partie ces territoires, à l'exception notable des postes-frontières avec la Russie et des bases militaires. Dimanche dernier, les «République populaire de Donetsk» et «République populaire de Lougansk» autoproclamées ont organisé un référendum sur leur indépendance et la première a aussitôt demandé au Kremlin d'être rattachée à la Russie, une demande pour l'instant restée sans réponse. Dès le début de «l'opération antiterroriste», les forces loyalistes ont montré qu'elles n'étaient pas en mesure de combattre efficacement les insurgés: en quelques jours, plusieurs hélicoptères de l'armée ont été abattus et des blindés légers et chars lourds ont été capturés par les séparatistes, après avoir été arrêtés dans un village par une foule hostile. Des images humiliantes pour l'armée ukrainienne. «Faire le bilan de cette opération n'a pas de sens: il n'y a aucun résultat majeur et les forces ukrainiennes n'ont absolument pas les moyens nécessaires pour restaurer l'ordre dans la région», affirme à Kiev Volodymyr Fessenko, du centre d'Etudes politiques Penta. Pour lui, l'opération militaire ne saurait en aucun cas suffire à régler la question: «Il ne sera pas possible de conserver le Donbass par la force. Cela ne sera possible que par la négociation», ajoute-t-il, en soulignant la nécessité d'impliquer dans le processus les élites locales, à commencer par le milliardaire Rinat Akhmetov, l'homme le plus riche d'Ukraine, qui est le pivot économique de l'est de l'Ukraine. Si l'opération militaire ne s'accompagne rapidement de négociations, «le Donbass va peu à peu se transformer en Transdniestrie», cette région indépendantiste russophone de Moldavie, qui n'est reconnue par personne, poursuit M.Fessenko. «Et il y a des variantes encore pire: une guerre longue et une escalade de la violence, c'est à dire le scénario yougoslave», estime-t-il.