«Imite au lieu de jalouser!» dit-on chez nous. La France s'est finalement décidée à protéger ses entreprises. Un décret soumettant les investisseurs étrangers à autorisation préalable de l'Etat français a été publié jeudi dernier. Son application est immédiate. Sans trop nous attarder sur les détails qui ont précédé cette décision, disons que c'est le projet de rachat du groupe français Alsthom par l'américain Général Electric qui a été l'élément déclencheur. Dans cette affaire, l'Etat a été induit en erreur, selon le ministre du Développement productif, Arnaud Montebourg, qui a accusé le P-DG d'Alsthom de l'avoir faussement rassuré peu de temps auparavant. Ce qui prend l'air d'un coup tordu prémédité. Ce qui a tout l'air aussi d'être une réponse de la finance internationale au président français, François Hollande, qui l'avait défiée en la qualifiant d'être «son principal ennemi» dans un discours public. Contre-attaque. Les Allemands sont sollicités par la France qui charge leur groupe Siemens d'introduire une offre supplémentaire. Ce qui a permis de freiner l'opération de GE. Un temps mis à profit pour trouver la parade. Elle est venue sous la forme d'un texte juridique qui porte désormais le nom de «décret Alsthom» et cité plus haut. Les uns qualifient ce décret de «patriotisme économique», d'autres de «protectionnisme». Une querelle de mots qui ne peuvent pourtant pas cacher les véritables enjeux. Pour Montebourg «ces mesures de protection des intérêts de la France sont une reconquête de notre puissance. Nous rééquilibrons le rapport de force entre les intérêts des multinationales et ceux de l'Etat». Par «reconquête» et «rééquilibre», le ministre français acte que le dépeçage de la France ne datait pas de la veille. Et bien sûr, de vives réactions ont suivi cette décision de l'Etat français de protéger son économie. Le Medef, par la voix de son président, Pierre Gattaz, craint que ce décret crée un «problème de rejet» des investisseurs étrangers. C'est drôle comme cela nous rappelle une situation que nous avons déjà vécue en Algérie. Notre «Medef» à nous qui s'appelle le FCE avait, par la voix de son président, Réda Hamiani, trouvé que la loi obligeant les sociétés mixtes à la règle des 49/51% au profit du partenaire algérien, allait bloquer les IDE. Il a été relayé par d'autres voix de l'intérieur. Jamais de l'extérieur. Cette levée de boucliers contre cette mesure dura longtemps. Eh bien, tenez-vous, jeudi dernier, Hamiani a déclaré à la Télévision nationale que les «milieux d'affaires s'étaient acclimatés à cette règle». A la bonne heure! Dans quelque temps, Gattaz dira la même chose aux Français au sujet du «décret Alsthom». Il faut juste tenir bon. Actuellement, les dispositions de ce décret ne concernent que les entreprises des secteurs stratégiques. Encore faut-il les définir. Il n'empêche que la protection a de fortes chances d'être étendue. Aux étrangers qui achètent les vignobles français par exemple. Car comme l'a si bien dit Marine le Pen «écarter un américain pour vendre Alsthom à un allemand (Siemens), moi je n'appelle pas ça du patriotisme». Trop pressée, la fille de son père. Elle ne tient pas compte des vertus de «l'acclimatation». Et si le patriotisme économique est une chose nouvelle en France avec l'arrivée de François Hollande, aux Etats-Unis avec (l'amendement dit «Exon-Florio») et en Grande-Bretagne avec (l'Enterprise Act), le protectionnisme fait partie du cours normal de la vie économique. Pas de Medef ni de FCE qui tienne! Ceci dit, le «décret Alsthom» n'est pas véritablement le «49/51» en cours dans notre pays. Même si l'esprit y est, les données diffèrent d'un pays à un autre. Nous n'avons pas le même parcours historique ni le même niveau de développement. Seul le patriotisme anime tous les peuples!