Le scénario catastrophe auquel il a fait référence serait une guerre fratricide. Le ministre des Affaires religieuses et des Waqfs est sorti, hier, de son silence pour dire ses quatre vérités. Acculé par l'ampleur prise, ces derniers jours, par la campagne de «prosélytisme chrétien» dont seraient coupables des missionnaires de l'Eglise chrétienne en Kabylie, et que la presse nationale a, durant ces derniers jours, largement commentée, Bouabdallah Ghlamallah a essayé, souvent sans succès, de situer les tenants et les aboutissants de cette affaire. Invité au centre de presse Mohamed-Abderrahmani d'El Moudjahid à Alger, le ministre, qui, tout au long de son intervention, a fait valoir le caractère constitutionnel et permissif de la liberté de culte et de l'exercice religieux en Algérie, a, néanmoins, confirmé l'existence de cette campagne, dont il a d'ailleurs vite fait de minimiser la portée, du moins à court terme. «Les Kabyles tiennent ardemment à l'islam», a-t-il tenu à rassurer. Pourquoi, dès lors, tout ce bruit ? «Des gens exploitent les conditions sociales et culturelles des jeunes oisifs de la région pour leur inculquer malicieusement les principes du christianisme... en offrant, à cet effet, des aides matérielles», explique le représentant du gouvernement, en martelant : «On ne peut en aucune manière acheter la conscience des personnes.» Le ton rassurant du ministre a fini, toutefois, par céder à l'inquiétude, voire au désarroi, lorsqu'il a mis en garde contre la propagation du christianisme dans les années à venir. Le scénario catastrophe auquel il a fait référence, serait, ni plus ni moins, une guerre fratricide aux imprécations fâcheuses, entre les deux communautés religieuses. «Il y aura effusion de sang», a-t-il averti. Pour éviter une telle éventualité, M.Ghlamallah a plaidé en faveur de l'émancipation «limitée» de toutes les religions pratiquées dans le pays, hormis l'Islam bien sûr, «religion d'Etat et de tous les Algériens». Au chiffre faisant état de 30% de la population kabyle qui fréquente régulièrement les églises - une estimation donnée par un universitaire lors d'un colloque organisé en mai dernier à l'université islamique de Constantine - le premier imam du pays dit ne pas y croire. Il réfute aussi la rumeur «dont il a eu connaissance par voie de presse» relative à l'initiation, par ses services, d'une enquête sur le sujet. Sur la question de l'existence, à Tizi Ouzou et à Béjaïa, d'une quinzaine d'églises illégales, très fréquentées par les pieux baptisés, ce dernier s'est interrogé sur la nature «clandestine» de ces lieux de culte, du moment que de nombreuses autorisations ont été accordées par ses soins aux sollicitations de construction d'églises. Ouverture, tolérance, démocratie... sont autant de concepts par lesquels le représentant du gouvernement a tenté de définir son action à la tête de la tutelle. Et c'est dans leur contexte, justement, qu'il dit avoir instruit les imams des 15.000 mosquées répertoriées sur l'ensemble du territoire national, à propos des prêches du vendredi : «Ils (les imams) ne subissent aucune pression (...) ils font bien leur boulot et ils ont notre confiance», a-t-il précisé, répliquant implicitement à la cabale médiatique montée contre son ministère au sujet des prêches incendiaires dont se sont fait la triste notoriété certains imams. L'ordre du jour de la rencontre étant le rôle de la zakkat dans la vie publique, M.Ghlamallah a dévoilé la nouvelle stratégie qu'il entend mettre en oeuvre dans un avenir proche. La force de frappe de cette politique se situe en la sensibilisation et la mobilisation de l'ensemble des personnes pour que chacun s'acquitte de son devoir religieux. La zakkat de l'Aïd El Fitr passé a permis, à elle seule, de récolter la somme de 60.000 DA. M. Ghlamallah veut impliquer l'administration, les commissions de mosquées, les APC, dans la récolte et la distribution en faveur des nécessiteux des sommes et des biens amassés. Autre nouveauté, en plus des aides offertes, la tutelle met à la disposition des jeunes nécessiteux, un apport financier pour la création de microentreprises. «La zakkat est, entre autres, une action efficace pour freiner un tant soit peu la propagation inquiétante de la pauvreté dans notre pays», a-t-il expliqué en soulignant que, «depuis l'année 2004, 25.000 familles ont bénéficié de ce devoir religieux».