De larges pans de territoire échappent à son autorité et ses soutiens se dérobent en Irak comme à l'étranger, mais le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki reste pour de nombreux Irakiens le seul à même de diriger le pays. Au pouvoir depuis 2006, M. Maliki a remporté les élections législatives du 30 avril sans pour autant obtenir de majorité et depuis l'offensive fulgurante des insurgés sunnites il y a près d'un mois, des experts ont exprimé des doutes sur ses chances de conserver son poste. Mais le Premier ministre chiite, vivement critiqué pour son choix de marginaliser depuis des années la minorité sunnite, pourrait aussi profiter d'un regain d'allégeance confessionnelle face à la menace des insurgés. Tout en fustigeant l'incapacité de la classe dirigeante à faire face à la menace, le grand ayatollah Ali al-Sistani, la plus haute autorité religieuse chiite du pays, a lancé des appels à l'unité qui ont resserré de fait les liens autour de M. Maliki. "Je pense que le soutien autour de lui s'est renforcé", déclare Abbas Saadeq, un étudiant de 21 ans, évoquant l'appui apporté à M. Maliki par la marjaïya, qui regroupe les plus importants dignitaires chiites. "Les gens comprennent que la marjaïya soutient le gouvernement, alors les gens le soutiennent". Bagdad arbore d'ailleurs toujours les multiples portraits du Premier ministre hérités de la campagne électorale, qui a conduit à une large victoire de sa coalition "L'Etat de droit" alors que le pays était déjà confronté à une forte recrudescence des violences. Désormais, les sunnites menés par les combattants de l'Etat islamique (EI), des jihadistes ultra-radicaux accusés d'exactions en Irak comme en Syrie, ne sont qu'à deux heures de route au nord de la capitale. Plusieurs experts accusent M. Maliki d'avoir privilégié la fidélité et l'appartenance confessionnelle plutôt que la compétence dans l'encadrement de l'armée, la privant d'un sentiment unitaire et national qui aurait peut-être pu l'aider à éviter sa débandade initiale début juin. "C'est l'EI qui a aidé Maliki", assure cependant un policier s'exprimant sous couvert d'anonymat à Bagdad. "Il lui a permis de rallier les chiites autour de lui".