Une véritable marée humaine, rappelant les grands galas d'antan, a déferlé sur la paisible ville de sidi El Houari, Oran. 27 ans après son dernier spectacle, Takfarinas retrouve ses fans de la région Ouest en leur donnant, jeudi dernier, un des concerts des plus explosifs, dans le très attrayant Théâtre de verdure d'Oran. La rencontre a été organisée par l'Office des arts et de la culture de la commune d'Oran dans le cadre des animations des soirées ramadhanesques. La guet-star incontestable des soirées ramadhanesques de la deuxième ville du pays, voire même de ces dernières années, a tout simplement émerveillé la marée humaine qui a pris d'assaut le Théâtre de verdure dès la rupture du jeûne. Takfarinas n'a pas dérogé à la règle, dès qu'il fût annoncé triomphalement par l'animateur. Il va droit au but en chauffant la nombreuse foule. Après l'introduction, la «touchia» de la Yal Music, Takfarinas fera une entrée magistrale en se lançant dans son coutumier jeu de scène, dans lequel il a l'habitude de joindre le jeu corporel en dansant, tout en «nucléarisant» la foule par le son dégagé de sa guitare Takfa. Aussi, ce double jeu est ponctué par sa voix qui envoûte les présents connaisseurs de toutes les chansons, anciennes et nouvelles de Takfarinas. Dans cette trilogie musicale, Takfarinas vise une seule dimension: mettre le public en harmonie avec le produit qu'il lui propose. L'assistance répond sans trop attendre, en se mettant sur le champ en pleine interactivité avec le fondateur de deux styles distincts: takfaoui pour le chaâbi et yal pour la musique rythmée. Ce dernier hausse le ton en tapotant merveilleusement son fameux mandole à double manche baptisé au nom de Takfa, sous un tonnerre d'applaudissements et de youyous du public qui scandait à vive voix «Imazighen, Imazighen». Takfarinas étant rassuré que le public lui est acquis, se lance dans ses chansons au rythme vibrant éveillant les plus apathiques et insensibles. C'est comme si le chanteur voulait annoncer la nature du concert, 27 ans après le dernier spectacle qu'il a donné à Oran lorsque la scène du Théâtre de verdure était encore poussiéreuse, très ému par la force de l'accueil réservé par un public lui manquant et qu'il veut satisfaire à tout prix. Dans cette course pour le ravissement des présents, Takfarinas voulait, sans aucun doute attester qu'il est le meilleur, en donnant l'image d'un homme qui veut marquer son spectacle plus que cela a été le cas en 1987. «Je suis ému par votre accueil et votre présence en masse», a-t-il affirmé du haut du podium ajoutant: «Je vous aime et j'aime la ville du «wah» (oui) d'Oran qui m'a accueilli chaleureusement, il y a 27 ans.» «On va fêter ces retrouvailles», a-t-il lancé avant d'entamer une autre phase d'un spectacle électrique ponctué par le fredonnement des chansons comme Zaâma, Zaâma, Anzar, anzar,... Aysseyi... Dougga Dougga, Zine Dhoudrim à Moh...». Mais à chaque intervalle, l'artiste surchauffait les jeunes qui se rapprochaient de la scène au fur et à mesure du déroulement du spectacle. Ces derniers ont été, avec l'aval du maire d'Oran, empêchés par les agents de sécurité qui interdisaient la danse près de la scène. Le maire s'est même rapproché d'un spectateur pour le sommer de «ne pas gâcher la fête». «Comme si la musique n'est pas faite pour danser», a déploré un spectateur venu de Tlemcen, rêvant de voir de près Takfarinas. En véritable monstre de scène, Takfarinas a su et pu bercer toute une marée humaine qui n'a ménagé aucun effort pour l'accompagner dans son répertoire riche et varié tel que Ouiza, Tebeg riri, Way Telha, Awid, Ines ines.... et bien d'autres titres, avant de clôturer son gala par la célèbre chanson Zaâma, Zaâma, ravi et surtout très content de son passage plus que réussi à Oran. Le roi de la yal music quitte difficilement le podium avec un sentiment de devoir accompli et de pari réussi. Le spectacle de Takfarinas était également l'occasion de rendre un vibrant hommage à son ami défunt Matoub Lounès, en interprétant dans un silence presque de cathédrale, la fameuse chanson Aya Lounès. Dans le sillage de cet hommage, Takfarinas a invité les présents à éterniser la mémoire de Hasni, Rachid et Fethi et la chorégraphe de Sidi Bel Abbès récemment décédée, en l'occurrence Rachida Reguig. Une minute de silence fut également observée à la mémoire des martyrs de la guerre de Libération nationale. Une véritable marée humaine, rappelant les grands spectacles d'antan, a déferlé sur la paisible ville du saint patron Sidi El Houari, El Bahia, Wahrane.