à Hydra, El Mouradia... les tarifs oscillent entre 120 à 200 DA le gâteau A l'ère du «prêt-à-consommer», la préparation des gâteaux de l'Aïd à la maison, dans une ambiance bon enfant, commence à disparaître devant ces centaines de magasins qui proposent des gâteaux traditionnels tout faits! En cette dernière semaine du mois de Ramadhan, il n'y a pas que les boutiques de prêt-à-porter qui sont prises d'assaut! C'est aussi le rush dans les magasins spécialisés dans la confection de gâteaux traditionnels sur commande. En effet, la mutation qu'a connue la société algérienne ces dernières années a fait apparaître une nouvelle tendance, celle de l'achat des gâteaux traditionnels prêts à être consommer! L'ère de la préparation les gâteaux de l'Aïd à la maison dans une ambiance bon enfant commence à disparaître devant ces centaines de magasins qui proposent des gâteaux traditionnels tout faits! Car il faut le reconnaître, les femmes algériennes sont de plus en plus actives professionnellement, et n'ont plus de temps à consacrer aux préparatifs des gâteaux de l'Aïd. C'est ce que nous explique, Malha, une employée d'une banque étrangère que nous avons rencontrée dans l'une de ces boutiques spécialisées dans la confection de gâteaux. «Le temps passe très vite, entre le boulot, la préparation du f'tour, les tâches ménagères, s'occuper des enfants, leur acheter les vêtements de l'Aïd... En plus, il faut aussi que je fasse les gâteaux. Non, non je n'ai pas le temps pour ça!», affirme-t-elle sans ambages. «Je préfère perdre un peu d'argent en les achetant que de perdre ma santé...», ajoute-t-elle pour expliquer son choix. Cet avis est partagé par Nesrine. «J'arrive à peine à préparer le f'tour que je rate parfois, faute de temps. Préparer les gâteaux de l'Aïd, c'est encore pire. L'unique solution est de passer commande de trois ou quatre modèles de gâteaux, juste pour marquer cette fête», avoue cette employée dans un bureau d'études privé et maman de deux garçons. Pour expliquer un peu plus son désarroi, Nesrine nous fait savoir qu'elle peine à demander une journée à son employeur pour acheter des vêtements de l'Aïd pour ses deux petits qui l'attendent chaque soir. Souhila a elle aussi, opté pour l'achat de gâteaux faits. Elle résume son choix par une petite phrase: «Cela me sauve la vie.» Néanmoins, elle admet qu'au début elle était très réticente à le faire. «C'était pour moi «hachouma» (honte). Il n'a jamais été question que je le fasse. Je suis issue d'une famille très à cheval sur les traditions et la préparation des gâteaux en fait partie. Alors vous imaginez si ma mère ou pire, ma belle-mère apprenait que j'ai fait faire mes gâteaux...», souligne-t-elle avant de raconter l'histoire qui l'a poussée à devenir adepte des confectionneurs de gâteaux. «Il y a deux ans, avec la chaleur du Ramadhan et la fatigue, j'étais vraiment saturée. J'ai raté mes gâteaux, ce qui a provoqué chez moi une crise de nerfs», rapporte-t-elle. «Voyant mon désarroi, mon mari est allé en acheter chez le boulanger du quartier. Ils étaient aussi bons que les miens. Personne n'a su que je les avais achetés. Et donc depuis deux ans, avec l'accord de mon mari, j'ai décidé de ne plus me casser la tête.», ajoute-t-elle. Par manque de temps ou simplement de savoir Saliha, de son côté, avoue ne pas être un cordon bleu. «Je ne sais tout simplement pas faire de gâteaux. Quand j'étais célibataire, j'étais plus occupée à réussir professionnellement qu'autre chose. Mon mari le savait avant notre mariage et l'a accepté», admet-elle timidement en demandant au spécialiste de lui préparer 50 pièces de makrout ellouz, baklawa et aârayèche. Une commande qui lui revient à environ 6000 DA, à raison de 40 DA pièce. Ces tarifs sont pratiquement les mêmes partout, ils varient entre 35 à 70 dinars. Néanmoins, dans les quartiers huppés des hauteurs d'Alger, ces tarifs passent au double, si ce n'est le triple. A Deux-Bassins (Ben Aknoun), à Hydra, El Mouradia...les tarifs oscillent entre 120 à 200 DA le gâteau. Les confiseurs justifient ces prix exorbitants par la qualité de leurs gâteaux qui sont «faits à base d'ingrédients naturels et de qualité». «On utilise du vrai beurre, du vrai miel, du lait en brique et non celui en sachet, des amandes...», explique l'un d'entre eux qui met en évidence la renommée de ces gâteaux. «Regardez mes gâteaux comme ils sont beaux. En plus, le goût n'est pas du tout le même que les autres. Goûtez, vous verrez...», argumente-t-il pour faire passer la pilule. Le low coast dans les quartiers populaires Toutefois, en contraste avec les paillettes des beaux quartiers, dans les quartiers populaires on propose des gâteaux low coast. C'est le cas au quartier Les Halles, à Belcourt, plus précisément à la rue Rouchaï Boualem, un pâtissier propose les gâteaux traditionnelles à bas prix. On cite l'exemple de «halwate tabaâ» qui est vendu à 10 dinars la pièce ou encore le «tcharek el aaryane» à 20 dinars! Le secret de ces gâteaux à bas prix sont comme pour ceux aux prix qui flambent, c'est-à-dire les ingrédients. Les confiseurs utilisent des cacahuètes au lieu des amandes, du miel industriel au lieu du miel naturel,...Certains vont même jusqu'à diminuer les dosages pour faire des économies et proposent ces gâteaux à des prix abordables. Les supermarchés ont également surfé sur la vague de gâteaux puisqu'on trouve dans les étals des grandes surfaces des boîtes de gâteaux prêts à être exposés directement le jour de l'Aïd. Dans ce passage du tout prêt à consommer, on trouve quand même certains adeptes de la vieille époque qui préparent eux-mêmes leurs gâteaux. «Franchement, je préfère de loin préparer mes gâteaux moi-même, même s'ils sont ratés, mais au moins, je gagne de l'argent et je fais plaisir à mes enfants. En plus, c'est ça qui fait le charme dans les préparatifs de l'Aïd», pense Farida, femme au foyer rencontrée au niveau d'un magasin spécialisé dans la vente de produits pour la confection de gâteaux. El Hadja Fatma-Zohra, grand-mère qui a toujours veillé à faire respecter les traditions, ne va pas avec le dos de la cuillère pour qualifier cette nouvelle mode. «Pour moi, commander des gâteaux de l'Aïd est synonyme de paresse, d'incapacité et de manque de sens de responsabilité», critique-t-elle. Autre époque donc, autres habitudes! Elle est bien loin l'époque où les familles envoyaient les plateaux de gâteaux qu'elles confectionnaient aux boulangers du quartier pour les faire cuire...! Désormais, on prend directement ceux du boulanger...