Kamel Chenane fait partie de cette génération d'artistes qui n'ont que leur volonté et leur amour pour l'art pour survivre dans un contexte pour le moins hostile. Dès l'âge de 10 ans, l'enfant d'Ahl L'Ksar gratte sur une guitare pour occuper ses moments oisifs dans un village où rien n'est conçu pour les jeunes. Cette entrave s'ajoute du fait qu'en ces temps-là il était difficile de décliner son identité dans un système prédominé par une pensée unique, un parti unique, un art unique. L'artiste accompagne le chantre de la chanson berbère locale, Rezig Kaci. Cette expérience enrichit le musicien en herbe et lui ouvre la voie vers d'autres perspectives. Il continue à figurer dans des orchestres de renom, connus dans la région et ailleurs et parmi lesquels nous citerons Amirouche, Mohand Mesbah... petit à petit, l'artiste fait son chemin dans un climat hostile où il ne faut compter que sur soi-même. A l'âge de 18 ans, Chenane s'initie à la chanson. Aidé par le poète Menas Ali, il produit un premier album de 6 chansons. El Vaz (l'aigle) est le titre d'un travail qui allie des thèmes divers. La cause identitaire, un hommage à l'artiste, la séparation avec la bien-aimée..., sont autant de sujets traités dans une K7 avec laquelle Chenane sort de l'anonymat. L'artiste qui allie le style classique et l'instrumentation moderne est victime comme ses semblables de l'acculturation des responsables du secteur, qui préfèrent le temps d'une soirée commémorative, ramener des chanteurs de renom à coups de millions. Décidé et persévérant, l'artiste prend en charge les dépenses, non pas par souci du gain mais par amour pour l'art comme il aime le préciser. Cette opiniâtreté se consolide avec la production chez Sara Music de Kamel Mimi d'un second album intitulé Djendjane. Ce produit contient 9 chansons rythmées qui feront un tabac à l'occasion des fêtes. L'artiste qui voue une reconnaissance à ses modèles, a intégré une reprise d'un titre de Ali Maâchi. Dans une visite, le chanteur a insisté pour rendre un vibrant hommage à l'éditeur qui aide concrètement les artistes. S'agissant de ses relations avec les administrations chargées de la culture, l'artiste nous précisera qu'à ce jour, personne n'a osé l'inviter. Ce fait remet en question l'utilité de ces directions de la culture qui n'existent que le temps d'une commémoration protocolaire. L'artiste sollicite un soutien pour perpétrer une culture que seuls les artistes peuvent préserver à l'ère de l'invasion satellitaire, surtout que la jeunesse s'identifie et se reconnaît dans les textes et paroles de ces oeuvres.