Le retour de Sarkozy dans l'arène politique française pourrait être la meilleure nouvelle de la rentrée pour le pouvoir socialiste, très affaibli après un été calamiteux, en ressoudant la gauche face à un adversaire honni. Souhaitez-vous le retour de Sarkozy? «Evidemment! Ca fait maintenant deux ans que nous sommes seuls sur le ring. On va écouter la différence», déclarait récemment Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement. «Pour François Hollande, pour le gouvernement, pour la gauche, c'est sans conteste une bonne nouvelle», confirme le politologue Eddy Fougier. Le retour de l'ancien président de droite va permettre de «ressouder une gauche et un Parti socialiste un peu distendus», désorientés par la ligne sociale-libérale imprimée par l'exécutif, mais aussi de «revenir sur son bilan». Un bilan sur lequel les Français portent un «jugement sévère», rappelle Frédéric Diabi de l'Institut de sondage Ifop. Malgré une quasi-retraite de deux ans et demi, l'ancien président demeure l'une des personnalités politiques les plus clivantes en France et deux Français sur trois ne souhaitaient pas son retour. Nicolas Sarkozy «n'échappera pas à son bilan, ce sera son boulet», a martelé vendredi le Premier secrétaire du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis peu après l'annonce du retour en politique de l'ex-chef d'Etat. Ces dernières semaines, nombre de responsables socialistes confiaient leur impatience de retrouver leur «meilleur ennemi». «La perspective de son retour fait beaucoup de bien à notre majorité», reconnaissait en juillet le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone. Le Premier ministre Manuel Valls ne s'y est pas trompé en désignant Nicolas Sarkozy comme celui avec qui il veut débattre «projet contre projet» dans une «confrontation avec la droite». «Nicolas Sarkozy veut y participer: nous le jugerons sur l'état dans lequel il a laissé le pays», a asséné mercredi M. Valls, pour qui il sera sans doute plus aisé de batailler avec l'ancien président (2007-2012) qu'avec ses détracteurs au sein du PS, ces «frondeurs» devenus ces dernières semaines ses principaux adversaires, faute de leadership dans l'opposition. Très critiqué à gauche, le chef du gouvernement français a arraché cette semaine un soutien étriqué à l'Assemblée nationale, lors d'un vote dit «de confiance» pour lequel 31 socialistes et apparentés se sont abstenus. «Le retour de Nicolas Sarkozy, nous l'accueillons comme la capacité de recentrer le vrai débat dans ce pays. Le vrai débat n'est pas entre les socialistes et les socialistes, il est évidemment entre la majorité et l'opposition», insiste le député socialiste Jean-Jacques Urvoas. «On va peut-être passer à une autre séquence», estime Eddy Fougier, chercheur associé à l'Institut de recherches internationales et stratégiques (Iris), pour qui «le retour de Sarkozy, c'est déjà un parfum de présidentielle». Or, si l'ancien président est donné largement favori pour reprendre la tête de son parti l'UMP, en lambeaux depuis la défaite de 2012, la reconquête de l'Elysée en 2017 s'annonce semée d'embûches. L'ancien président, outre ses démêlés judiciaires, aura face à lui une forte opposition interne dans la perspective de la primaire à droite pour la présidentielle. «La gauche va lui ressortir son bilan. A droite, certains peuvent aussi réclamer ce droit d'inventaire. Les langues vont se délier», juge M.Fougier.«Sarkozy a voulu incarner la rupture mais ne l'a pas mise en oeuvre. Il a promis des réformes mais il a eu peur de la rue et les réformes n'ont pas été faites», relève-t-il. «Ce que Hollande et Valls disent vouloir faire, c'est ce que Sarkozy n'a pas osé. Ils peuvent lui dire + Nous, le sale boulot, on le fait+», estime-t-il. Pour Philippe Braud aussi, professeur à Sciences-Po, «le retour de Sarkozy est une bonne chose pour François Hollande, et surtout une très mauvaise nouvelle pour l'UMP». «Je suis persuadé qu'une candidature en 2017 réactivera le front +Sarkophobie+ qui est extrêmement fort en France», dit-il.