«Le président Chirac doit reconnaître la culpabilité de son pays dans la guerre d'Algérie et demander pardon au peuple algérien.» Dans une longue lettre ouverte aux trois ministres français des Affaires étrangères, de la Défense et des Finances et de l'Economie, le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme a interpellé la République française sur ses responsabilités historiques envers le peuple algérien. Me Ali Yahia Abdenour remonte, dans son écrit, jusqu'à la nuit coloniale, qualifiant le colonialisme de violence et relève que «c'est violemment que le peuple algérien a cherché à se libérer». Et au président de la Laddh d'affirmer : «La République française fut coloniale, inégale, injuste, répressive, et le sentiment républicain a été confisqué dans un mélange de discrimination et de chauvinisme». En matière de droits de l'homme, Me Ali Yahia n'omet pas de signaler le parti-pris de la Ligue française des droits de l'homme qui, lors de son congrès d'Alger de 1931, a rendu une résolution qui tolère le colonialisme, «s'il se donne pour but l'élévation intellectuelle et morale, le développement économique et l'émancipation du peuple...». Une déclaration en flagrante contradiction avec les pratiques quotidiennes de l'armée française et des colons. Une armée qui a mobilisé des milliers d'Algériens qui «se sont battus côte à côte avec les Français et leurs alliés en Europe et en Afrique durant la Seconde Guerre mondiale», rappelle le président de la Laddh qui revient sur l'expérience qu'il a lui-même vécue. «Mobilisé après le débarquement américain en Algérie, le 8 novembre 1942, j'ai débarqué à Saint Tropez le 15 août 1944 avec la deuxième division blindée», raconte-t-il en évoquant juste après, les massacres du 8 mai 1945, pour marquer l'ingratitude de la France coloniale. Ce sont ces évènements qui ont orienté «les jeunes de ma génération vers le nationalisme». Dans sa lettre, Me Ali Yahia Abdenour ne manque pas d'évoquer la guerre de Libération nationale et dissèque la stratégie adoptée par la puissance coloniale qui consistait à terroriser le peuple pour l'amener à se désolidariser du FLN et de l'ALN. «L'armée française s'est déchaînée contre les villages, a ouvert le feu sur les habitants, incendié des récoltes, détruit des troupeaux, dynamité des maisons», témoigne le président de la Laddh qui estime que «le président Chirac doit reconnaître la culpabilité de son pays dans la guerre d'Algérie et demander pardon au peuple algérien». Terminant sa lettre ouverte par les visites ministérielles à Alger programmées dans le courant de ce mois, Ali Yahia Abdenour fait montre de son scepticisme quant à une quelconque volonté de la France de construire une relation sereine avec l'Algérie. A croire l'auteur de la lettre, «Sarkozy cherche à orienter le gouvernement algérien vers une économie libérale plutôt que vers une économie sociale». Ses propos sont aussi durs concernant l'objet de la visite du ministre français de la Défense. Enfin, le président de la Laddh en évoquant la question des journalistes actuellement emprisonnés, appelle la France à se positionner en faveur de la liberté d'expression en Algérie.