«Le plan de Bouteflika est quinquennal!» s'est-il presque fâché avant d'ajouter: «Il n'y a que chez nous où le quinquennal dure bien plus d'années.» A Oran, jeudi, Tayeb Louh, le ministre de la Justice, garde des Sceaux, a clôturé dans une minuscule salle d'audience de l'ère coloniale, le cycle d'installation des nouveaux présidents de cours et des procureurs généraux. Le dernier à être installé solennellement aura été M'hamed Bekhelifi, ex-inspecteur au ministère de la Justice, en qualité de procureur général près la cour d'Oran en présence de Medjaki, le président de cour maintenu pour tout ce qu'il fait à Oran et des autorités locales, à leur tête Abdelghani Zaâlane, le wali qui s'est sérieusement montré intéressé par le speech balancé depuis le pupitre par Louh qui a eu une énième occasion de rappeler les principes mobilisateurs de la réforme initiée par Bouteflika lui-même inspiré par le rapport de feu Mohand Yessad dans lequel figurait Tayeb Louh en personne. Préférant le ton conciliateur, mais avec des sourcils en «accent circonflexe», le ministre a dit sa détermination à réussir la mission dont il a eu l'honneur et le privilège d'hériter, surtout qu'en se rendant une heure plus tard sur le chantier de la future cour d'Oran, il a eu à constater que ce projet date de... 2008! «Le plan de Bouteflika est quinquennal»! s'est-il presque fâché avant d'ajouter: «Il n'y a que chez nous où le quinquennal dure bien plus d'années.» Puis fidèle à sa manière de s'adonner à de nombreux magistrats via la visioconférence depuis Béchar, Ouargla, Tébessa, Sétif, Bel Abbès, Aïn Témouchent, Alger, la Cour suprême, Relizane et autres Boumerdès, le ministre a martelé, encore une fois, les cinq axes qui intéressent vivement la réforme sans lesquels, elle est vouée à l'échec. Pour le ministre, l'introduction de l'Internet, du Web (prochainement) en direction des avocats, va permettre à la bureaucratie de débarrasser le terrain. La lutte sans merci contre la criminalité, surtout le dangereux port d'armes blanches et le défi lancé par les délinquants, sera permanente. Revenant sur le dernier mouvement partiel des magistrats qui entre en droite ligne dans le programme du gouvernement quinquennal 2014-2019, Tayeb Louh a exhorté tous ceux qui sont concernés par le succès de la réforme à participer activement aux efforts quotidiens: - la police judiciaire en coordonnant ses activités avec son «chef» le parquet; - les magistrats en allant vers la formation continue, une formation avec une haute vision; - la modernisation a pour objectif, entre autres, le rapprochement concret entre la justice et le citoyen; - se souvenir quotidiennement que la justice demeure l'unique branche à laquelle le citoyen s'accroche en vue d'obtenir gain de cause, surtout qu'il ne peut y avoir de justice forte sans une défense forte; - la revue de ces «pourvois» qui créent un encombrement gênant à la Cour suprême. La revue est vitale et il faudra chercher par où s'en tirer. Le Centre de recherche juridique et judiciaire du Dr Ahmed Chafaï est sollicité, bien sûr, au même titre que tous les acteurs. Là aussi, en deux longues minutes pour la révision des conditions de la formation du juge. «Depuis l'accès à l'Ecole supérieure de la magistrature à la révision des programmes des écoles. Cela concerne tout le monde. Pour chaque «os» rencontré, les spécialistes doivent mettre la main à la pâte, définir le lieu de ce qui ne va pas avant de lancer des assauts positifs contre les us et coutumes qui n'arrangent nullement le juge, la loi et le citoyen. Le droit du citoyen doit être préservé: la Constitution, le veut.» - Le tribunal criminel et les trois propositions qui se trouvent dans le rapport «Yessad» ont aussi été abordés «sans en faire une priorité», a martelé Louh qui a préféré revenir sur la lutte et les moyens à déballer contre la corruption. «Le ministère public sera renforcé en cadres de valeur venant des finances, notamment en vue de préparer les arsenaux juridiques. Les juges du siège n'auront sous les yeux que des dossiers bien ficelés avec des preuves (au moins 90%!)» s'est écrié le ministre qui a recommandé le renvoi devant le juge d'un dossier que si le parquet est convaincu grâce à des preuves palpables et solides. «Cessez de renvoyer à vos collègues n'importe quoi!» a ajouté Louh qui avait, au début de son intervention, eu une pensée pour les Oranais qui se sont sacrifiés en 1954, «Zabana, Boutlilis, Zerdoum, Houaria et autres Zoubida Arous méritent cette pensée!» Il faut signaler aussi que le ministre de la Justice a cette (utile) manie de se référer au: «Ailleurs» «hors de nos frontières» histoire de dire à nos juges qu'ils ne vivent pas sur une île du Pacifique! Il demande à tous l'adhésion à la réforme, la rigueur dans le travail et voir en face les réalités du pays avant d'engager une quelconque action (allusion aux nombreux retards enregistrés). «Garantissons les droits du citoyen via la justice! Demandons au juge de s'armer d'une haute formation digne d'intérêt!» a ajouté Louh qui allait entrer dans le «civil» qu'il présente comme l'avenir de la réforme avec la création comme pour le pénal - de pôles spécialisés. «Pour ce faire, il faut, là aussi, une haute formation et de gros moyens qui permettront de passer du rêve à la réalité.» Avant de lancer un clin d'oeil en direction de Tayeb Belhachem, l'inspecteur général chargé de rectifier la démarche des inspecteurs à qui il a été demandé à ce que l'inspecteur soit d'abord un guide, un frère aîné, un conseiller et un «répressif» au pire des cas (à Constantine, le ministre a dit le mot «répression» contre les juges et a préféré l'amabilité, la sympathie et le rapprochement). Tayeb Louh est enfin revenu sur son «dada»: la signature électronique qu'il voit d'un bon oeil et attend que Abdelhakim Akka, le directeur de la modernisation passe à la vitesse supérieure. Enfin, ailleurs, tous les nouveaux chefs de cour ont été installés, tous et avant le délai imparti par le ministre: Sahel, Hamouche, Belabiod, Amrane, Zouggari, Kebir, Ayachi, Mohamed Haddoud, Djadi, Ladjine, Djimane, Brahim Kherrabi... Bonne chance!