«Ce n'est un secret pour personne: nous essayons d'internationaliser notre cause», disait il y a moins d'une semaine le négociateur en chef palestinien Saëb Erakat. Il espère pour cela que le Conseil de sécurité de l'ONU vote avant Noël sur une résolution qui, pour les Palestiniens, devrait prévoir la fin de l'occupation israélienne dans deux ans. L'exaspération palestinienne avait été exprimée par le président Mahmoud Abbas le 26 septembre dernier devant l'Assemblée générale de l'ONU. Israël n'a aucune envie d'un Etat palestinien à son côté, avait-il soutenu. «L'avenir proposé par le gouvernement israélien aux Palestiniens est, au mieux, fait de ghettos isolés sur des terres morcelées, sans frontières, sans souveraineté sur son espace aérien, son eau et ses ressources naturelles, un avenir sous le joug de colons racistes et d'une armée d'occupation, au pire cet avenir prendra la forme la plus abjecte de l'apartheid», avait-il dénoncé. Les Palestiniens sortaient alors de la guerre dans la bande de Gaza, un «génocide» selon M. Abbas. Ils ont été aussi confrontés à l'échec d'une nouvelle initiative diplomatique américaine et à la poursuite de la colonisation par Israël, malgré la réprobation internationale. La Cisjordanie occupée et Jérusalem-Est, occupée, sont en proie à des violences, des attentats et des tensions qui, après avoir fait des dizaines de morts, ont encore tué un jeune Palestinien dans la nuit de lundi à mardi. La direction palestinienne vient même de voir l'un de ses responsables, Ziad Abou Eïn, mourir en Cisjordanie à la suite de heurts avec les soldats israéliens. «Impossible», a dit M. Abbas, de renouer avec des méthodes qui ont «maintes fois échoué». Les dirigeants palestiniens ont décidé de s'en remettre aux institutions internationales: Conseil de sécurité, Conventions de Genève et, tôt ou tard, Tribunal pénal international. Comme d'autres analystes, George Jiacaman, de l'université de Birzeit, observe que l'Autorité palestinienne, soumise à la pression de son opinion largement favorable à l'action voire à la lutte armée plutôt qu'à la négociation, n'a plus d'autre choix que le Conseil de sécurité. Sa «légitimité est menacée parce que la rue palestinienne pensait que la création (de l'Autorité) conduirait à celle d'un Etat non pas à une simple administration», explique-t-il. «L'Autorité palestinienne ne veut plus être l'otage des élections israéliennes ou américaines» et attendre des interlocuteurs mieux disposés, «en particulier après l'échec des discussions ces dernières années», dit un autre expert, Abdel Majid Sweilem. Les dirigeants palestiniens veulent profiter du soutien international grandissant qu'ils voient dans la récente reconnaissance par la Suède de l'Etat de Palestine et dans les votes favorables à une telle reconnaissance par les parlements français, britannique ou espagnol. Les observateurs attendent de voir jusqu'où et à quelle vitesse les Palestiniens sont prêts à aller au Conseil de sécurité. Ces derniers semblent partagés entre les partisans de «taper vite et fort» en présentant un texte sans concession, quitte à essuyer un veto américain, et les défenseurs d'une attitude plus constructive, note un diplomate occidental. La question d'Israël comme «Etat juif» par exemple est épineuse: une telle mention pourrait servir aux Américains à faire accepter une résolution aux Israéliens; mais elle est inacceptable sous une forme explicite pour les Palestiniens dans la partie opérationnelle de la résolution, dit-il. Les Palestiniens sont-ils prêts à la confrontation avec leurs principaux bailleurs d'aide, les Américains? Si ces derniers opposent leur veto, «le jour même» le président Abbas forcera la marche de la reconnaissance internationale en adhérant à toute une série de conventions internationales et au Tribunal pénal international, a assuré le négociateur en chef Saëb Erakat.