Le Général d'Armée Chanegriha reçu à New Delhi par le Chef d'Etat-major de la Défense des Forces armées indiennes    Sauvetage de 15 candidats à l'immigration clandestine au nord-est des côtes de Boumerdes    Le ministre de la Communication remet une lettre du président de la République à son homologue ghanéen    Athlétisme : trois athlètes algériens au meeting international de Fazaa    Renouvellement par moitié des membres du Conseil de la nation : 99 dossiers de déclaration de candidature acceptés jusqu'à jeudi    Le Premier ministre copréside samedi avec son homologue tunisien la cérémonie de commémoration du 67e anniversaire des événements de Sakiet Sidi Youcef    La PCH, un "acteur incontournable" dans l'approvisionnement des hôpitaux nationaux en médicaments    Le FFS tient une session extraordinaire de son Conseil national    Conflit dans l'Est de la RDC : l'Algérie appelle à la "retenue" et à la "désescalade"    Présidence mauritanienne de l'UA: des performances à préserver    Foot/Supercoupe d'Algérie 2024 (MCA-CRB): deux prétendants convoitent le premier titre de la saison    Cyclisme/Tour d'Algérie 2025: La 25e édition promet un spectacle grandiose à travers l'Est et le Sud du pays    Massacre de Sakiet Sidi Youcef: un autre exemple de la sauvagerie des expéditions punitives de l'armée coloniale    Chaib reçoit le Directeur général de l'AAPI    "Festival de l'image corporate": 14 films institutionnels distingués à Alger    Sonelgaz: signature d'un mémorandum d'entente avec Siemens Energy    L'Union des Organisations africaines contre le cancer ouverte à toutes les organisations du continent    Le ministre de la Santé se réunit avec les membres de la Commission nationale de prévention et de lutte contre le cancer    L'approche participative de Zitouni    Réunion de coordination portant suivi et évaluation des programmes de développement de la wilaya    Mise en service fin février de la ligne ferroviaire    Coupe d'Algérie Les 8es dans une ambiance survoltée    JS Kabylie : Le contrat de Lounas Adjout résilié    Retour de l'entraîneur Abdelhakem Benslimane    Le président de la République opère un mouvement partiel dans le corps des présidents de Cours et des procureurs généraux    Natacha Rey demande l'asile politique pour Piotr Tolstoï en Russie en raison de persécutions judiciaires    Brahim Merad annonce un élargissement à toutes les régions du pays    La police de Tébessa frappe à El Oued    Une bande de malfaiteurs spécialisée dans le vol des maisons neutralisée    Les décharges sauvages se multiplient à une cadence frénétique    C'est 30 ans de mensonges et de massacres au Moyen-Orient !    Le Mexique commence le déploiement de 10 000 soldats à la frontière avec les Etats-Unis    Palestine occupée : Des ONG appellent l'UE à mettre fin au commerce avec les colonies sionistes    Jeunes créateurs et investisseurs à l'honneur    La Mosquée-Cathédrale de Cordoue franchit la barre des 2 millions de visiteurs en 2024    Exposition d'artistes aux besoins spécifiques        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La caméra-fusil
HOMMAGE À RENE VAUTIER
Publié dans L'Expression le 06 - 01 - 2015


L'irrévérencieux militant de la cause algérienne
J'avais bien entrevu sa silhouette en 1964 quand il accompagnait l'état-major du Centre algérien du cinéma dont il avait lui-même jeté les premières fondations.
On le savait malade comme on savait qu'il avait la peau dure comme tous les hommes qui ont fait leur dur apprentissage de la souffrance lors de la lutte contre l'occupant étranger, mais on est toujours surpris par la disparition de celui qu'on croyait indestructible. René Vautier qui ne s'étale pas sur ses faits d'armes dans la Résistance française était plus prolixe quand il s'agissait d'évoquer la chaude camaraderie qui l'unissait à ses frères d'armes.
Il serait superflu de rappeler ici les étapes biographiques de ce cinéaste que l'on qualifie superficiellement d'engagé parce qu'il avait pris la consistance de l'acier trempé au contact des résistants communistes français qui formaient l'épine dorsale de la Résistance. Il était plus qu'engagé: il était résistant. Et il l'a été jusqu'à son dernier souffle, accompagnant de son inséparable outil tous ceux qui luttent pour leurs droits à la liberté et à la dignité.
J'avais bien entrevu sa silhouette en 1964 quand il accompagnait l'état-major du Centre algérien du cinéma dont il avait lui-même jeté les premières fondations mais je ne l'ai vraiment connu que dans les années 1980 quand il revint dans sa seconde patrie pour relater dans un documentaire édifiant intitulé «Le cinéma des premiers pas», son aventure cinématographique dans ce pays auquel il était très attaché.
Ce fut moi qui abordai celui qui se faisait appeler «Le Chaoui de Bretagne». Je lui avais rappelé cette croustillante polémique qui l'opposa en 1974 à un ministre français de la Culture et qui a été relatée dans une revue du cinéma de l'Ufoleis «Cinéma 74».
Répondant à une demande de René Vautier sur les besoins d'investissements culturels en Bretagne qui était alors une région sous-développée par rapport au reste du territoire français, le ministre gaulliste ou giscardien eut la malheureuse idée de lui répondre que le gouvernement français ne pouvait investir que dans les industries de transformation et que le cinéma n'en était pas une.
Alors, René lui envoya illico un bout de pellicule vierge et un bout de pellicule impressionnée avec la mention: «Si vous ne voyez pas ici une transformation, c'est que vous êtes aveugle ou que vous ne voulez pas voir.»
Abane à Vautier: «Oublie l'idéologie marxiste»
Ce rappel créa aussitôt un lien de sympathie avec celui qui avait une grande qualité de communicateur. Et ce fut alors, dans la salle de montage exiguë où il recevait des témoins importants de la Révolution (M'hammed Yazid par exemple) qu'il commença à se livrer par petits bouts, d'une manière impressionniste, avec une dose d'humour qui rendait inoubliables ses innombrables anecdotes.
Je sus alors que lors d'une halte chez les Touareg, les Reguibate qui lui demandèrent instamment de leur montrer Ben Bella, parce qu'il leur avait fait visionner une séquence d'actualités algériennes, que c'était lui qui avait relancé l'activité du cinéma itinérant qui existait déjà sous l'autorité du Gouvernement général avant 1954.
Le discours de Vautier était toujours d'une simplicité déroutante et il ne se mettait jamais en valeur même quand il lui arrivait de relater le suspense qui avait précédé le dynamitage du train présent dans L'Algérie en flammes, documentaire fondateur des Archives filmiques algériennes. Il passait volontiers sur les circonstances de son recrutement par le FLN: Henri Alleg y a suppléé en livrant dans son monumental ouvrage sur la Guerre d' Algérie, le premier contact du cinéaste avec le révolutionnaire clairvoyant et perspicace qu'était Abane Ramdane.
Celui-ci lui avait poliment demandé de mettre en sourdine son idéologie marxiste durant son passage au service du FLN et qu'il fallait être là sans aucune ostentation. Vautier lui répliqua avec humour: «Comme un soutien-gorge dans une robe de soirée!». Il raconte sans amertume aucune son passage dans les geôles du FLN à Tunis après l'exécution de Abane Ramdane: il avait pour compagnons de cellule les révolutionnaires accusés de complot, puis jugés, condamnés et exécutés. Il en avait gardé une amitié indéfectible avec les survivants dont Mohamed Chérif Messaâdia.
«Durant la grève de la faim que j'avais entamée pour protester contre mon injuste incarcération, j'avais tellement faibli que mes camarades de cellule amenaient une glace devant ma bouche pour voir si je respirais encore. Et Messaâdia de me répéter: 'Mange, Vautier, si tu meurs ainsi tu iras en enfer et alors on n'aura aucune chance de se retrouver dans l'au-delà!''»
Le fusil de Belhouchet et la caméra vide de Vautier
Il ne critiquait jamais ouvertement les gens qui ne partageaient pas sa manière de voir mais il finissait toujours sur un sourire narquois qui insinuait la naïveté ou le conformisme des gens qu'il décrivait. Il rappellera avec tendresse et à demi-mot sa complicité avec Mouloud Mammeri qu'il vit à l'occasion du visionnage de l'Aube des damnés et de L'Opium et le bâton, réalisés par Ahmed Rachedi. Il riait de lui-même et de ses étourderies comme celle où il avait oublié de charger sa caméra quand Belhouchet descendait avec son fusil-mitrailleur, un «Piper-Club» (un avion mouchard) lors d'un intense accrochage.
Le colonel lui rappellera cette anecdote sur son lit d'hôpital avec sa bonhomie habituelle. Il profitera du montage de son documentaire Le cinéma des premiers pas pour faire venir à Alger Roland Bacri, rédacteur humoristique du Canard enchaîné pour une émission sur le rôle des commerçants juifs Bacri et Busnach, dans le contentieux financier entre l'Algérie et la France.
Après un déjeuner bien arrosé, les deux compères se lancèrent dans un échange homérique improvisé sur l'interprétation de l'Histoire avec de tordantes pointes d'humour. La dernière fois que je fus en contact avec René, ce fut lors du tournage de son dernier documentaire en Algérie (en 96 ou en 97): comme j'étais devenu par la force des choses, un détenteur d'une partie de la mémoire, il me demanda le titre exact du film réalisé par les services de l'armée sur l'expérience atomique française. Je lui répondis: Reggane à l'heure «H». Je lui avais ajouté de ne pas partir dans le Sud par route à cause des faux barrages. Il me répondit en riant qu'on n'apprend pas à un vieux singe à faire des grimaces. J'attends toujours avec impatience le documentaire entamé par Mourad Laffitte et qui nous fera revivre un instant le père du cinéma algérien.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.