Il y a lieu de souligner la portée politique de l'attitude de l'Algérie sur une question longtemps restée tabou. Le judoka algérien Amar Meridja a affronté un israélien dans un combat comptant pour la qualification aux quarts de finale aux JO d'Athènes. Le fait n'est pas du tout banal lorsqu'on sait qu'habituellement, les sportifs algériens préféraient déclarer forfait au lieu d'avoir à concourir face au représentant de l'Etat sioniste que l'Algérie ne reconnaît pas. Ce combat de judo a donc une signification plus que sportive, puisqu'il déroge à une tradition politique, en principe, adoptée par l'ensemble des pays arabes et musulmans, hostiles à l'Etat hébreu. La décision de faire jouer Meridja face au judoka israélien, prise sans doute par les autorités sportives présentes en Grèce, intervient au lendemain du forfait d'un Iranien qui, dit-on, en Iran, avait refusé d'affronter le même sportif qui a été aligné face à l'Algérien. Alors qu'en Iran, les autorités politiques se sont félicitées de la décision de leur sportif, la dépêche de l'APS qui a rapporté l'information parle, elle, de disqualification du judoka iranien pour excès de poids. Cela dit, et au-delà de la polémique que pourraient susciter les véritables raisons du retrait de l'Iran de la compétition de judo dans cette catégorie, il y a lieu de souligner la portée politique de l'attitude de l'Algérie sur une question, longtemps restée taboue, tant dans les milieux politiques que sportifs nationaux. En effet, la lancinante question de l'attitude à prendre dans un pareil cas de figure s'est, pendant longtemps, imposée aux délégations algériennes engagées dans d'importantes compétitions internationales. On se souvient du fameux match qu'avait joué l'équipe nationale de ping-pong contre une sélection de l'Etat d'Israël ces dernières années et qui a eu pour conséquence une pluie de sanctions à l'encontre des joueurs algériens. L'on se rappelle également les nombreuses déclarations de forfait de sportifs algériens pour ne pas avoir à affronter des athlètes israéliens, attitude considérée à l'époque comme une reconnaissance de fait d'un pays en conflit ouvert avec l'ensemble du monde arabo-musulman. L'Algérie, a, à ce propos, toujours mis un point d'honneur à ne lier aucune relation, de quelque nature que ce soit avec l'Etat hébreux. Le chef de l'Etat a, d'ailleurs clairement tracé la ligne rouge à l'occasion d'un voyage en Israël d'une délégation de journalistes algériens. C'est avec une rare virulence que le président de la République avait réagi au séjour de confrères en terre hébraïque. Le geste du groupe de journalistes avait été considéré comme de la trahison. Et la poignée de main Barak-Bouteflika en juillet 1999, à l'enterrement du roi Hassan II n'y a rien fait. Le chef de l'Etat avait d'ailleurs dépouillé «l'événement» de toute dimension politique, le mettant sur le compte de la convenance. Tous ces éléments donnent aux trois petites minutes de combat du judoka Amar Meridja, une portée politique certaine et amène à se poser une foule de questions sur ce qui a poussé les autorités algériennes à autoriser ce match. Car, il est clair que Meridja n'a pas décidé de lui-même de déroger à la tradition. Pour l'heure, l'on ne peut pas affirmer qu'il y ait d'un côté comme de l'autre une volonté de normalisation entre les deux pays. En tout cas, en ce qui concerne l'Algérie, la question des relations avec l'Etat hébreux a été réaffirmée récemment par le chef de l'Etat dans un entretien accordé à un média étranger. «Nous ouvrirons une grande ambassade israélienne à Alger, lorsque tous les problèmes du Proche-Orient seront réglés, avec la restitution du Golan et la naissance d'un Etat palestinien souverain», avait-il déclaré en substance. Mais il demeure néanmoins que le match de judo d'hier est apprécié par de nombreux observateurs comme un précédent très significatif de l'évolution de la position de l'Algérie qui semble décidée à ne plus mélanger sport et politique, d'autant que l'esprit même des Jeux olympiques est d'éloigner le spectre de la politique en faveur d'une amitié entre les peuples en dehors de toute autre considération. En d'autres termes, l'Algérie a plus que permis à son sportif de disputer un combat, jadis problématique, elle a tout simplement souscrit à l'universalité des JO..