Une rencontre préliminaire, à un échelon intermédiaire, a eu lieu hier au siège du RND. Rien ne va plus, semble-t-il, au sein de l'alliance présidentielle. Ce sont là, du moins, les quelques échos qui nous parviennent de sources proches des trois partis qui la composent. Alors que le dernier sommet, qui avait eu lieu au mois de mai dernier, avait servi à mettre en place un règlement intérieur commun, posant ainsi les jalons pour la naissance future d'une UMP à l'algérienne, voilà que la structure est entrée dans une véritable phase d'«hibernation» depuis cette date. Comment expliquer ce «reflux» au moment où le pays continue de vivre une période de mutation telle que l'absence d'une alliance censée représenter la majorité du peuple algérien en est tout simplement suspecte. Ainsi, si les trois partis, RND, FLN et MSP ont recommencé à faire cavalier seul dès le lendemain de ce sommet que ses initiateurs, pourtant, nous prédisaient «historique», les premières «craquelures» ont commencé à miner l'édifice à la faveur des débats autour de la révision du code de la famille qui déchaîne les passions tout en mettant à nu les larges divergences de vue existant entre un parti «islamiste» comme le MSP et une formation politique «républicaine» telle que le RND dont la naissance-même s'était faite dans des circonstances principalement liées à la sauvegarde de la démocratie et des valeurs de la citoyenneté. Mais le problème le plus grave, sans doute, concerne la crise du FLN qui, plus de quatre mois après la présidentielle d'avril passé, tarde à trouver son épilogue, et tend même à connaître de nouvelles convulsions. C'est dans ce climat délétère, donc, que l'alliance tente, vaille que vaille, de tenir son prochain sommet, dont la date, apprend-on, a été fixée au 22 de ce mois. En attendant, nous dit-on encore, une réunion de coordination devant finaliser les dossiers prévus au menu, a eu lieu hier au siège du RND. Jusqu'à l'heure où nous mettions sous presse, aucune information n'a filtré à propos de ce conclave qui, croit-on savoir, a été marqué par un climat de suspicion. Selon les mêmes sources, «la question du très probable remaniement gouvernemental sera abordée lors d'une séance à huis clos». L'alliance, en effet, appréhende ce changement, dont elle souhaite tirer profit en maintenant sa majorité au sein de la coalition, mais aussi en tentant de décrocher d'autres portefeuilles aux mains de technocrates non-partisans. La question de l'élargissement de l'alliance, notamment à l'UDR d'Amara Benyounès, divise également les positions. C'est le MSP qui s'y oppose le plus farouchement, indiquant, lors de toutes les séances de travail, qu'«aucun élément nouveau n'est venu justifier l'ouverture de cette structure à d'autres formations politiques». Le MSP, dans sa politique entriste, cherche à se préserver du nombre, qui, réduirait les postes à pourvoir en faveur de chaque parti. En outre, le parti de Bouguerra Soltani souhaite éviter, aussi longtemps que possible, de faire route avec des militants qui s'étaient définis jadis comme des «laïcs», défendant donc des thèses antinomiques avec celles de son parti et de sa base, de plus en plus sceptiques vis-à-vis de sa stratégie. Quant à la crise du FLN, depuis qu'Ouyahia a apporté un soutien public aux «redresseurs» alors que ces derniers n'avaient même pas trouvé de terrain d'entente avec l'autre aile, il ne fait aucun doute que la question, qui commence à gêner grandement l'alliance, ne saurait être évoquée sans déclencher des étincelles entre les participants. De l'avis de nombreux redresseurs s'exprimant sous le sceau de l'anonymat, «le RND a tout intérêt à ce que la crise qui secoue le FLN perdure afin de garder sa suprématie aussi bien au sein de la coalition gouvernementale que dans l'alliance présidentielle». Certaines de ces sources sont même allées jusqu'à accuser le RND, ce frère ennemi, d'avoir infiltré les rangs du FLN dans le but de semer un peu plus la zizanie et de faire en sorte que la crise ne trouve jamais d'issue favorable avant que les échéances les plus importantes n'aient été dépassées. La rumeur avait laissé entendre que Belkhadem pourrait remplacer Ouyahia à la tête du gouvernement à cette condition près que le premier nommé réussisse à remettre sur les rails le parti qu'il a été chargé de redresser. En effet, même si l'ancien éradicateur qu'est Ouyahia ne cesse de se gargariser de ses qualités, désormais réconciliatrices, il ne fait aucun doute, précisent de vieux routiers du FLN, que Bouteflika ne saurait mieux s'accommoder que d'un véritable réconciliateur, à l'image d'un Belkhadem qui partage de vieux souvenirs à Sant'Egidio et de la défense des thèses et la réconciliation avec Abdelkader Hachani. C'est ce même Belkhadem qui a répété à maintes reprises ne pas vouloir rester une heure de plus dans un gouvernement qui ne serait pas réconciliateur. Or, la priorité de Bouteflika, depuis qu'il a confirmé son ascendant sur l'institution militaire, va forcément vers la concrétisation de cette réconciliation qui, pour lui, constitue un préalable à l'accomplissement de la suite de son programme électoral. Ainsi donc, les observateurs se demandent si l'alliance, en se réunissant dimanche prochain, cherche un second souffle ou bien s'achemine vers un éclatement devenu latent. Des cadres influents au sein de l'ex-mouvement de redressement, qui n'hésitent pas à sous-entendre que cette alliance leur serait devenue par trop encombrante, soulignent que «ce regroupement n'a plus rien à voir avec ce qu'il était avant la présidentielle d'avril 2004». Les spéculations sont donc ouvertes, d'autant que les observateurs divergent même sur la nature véritable de cette alliance. D'aucuns disent, en effet, qu'elle tente de prendre le président en otage, et d'autres soutiennent qu'elle est sa propre création et qu'il compte encore en faire usage aussi bien lors de la reconfiguration du paysage politique, qu'à la faveur des futurs rendez-vous électoraux.