«Si tu veux voir le fruit de ton labeur durer une saison, sème du blé. Si tu veux voir le fruit de ton labeur durer une éternité, éduque un enfant». Lao Tseu Troisième Etat du monde par sa superficie, la Chine est avant tout une civilisation de près de 1,3 milliard d´hommes qui se répartissent entre la Chine populaire et d´importantes diasporas chinoises, présentes dans tout le sud-est asiatique, en Océanie, et un peu partout dans le monde. Durant des siècles, la Chine a considéré qu´il n´y avait qu´un seul Etat sur la planète, le sien. En dehors de la Chine, le reste était peuplé de barbares. L´empereur chinois se considérait comme le maître de l´univers terrestre.(1). Troisième importateur et quatrième puissance industrielle de la planète, la Chine a enregistré en 2003 son meilleur taux de croissance depuis 1996, soit 9,1%. Depuis le lancement de la réforme économique, à la fin des années 1970, par Deng Xiaoping, la Chine a enregistré en permanence, un taux annuel de croissance de cet ordre, taux qui se maintient à 8% en 1997-1998 malgré les effets de la crise asiatique et ... l´épidémie de Sras. Cette croissance galopante est soutenue par des secteurs de pointe, comme l´informatique, la robotique ou les biotechnologies, et profite largement à d´autres secteurs. Elle a été favorisée par un changement structurel en profondeur, qui concerne aussi bien le système des prix (désormais totalement libéralisés à l´exception d´une quarantaine de produits, dont le pétrole et les céréales) que le système fiscal (dont la rationalisation permet une allocation plus efficace des revenus) ou encore le marché du travail (où la pratique du contrat de travail dans les entreprises publiques s´est majoritairement substituée à l´ancienne pratique de l´emploi à vie qui favorisait l´improductivité).(2). La Chine dans l´histoire La Chine fut en avance sur l´Europe sur le plan des sciences appliquées, des techniques, de la gestion économique, ceci jusqu´au XVe siècle. Les innovations chinoises sont nombreuses: l´imprimerie (8 siècles avant Gutenberg), le papier monnaie (alors que l´Europe utilisait le troc), la boussole, les fusées, etc. Et puis du XVe au XVIIIe siècle, la Chine se pétrifia, pendant que l´Europe décollait et prenait la tête des nations sur le plan des inventions et des innovations (la Renaissance, puis la Révolution industrielle). Sur le plan économique, la Chine s´effondra au cours du XIXe siècle, simultanément l´Europe dominant économiquement durant le XIXe et le XXe siècle. Politiquement, l´histoire chinoise est marquée par une lutte incessante entre les forces centrifuges et la volonté d´unité. Il ne faut pas cependant occulter la responsabilité pendant tout le XIXe siècle de l´Europe qui n´a cessé d´agresser économiquement la Chine. Enfin, les rivalités avec le Japon en 1895 et 1945 font qu´il existe de nos jours toujours un contentieux. Aujourd´hui, le paradoxe d´un pays qui demeure communiste et qui voit se développer des formes extrêmement capitalistes de marché, reste une énigme géopolitique. Dans ce pays, tenu par un Etat lui-même façonné par une idéologie et des pratiques jacobines, le développement économique a, certes, engendré un renouveau de la puissance chinoise, mais aussi de forts clivages régionaux et sociaux. Ainsi, le développement de l´arsenal militaire chinois, notamment de sa composante nucléaire, fait craindre à de nombreux pays voisins une volonté de grande puissance. En 1986, la Chine demande à entrer au Gatt ( la future OMC) Entre 1979 et 1990, la Chine normalise ses relations avec le Japon et l´URSS. En 1984, il y eut la réintroduction des lois du marché et la libéralisation des prix grand boom dans l´industrie légère. 1997 marque un double tournant pour la Chine: l´Etat encourage désormais et ouvertement l´initiative privée (artisanat, écoles payantes) à la ville comme à la campagne. En 1995, à l´intérieur d´un Extrême-Orient en pleine expansion, la Chine a atteint un objectif peu banal : réduire sa croissance aux alentours de 10% au lieu des 13% qu´elle affichait depuis 1992, la raison de cet emballement de l´économie chinoise est directement liée à ses ZES, cinq Zones Economiques Spéciales en Chine du Sud-Est créées à l´initiative de Pékin au début des années 80, dans le cadre du programme des «quatre modernisations», des sortes de zones franches où les Chinois sans retenue expérimentent les modes de gestion des Occidentaux. Ceci souligne un peu plus encore les contradictions d´une grande puissance. Grâce à la sagesse et à l´héritage de sa tradition millénaire , - n´est-ce pas en effet, l´empire du Milieu dont les récits merveilleux des voyageurs arabes et européens tels que Marco Polo ont enflammé l´imagination sur la Cité interdite et la Grande muraille, semble-t-il visible de l´espace - la Chine a su négocier les virages imposés par la «Longue marche» puis par le libéralisme et la mondialisation. D´ailleurs, un film prodigieux: Le Dernier empereur a d´ailleurs été réalisé sur la période de transition entre l´empire et la révolution. Le miracle économique a engendré une nouvelle élite, ils dominent également la vie économique. Cette nouvelle race de tycoons milliardaires à dollars, propriétaires de Rolls, de jets privés et de palaces, a fleuri dans des provinces comme Zhejiang (au Sud du pays) et Hebei (un peu plus au Nord). Toute une génération de jeunes bourgeois qui font exploser le boom immobilier, dopent le marché du véhicule individuel et celui de l´électronique. D´ici à 2005, la classe moyenne, qui augmente de 40% par an, devrait compter plus de 200 millions de personnes. Cependant, la nouvelle richesse ne profite pas à tous. En effet, entre 150 et 300 millions de Chinois vivent avec un euro par jour. Attirées par la légèreté des charges sociales, la flexibilité des usines et par une main-d´oeuvre inépuisable, bon marché et disciplinée, les entreprises étrangères délocalisent de plus en plus en Chine, car la Chine entend bien profiter du savoir-faire occidental, surtout en ce qui concerne les secteurs de pointe. Pour la deuxième année consécutive, en 2003, le pays tient la palme des investissements étrangers, l´équivalent de 53,5 milliards de dollars contre 40,4 milliards en 1999. 60% des investissements proviennent de la diaspora chinoise, devant les Américains et les Japonais. Mais la Chine n´est pas seulement un exportateur hors pair, c´est également un acheteur fiévreux qui achète de tout à travers le monde : crevettes en provenance de la Thaïlande ou du Vietnam, bois d´Indonésie, mémoires et écrans plats chez le voisin coréen, du minerai de fer d´Australie, de Suède ou d´Inde, des composants électroniques en Europe. En tout, plus de 450 milliards de dollars d´achat en 2003 pour presque 500 milliards de dollars de vente. Ainsi, témoin de ce miracle, la ville de Shanghai¨est un centre économique de première grandeur qui compte pour 16% de la production industrielle nationale, avec seulement 1,5% de la population avec 17 millions d´habitants. Elle dispose de plus de 20.000 chantiers et 120 gratte-ciel de plus chaque année, la mégalopole chinoise affiche sans complexe son ambition : devenir la plaque tournante de l´Asie. S´agissant des exportations (part des échanges mondiaux): jouets 60% ; meubles 16,2% ; textile 15% ; horlogerie 15% ; téléviseurs 14% ; matériel électrique 12%. Production (part dans la production mondiale) photocopieurs 70% ; bicyclettes 60%; ordinateurs 50% ; chaussures 50% ; riz 30% ; pommes 45%. A partir de 1992, le fax s´est progressivement démocratisé. Les ventes de téléphones mobiles ont explosé. 40 millions de portables ont été vendus fin 1999, 100 millions en 2001 et le chiffre de 250 millions est avancé pour 2004. Aujourd´hui, le taux de pénétration du téléphone portable, dans les villes comme Pékin, doit être proche de celui des villes européennes (environ 20%). La plupart des téléphones portables sont équipés du WAP (Wireless Application Protocol), permettant de se connecter à Internet. Le nombre d´internautes chinois est de 50 millions en 2002, il dépasse celui de l´Australie et du Japon en 2002. A l´horizon 2005, selon certains organismes de prévision, 85 millions d´internautes seraient prévus. Ils seront donc plus nombreux que les Américains.(3). La Chine puissance agricole: «La ferme du monde» Pommes, tomates, poires, pêches, fleurs, lait... L´empire du Milieu modernise son agriculture à marche forcée. Et si, après être devenue en moins de deux décennies l´usine du monde, la Chine est également en passe de devenir la plus grande ferme de la planète. Dans le domaine des biens issus de l´industrie comme dans les autres, en tout cas, le pays avance à pas de géant: selon la Food and Agriculture Organization (FAO) des Nations unies, la Chine est, avec le Vietnam, le pays du monde dont la production agricole a le plus augmenté au cours des dernières années. Quant aux exportations, elles ont plus que doublé depuis 1990, frôlant en 2003 les 20 milliards de dollars. «Nous voulons atteindre 40 milliards d´exportations d´ici à dix ans», a annoncé le vice-ministre du Commerce, Yu Guangzhou.(4). Plus encore que l´industrie, elle dispose par ailleurs d´un atout majeur: un réservoir de main-d´oeuvre à bas prix presque inépuisable, avec plus de 800 millions de personnes, dont 330 millions de paysans, vivant aujourd´hui en milieu rural. En 2003, la Chine a importé plus de 21 millions de tonnes de graines de soja, soit près d´un tiers des importations mondiales, contre seulement 4 millions en 1998. Les progrès sont d´ores et déjà mesurables: comptant depuis plusieurs années parmi les premiers producteurs mondiaux de viande de porc (46% de la production mondiale), de coton (24%), de thé (23%) et de céréales (15%), la Chine est également devenue le premier producteur mondial de poires (70%), de pommes (48%), de pêches (32%), de tomates (30%), d´ail ou encore de conserves de fruits et de légumes. C´est sur toutes ces avancées que la nouvelle équipe au pouvoir depuis 2002 - composée du président Hu Jintao et du Premier ministre Wen Jiabao - compte s´appuyer pour s´attaquer aux marchés étrangers. En utilisant les mêmes méthodes, mélange de volontarisme et de pragmatisme, qui ont si bien réussi dans le domaine de l´industrie. Aujourd´hui, c´est plus de la moitié de la production chinoise de fleurs qui provient du Yunnan. Le secteur horticole, qui compte dans la région 21.400 agriculteurs et 390 entreprises, a vendu en 2003 pour 415 millions de dollars d´oeillets, mais aussi de roses, de lys, de tulipes ou encore d´orchidées, dont 30 millions de dollars à l´étranger.(4). En l´espace de quelques années, les Chinois sont ainsi devenus les deuxièmes exportateurs mondiaux de pommes en volume et les cinquièmes en valeur. Ils sont également, depuis 2000, les premiers exportateurs de concentré de jus de pommes. Un secteur où ils représentent aujourd´hui, 16% du marché américain, contre seulement 1% en 2001. Les exportations de légumes ont ainsi grimpé, en valeur, de 43%, et celles de fruits, de 80%. Aujourd´hui, la Chine est le premier exportateur mondial de légumes secs ou congelés, de champignons préparés, d´ail ou encore de fruits en conserve. Et que dire des secteurs de la pêche et de l´aquaculture? En dix ans, la production aurait été multipliée par 3, atteignant, en 2002, 45 millions de tonnes, soit près d´un tiers de la production mondiale. Depuis cette date, la Chine, qui ne se classait encore qu´au troisième rang en 1999, est le premier exportateur mondial de produits aquatiques (plus de 4,5 milliards de dollars. Au total, l´empire du Milieu, désormais huitième exportateur mondial, est en passe de devenir la ferme de l´Asie. La Chine représente ainsi près de 15% des importations agricoles japonaises - plus de 30% pour les légumes - et attire sur ses terres, dans le Shandong notamment, nombre de firmes agroalimentaires nipponnes. Enfin, les Chinois ont massivement investi dans la recherche: «Ils sont les seuls au monde à utiliser, sur la moitié de leurs plantations, un riz hybride résistant aux maladies», explique ainsi Claude Aubert, spécialiste de l´agriculture chinoise à l´Inra. La peur des OGM leur sert en effet d´arme commerciale, leur permettant de limiter les importations de grains en provenance des Etats-Unis. Mais le pays n´en est pas moins à la pointe en matière de recherche agrogénétique: il a ainsi investi plus de 3 milliards d´euros sur cinq ans dans le domaine, et emploie 2 000 chercheurs pour mettre au point des semences génétiquement modifiées. «Il suffit d´un signe du gouvernement, assure un bon connaisseur des OGM dans le pays, pour qu´elles soient mises en culture à grande échelle.»" (4). (1). Site web Reliinter de 1945 à nos jours. Mise à jour faite le: 1/08/04 (2). Web encyclopédie.com : la Chine ? (3). Alain Crouzat : Développement dans les futures puissances économiques : Chine / Inde Note du 16 au 29 octobre 2000 mailto:[email protected] / Richelieu Finance www.richelieufinance.fr (4). Benjamin Masse-Stamberger : La Chine ferme du monde, L´Express du 07/06/2004.