Une voiture piégée a explosé devant l'ambassade d'Algérie à Tripoli Vingt-quatre heures après le communiqué des parties réunies à Genève, voilà que Fajr Libya fait volte-face et annonce, précipitamment, sa bonne volonté. Les évènements s'accélèrent en Libye où un attentat à la voiture piégée a ciblé, hier, l'ambassade d'Algérie à Tripoli, attentat vite revendiqué par la branche libyenne du mouvement Daesh (EI, Etat islamique) sur une chaîne appartenant au mouvement terroriste. Précipitamment, Fajr Libya est sorti de sa réserve pour annoncer sa disponibilité à cesser les hostilités «à condition que les autres parties respectent le cessez-le-feu», allusion explicite aux forces du général Haftar. Après deux jours de discussions «constructives» à Genève, sous l'égide de la Force des Nations unies pour la Libye, les protagonistes du conflit armé sont tombés d'accord pour mettre fin aux affrontements et nommer un gouvernement d'union nationale, dans le but de sortir ce pays du chaos dans lequel il a été plongé en 2011. Dans un communiqué publié vendredi par l'ONU qui a parrainé ces négociations, les 14 parties prenantes du conflit, réunies depuis mercredi à Genève, étaient parvenues à un accord sur un agenda en vue de former un «gouvernement d'unité». Mais cette avancée, pour aussi spectaculaire qu'elle ait pu paraître, ne pouvait revêtir la lueur d'espoir attendue par le peuple libyen, dans la mesure où la principale partie au conflit armé, les milices islamistes de Fajr Libya, ne s'étaient pas rendues à Genève et accueillaient, semble-t-il, les résultats avec beaucoup de doutes. Là, vingt-quatre heures après le communiqué des parties réunies à Genève, voilà que Fajr Libya fait volte-face et annonce, précipitamment, sa bonne volonté quant à la suite des événements. Pourquoi un tel coup de théâtre? Gagner du temps? Pratiquer la stratégie du «wait and see»? Il semble que la principale raison d'un tel revirement se trouve dans le message aussitôt délivré par l'Union européenne qui a exprimé des menaces à peine voilées à l'encontre des parties qui refusent de participer au dialogue et à la recherche d'un dialogue ouvrant la voie à la constitution d'un dialogue consensuel. Ce communiqué qui recelait diverses propositions de mesures coercitives allant du gel des avoirs des protagonistes récalcitrants, à leur interdiction de voyages à l'étranger, non compris les sanctions non dites relevant de la CPI, avait édicté de manière latente le principe incontournable d'une intervention armée seule à même de régler le problème et d'écarter le danger que les milices terroristes font planer à la fois sur les pays riverains de la Libye et aussi sur les pays européens traditionnellement ciblés. Fajr Libya ne pouvait ignorer ni même feindre d'ignorer ce message, comme elle a feint d'ignorer les autres initiatives en cours depuis plusieurs mois et c'est tout aussi bien, car le plus important est que ses représentants rejoignent la table des négociations pour y formuler leurs attentes et leurs concessions en toute transparence. Les efforts de l'Algérie ont été, dans cette conjoncture, dérangeants puisqu' un attentat à la voiture piégée a visé, hier, notre ambassade à Tripoli. Cet acte «constitue, a aussitôt déclaré le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamara, un crime au regard du droit international». Outre une «condamnation énergique» de ces actes en Libye ou ailleurs, il a rappelé les efforts de l'Algérie «pour amener les frères (libyens) à adopter la voie du dialogue et de la réconciliation dans la perspective d'une solution globale et unificatrice», ajoutant que «l'Algérie se félicitait des avancées réalisées à Genève sous l'égide des Nations unies, une obligation dans le cadre des exigences de paix et de stabilité dans notre région». Reste à espérer que ces avancées aboutissent rapidement et que toutes les factions réunies s'entendent sur la composition d'un gouvernement consensuel qui aura à charge de rétablir la paix, la sécurité, la réouverture des transports aérien et maritime, la libération de toutes les personnes détenues illégalement, le retour des déplacés et des réfugiés. Même si la médiation algérienne peut déranger certaines factions qui entendent perdurer dans leur stratégie de mise au pas de la société libyenne, construisant les bases du terrorisme à quelques encablures des pays voisins du Sud, une seule chose mérite qu'on s'y attache: le retour de la paix dans le respect de l'intégrité territoriale de la Libye et du droit du peuple libyen à disposer librement de son sort.