Les organisateurs de cette édition crurent bon d'ouvrir le festival à d'autres genres de musique. La dernière édition du festival de la chanson raï n'aura démontré, pour les nombreux présents, que l'échec de ceux qui ont repris le flambeau pour porter vers les cimes ce genre de musique qui se meurt. Il est loin le temps des stars internationales comme Khaled et Mami il ne subsiste des complaintes de Hasni que l'écho d'un lamento, repris de temps à autre par une voix éraillée qui n'arrive pas lui donner toute sa profondeur. Les organisateurs de cette édition crurent bon d'ouvrir le festival à d'autres genres de musique. Ils crurent bon aussi d'exiger, à chaque participant, un minimum de 2 albums sur le marché pour s'assurer une adhésion populaire et un niveau relevé des représentations. Ces précautions ne servirent à rien puisque même ceux qui ont une renommée se sont amusés à enfoncer encore plus le clou dans le corps meurtri de la chanson raï. Pourtant, le public a répondu présent mais devant le ronronnement proposé en guise de programme, les nombreux présents se sont mis à scander les noms de Mami, Hasni ou encore Khaled. Leur ombre a plané sur l'esplanade du Théâtre de verdure. «La scène du raï est devenue stérile, elle n'enfantera plus de chanteurs comme Khaled, Mami ou encore le regretté Hasni», dira un parolier. Ce dernier, encore accroché aux effluves d'une époque, avouera qu'il ne comprend plus rien au raï. «Joséphine est entraînante mais elle suscite un débat que le public tout comme les animateurs de la scène raï, refusent d'engager aujourd'hui», dira-t-il. Pour lui, elle revient aux origines de la contest-song, le raï original qui s'était affirmé durant la guerre 1914-1918 comme un moyen d'affirmer son refus de s'engager dans l'armée française. S'hab el baroud ou du moins sa version originale, s'apparente à Joséphine de Redda Taliani qui refuse lui, de se soumettre au chant des cygnes. Hormis cet éclair qui pourrait donner une autre orientation à la chanson raï, notre interlocuteur avouera son scepticisme. «Tous les autres ont fait dans la reprise au lieu de proposer des nouveautés. C'était du Khaled, du Hasni, du Mami ou encore de feue Cheikha El-Jania», avouera-t-il. Pour lui le festival n'était pas une occasion pouvant amener la résurrection de la chanson raï. «C'était une foire, une semaine de séduction à l'adresse des producteurs qui ont brillé par leur absence au théâtre de verdure Hasni Chekroun». Il reprochera aussi aux organisateurs d'avoir occulté la part du débat dans ce festival. «C'est grâce à des conférences et des causeries qu'on peut avancer. L'Apico, engagée dans un bras de fer avec l'APC, a mobilisé toute son énergie autour d'un seul point: Comment remplir et sécuriser le Théâtre de verdure. C'est la preuve que la préparation n'a pas reçu toute l'attention requise», dira le parolier. Pour cet aspect, les responsables de l'Apico sont catégoriques, «Nous n'avons rien laissé au hasard. Nous avons inclus dans notre programme des expositions photos, des projections vidéos et même des conférences et ce n'est pas de notre faute s'il n'existe pas beaucoup de chercheurs qui ont travaillé sur la musique raï», diront-ils. Finalement, ce festival aura prouvé que la musique raï est devenue un feu de paille qui n'aura duré que l'espace de quelques complaintes. Même les grands producteurs de musique l'ont compris puisqu'aujourd'hui, ils l'associent à des aires de Rap et de hip-hop, les airs en vogue, pour s'assurer une nouveauté avec laquelle ils glaneront des parts de marché. Parti en conquérant durant les années 90, le raï n'est aujourd'hui qu'un élément de tous les lugubres melting-pot pour ne pas disparaître. Dommage pour l'oeuvre de Hasni, Khaled ou encore Mami.