Saïd Guerni et Saïdi Sief sont passés à côté de leur sujet. C'était l'avant-dernière journée des jeux Olympiques. C'était aussi l'ultime chance pour l'Algérie de décrocher au moins, une médaille dans cette olympiade. L'espoir a été vain. Aucun des 3 finalistes engagés dans les deux courses qui nous intéressaient n'a pu accéder au podium. Même pas sur la plus petite des marches. Athènes 2004 restera comme un échec pour le sport algérien comparativement à ses sorties lors des derniers jeux Olympiques. Les trois dernières olympiades avaient, en effet, vu les représentants algériens obtenir à chaque fois des médailles. Mieux même, sur ces trois olympiades, il y eut à chaque fois une médaille d'or, le sommet ayant été réalisé à Atlanta en 1996 avec deux places sur la plus haute marche du podium. Samedi soir, on avait d'abord misé sur Saïd Guerni dans la finale du 800 m. Sa victoire dans sa demi-finale avait entretenu l'espoir. Seulement on avait trop négligé le fait que s'il avait gagné, il n'en avait pas moins réalisé le 5e temps des deux demi-finales réunies. Sa victoire nous avait également fait oublier que la veille, il était passé par un trou de souris pour se qualifier puisqu'il avait été le dernier des repêchés. En finale, il a choisi d'attaquer d'entrée. «C'était la seule alternative que j'avais», nous a-t-il dit après la course. «Si je ne m'étais pas porté en tête, on m'aurait enfermé et empêché de démarrer». C'est ainsi que pendant un tour, il a donné de l'espoir au camp des Verts. Premier, il paraissait être en mesure de réaliser un coup fumant. Mais ce n'était qu'un feu de paille dans la mesure où, très vite, Kipketer et Bugneïsse se portèrent à sa hauteur. Il était tout de même le champion du monde de la spécialité et il était particulièrement suivi par ses adversaires. «J'étais bien, a-t-il poursuivi. Mais à 200 mètres du but, il y a eu comme une bousculade. Cela a ralenti mon élan et je n'ai pu empêcher les autres de partir devant. Mes chances de victoire étaient anéanties». Celui qui reste malgré tout champion du monde avait le sourire de quelqu'un qui n'avait rien d'un désappointé. «Ne croyez pas que cette défaite me désole. Je suis content de ce que j'ai fait. J'étais entouré de grands champions, ce qui n'est pas rien. En fait, l'accès à cette finale était déjà pour moi une satisfaction dans la mesure où j'ai connu de grosses difficultés en série et que cette saison n'a pas été une grande saison pour moi». En tout cas, ce 800 mètres aura permis de constater que le recordman du monde Wilson Kipketer est toujours là, malgré le poids des ans, puisqu'il s'adjuge la médaille d'argent et que Borzakovski, le Russe, deuxième derrière Saïd Guerni aux mondiaux de Paris l'an dernier s'empare de l'or, l'argent olympique revenant au Sud Africain Mulaudzi. L'autre finale sur laquelle se focalisaient les Algériens était le 5000 m messieurs où étaient engagés Saïdi Sief et Moussaoui. Le premier nommé craignait une course rapide imprimée par le trio éthiopien parmi lequel se trouvait le recordman du monde de la distance, Kenenissa Bekele. Or, il n'en fut rien. Les hommes des Hauts-Plateaux éthiopiens ont certes pris les commandes au bout de quelques centaines de mètres de course mais le rythme était particulièrement lent. «Lorsque j'ai vu qu'aux 800 mètres on était passé en 2'24'', j'ai su que j'avais de grandes chances de gagner, nous a dit le vainqueur de l'épreuve, Hicham El Guerrouj. Les Ethiopiens ont commis une grosse erreur. Le rythme lent de la course a servi mes desseins car si eux sont rapides au train, je suis plus fort qu'eux au finish». Une course lente, cela voulait dire que les deux Algériens avaient leurs chances. Or, Moussaoui baissa pied très vite dans la course. Quant à Saïdi Sief, il s'est usé au fil des kilomètres. Petit à petit, il a cédé du terrain et lors du dernier kilomètre, il était complètement hors du coup. Il termina 10e en 13'32''57 alors que Moussaoui se classa 13e, soit dernier dans le temps de 14'02''01 loin derrière le vainqueur El Guerrouj, qui vient coiffer Bekele dans le dernier 100 m (13'14''39). A la fin de la course, nous n'avons pu contacter aucun des deux, qui ont préféré regagner les vestiaires sans parler aux journalistes. Quant à El Guerrouj, il réalise un grand exploit puisqu'il égalise le légendaire Finlandais Paavo Nurmi, le seul qui avait réussi à gagner le 1500 m et le 5000 m dans une seule olympiade. C'était en 1924 à Paris. «Je suis honoré d'avoir égalé le record d'une telle figure de l'athlétisme», nous dira El Guerrouj. «Ce 5000 m, je n'en avais pas fait mon objectif. Je me suis aligné dans cette course sans grande conviction. Mais il y a deux jours, un ami de Toulouse m'a appelé pour me dire que j'étais prêt de l'exploit de Nurmi et que je n'avais pas le droit de rater une si belle occasion. Grâce à Dieu, tout a marché pour moi. J'étais venu ici pour remporter une seule médaille d'or. Je me retrouve avec deux. C'est le bonheur pour moi. En tout cas, dès la saison prochaine, je compte m'attaquer au record du monde du 5000 m».