Le quotidien a bouclé, hier, sa 13e année mais il a cessé de paraître depuis le 24 juillet dernier. Si aucune mesure urgente ne l'extirpe de son douloureux sort, il risque de disparaître à tout jamais. Hier au siège du Matin, où était organisée une journée portes ouvertes, il y avait peu d'espoir de voir le bout du tunnel. A l'intérieur des locaux tristes et moroses et malgré la voix cristalline de la cantatrice libanaise Faïrouz qui retentissait à pleins tubes, l'ambiance était au désarroi et à l'incertitude. Sur les murs étaient exposées les caricatures de Dilem dont le trait retrace les péripéties du journal et de son directeur qui croupit dans une geôle pour deux ans. La mine défaite , l'air abattu le collectif du Matin, lors d'une conférence de presse animée au sein de la rédaction, même s'il tient à signifier qu'il ne compte pas baisser les bras, ne se fait pas d'illusions. Redouane Zizi, l'un des trois délégués chargés de veiller au grain a d'emblée annoncé la couleur: «Nous avons initié cette journée portes ouvertes pour informer l'opinion de l'état de l'entreprise. Le personnel dont le nombre s'élève à 150 employés sans compter les nombreux collaborateurs, est en situation de chômage technique. Nous sommes soumis à des pressions de la part du fisc et des imprimeries. Aujourd'hui c'est le statu quo. On ne sait pas s'il y a possibilité de reprise ou pas.» Il s'est demandé quelles étaient les véritables intentions des pouvoirs publics. «Qu'attendent-ils pour assainir la situation? S'il veulent qu'on ferme boutique définitivement, qu'ils nous le disent». S'agissant des personnalités politiques et civiles qui ont rendu visite au journal à cette occasion, le journaliste a pris un air maussade en expliquant que seuls Brerhi, quelques animateurs du mouvement citoyen, des confrères et des lecteurs pris de sympathie pour le quotidien ont répondu présent. Les autres pour lesquels le journal a servi de tribune d'expression ont brillé par leur absence. L'orateur a révélé concernant les journalistes recrutés dans d'autres journaux que «leur nombre est insignifiant, à peine une dizaine». Les autres qui se rendent quotidiennement à leur lieu de travail, ne désarment pas et croient dur comme fer que l'aventure du Matin n'est pas près de s'arrêter. Les administrateurs , pour leur part, attendent le quitus des autorités concernées pour leur établir un échéancier de paiement des dettes dont est sommé de s'acquitter le journal sous peine de mettre la clé sous le paillasson et ce pour longtemps, pour ne pas dire définitivement.. L'une d'entre les délégués, visiblement émue, a dit dans un cri de détresse auquel nul ne peut faire la sourde oreille «Ce serait dommage que notre journal disparaisse brutalement». Ce serait effectivement dommage que la presse écrite soit amputée de l'un de ses fleurons.