Les Etats-Unis grincent des dents à entendre les éloges adressés à Paris par ce dangereux groupe terroriste. Dans un communiqué diffusé par son site Internet, l'Armée islamique en Irak prend à témoin la communauté internationale et attire son attention sur ce qu'elle qualifie d'«opérations criminelles continues», menées par les Etats-Unis, et «la dévastation, la ruine, les tueries et les faillites» auxquelles a abouti la guerre. Aussi, l'Armée islamique en Irak «rend hommage au gouvernement français pour son initiative positive à l'égard du peuple irakien». Le communiqué dit aussi que l'Armée islamique espère que cette initiative «augurera d'une nouvelle ère de compréhension de nos causes». Le communiqué ne fait aucune référence aux deux otages, mais il est évident qu'il porte de bonnes nouvelles pour les deux journalistes détenus. D'ailleurs, quelques heures après la diffusion du communiqué, un Fran-çais, Philippe Brett, qui se présente comme un médiateur à Bagdad, dit que la libération des deux journalistes est pratiquement une «affaire conclue», et que le gouvernement français n'attend que l'autorisation américaine pour obtenir un «couloir aérien» et pouvoir rapatrier ses deux ressortissants. La nouveauté de cette affaire, qui semble courir vers son dénouement, réside dans deux points aussi importants l'un que l'autre. D'un côté, il s'agit bel et bien d'un antécédent dans les rapports Etats occidentaux-groupes armés, et l'on voit bien que par la force de l'argument qu'elle a développé et le positionnement politique pris, l'Armée islamique en Irak, une des plus importantes organisations armées avec Tawhid wal Jihad d'Abou Mossaâb Ez-Zerkaoui, s'est substituée à l'Etat et est devenue un partenaire politique et de guerre incontournable en Irak. C'est par rapport à cela que le ministre français des Affaires étrangères, Michel Barnier, a demandé la participation de «l'ensemble des forces politiques, y compris celles qui ont choisi la voie de la résistance par les armes», et l'inscription à l'ordre du jour de «la question du retrait» des forces étrangères présentes en Irak. D'un autre côté, on sent bien que le commandement militaire américain enrage de voir ses ressortissants systématiquement exécutés, et que la France, en définitive, gère mieux sa «politique islamiste» et que les musulmans, malgré les tensions politiques et sociales, qui éclatent çà et là, tiennent encore la France en haute estime. Bonnes nouvelles en perspective pour les deux otages français, et pour la diplomatie française en temps de «crise islamiste».